Nemo Desty - Le courant passe bien

Si vous vous attendez à une histoire peine d’aventure et de rebondissement, je vous invite à consulter un comics du début de XXIème siècle. On y retrouve des héros comme aujourd’hui, sauf qu’eux, il n’existe pas. La vie de Nemo, il est vrai, pourrait semblait incroyable à n’importe quel enfant de cette époque passée. Mais pour les gens de sa génération, c’est la routine.

Il est né. C’est déjà une bonne chose, bien que ce n’est pas toujours une certitude. Il est né, donc, en France, ça aussi c’est une bonne chose pour de multiples raisons. Il aurait pu naître à Liverpool¹ ou à Charleroi² par exemple, deux villes qui malgré notre époque lumineuse, semble avoir oublié de suivre le rythme du reste du monde. En y pensant, la France aussi a ses coins sombres. Limoges³ par exemple, et sa plaque tournante du commerce de drogue. Toutefois, ce n’est pas la question, ni le sujet.

Nemo, disons-nous, est né, en France, dans un patelin dont le nom n’a pas d’importance. Ce qui compte était qu’il a grandi dans une famille aimante, aisée et qu’on a pu lui éviter de nombreux écueils. Le veinard. Son père, sachez qu’il a une mère aussi mais nous y reviendrons, étant ingénieur pour une grande compagnie de production d’énergie, reçut un jour une proposition, ainsi qu’une grosse promotion. Une excellente nouvelle avec une condition : le déménagement au Japon. Nemo, alors très jeune à cette époque, ne garde aucun souvenir des discussions houleuses entre le père et la mère (celle qui était citée un peu avant). Maudit patriarcat, c’est encore le père le centre de l’histoire. Mais que voulez-vous, il faut bien un élément déclencheur. Ici c’est le père. Dans un autre univers c’est la mère.

Cette histoire semble brouillonne non ? Avec tous ses commentaires. D’accord, nous allons faire un effort⁴.

Bref.

La petite famille des De Sty finit tout de même par suivre le paternel, de l’autre côté du globe : au Japon. Et c’est là que l’histoire va pouvoir commencer.

Il est bon de préciser deux choses concernant les parents. Si le père travaille dans une célèbre société de production et distribution d’énergie, et il y a une cocasse coïncidence entre lui et son métier. Son corps produit en permanence une légère quantité d’électricité, stockée dans ses muscles, et qui se décharge lorsque le corps ne peut pas en contenir davantage. Il faut généralement une journée pour que ça arrive, et une demi-journée s’il fait un effort physique. Il a donc pris l’habitude d’avoir des petites piles rechargeables toujours sur lui dans lesquelles il déverse son électricité pendant la journée. Le soir, il peut donc revenir en moyenne avec trois piles AAA pleinement rechargées, évitant à la famille les difficultés du type : il n’y a plus de pile dans la télécommande. Ce qui est bien commode, convenons-en. Mais dans son métier, ça ne sert pas à grand-chose. L'Univers a juste fait un immense clin d'oeil au Destin. La seconde chose est l’Alter de la mère. Elle attire le métal. Constamment. Rien d’incroyable, mais pour faire simple, elle correspond à un petit pôle magnétique. Si vous passez avec une boussole à côté d’elle, la boussole pointera dans sa direction. Et on peut faire tenir des trombones sur sa peau. Oh, elle colle aussi légèrement au frigo, comme si elle avait la peau collante, mais que pour les réfrigérateurs , et le surface métallique en général. C’est un Alter assez nul et gênant dans la vie, mais que voulez-vous, tout le monde ne peut pas être All Might. De plus, contrairement au paternel, le travail maternelle n'a aucun lien avec son alter, puisqu'elle est chef de cuisine.

Grâce à son jeune âge, environ trois ans, le jeune Nemo n’est pas trop dépaysé par son déménagement et il apprend rapidement à se débrouiller en japonais. Pas suffisamment pour intégrer une école locale, mais l’école française est là pour l’accueillir. Sa vie d’écolier n’a rien d’extraordinaire. Il est bon élève, fait quelques bêtises, se fait un peu gronder, puis féliciter aussi. Mais jusque-là, il n’y avait aucune trace de son Alter.

Alors que les années passent, il n'y a aucune trace d'un Alter chez le petit garçon. On demanda l’avis du médecin, qui estima que Nemo était juste un peu en retard ou alors, son Alter était tellement passif qu’il n’était pas visible. Peut-être un pouvoir semblable à sa mère. Hélas, si Nemo faisait tourner la tête des voisines grâce à ses traits d’enfant adorable, il ne faisait pas tourner les boussoles comme sa mère. De même, il ne libérait pas de petites décharges électriques, malgré ses activités sportives consistant à courir dans tous les sens.

Si c’était le cas, le jeune garçon était bien décidé à ne pas se laisser faire.

Papa, maman, ce n’est pas parce que je n’ai pas d’Alter, que je n’aurai pas d’Alter. Leur dit-il un jour. Il avait environ cinq ans, et si dans sa tête, ses idées étaient claires, leur verbalisation n’était pas encore réussie. Je vais fabriquer mon propre Alter.

Difficile de lui dire qu’on ne fabriquait pas d’Alter comme on fabriquait une voiture, puisque manifestement le garçon avait dans l’idée de se fabriquer un Alter à l’aide de Megablocks, Lego et finalement de divers objets trouvés dans les bois et les poubelles. Et puis, les parents avaient beau essayé, le têtu garçon ne voulait pas comprendre qu'il avait un Alter d'après tous les tests, mais qu'on ne l'avait pas trouvé encore.

On vit alors fleurir dans la chambre de Nemo, des objets sans queue ni tête mais que l’imagination du garçon transformait en super robot lanceur de laser, en arbalète explosive, en avion de poche ou en voiture ultra rapide.

Il continua pendant plusieurs années. Ses constructions se mettant enfin à ressembler à des choses réelles. De petites moteurs furent montés sur des avions branlants et ces derniers s’envolèrent. Des voitures télécommandées de fabrication maison s’élancèrent dans les rues. Ce n’était plus un Alter que se fabriquait Nemo, mais une panoplie de gadgets et d’objets insolites. Certains étaient vaguement utiles : voitures, avions, trains électriques. D’autres parfaitement incongrus : une machine qui gonflait et dégonflait un ballon de baudruche, une autre faisait bouger une mini balançoire.

Tout ceci faisait partie d’un plan. Une stratégie d’apprentissage qui allait aboutir finalement au onzième été de Nemo. Toutes ses petites inventions et expériences avaient servi à lui apprendre à souder, visser, et autres bases de mécaniques. Dans un coin de la chambre, trônait une armure complexe, de tubes, de circuits, de vérin. Elle n’attendait plus qu’une source d’énergie pour se lever. Dans son ventre se tenait un siège où pourrait s’installer Nemo, avec des manettes de contrôle.

Un dimanche après-midi, le garçon traina dans la maison, vérifiant que ses parents ne le surprennent pas, une grosse batterie de voiture. Haletant, il la lâcha dans sa chambre et ferma la porte, la bloquant cette dernière avec sa commode pour être sûr de ne pas être dérangé. Il se méfiait de ses parents qui se mettaient à questionner ses activités, le bienfondé de ses expériences et surtout, leur intérêt. Il les avait entendu dire qu’il devait grandir et accepter son sort. Mais Nemo était bien décidé à accepter son sort, et c’était parce qu’il l’avait déjà accepté qu’il travaillait à montrer qu’on pouvait être normal et tout de même être extraordinaire.

Il enleva le drap qui recouvrait sa monstruosité de métal, de plastique et de rouilles. Un observateur extérieur aurait eu besoin d’un peu de temps pour comprendre et reconnaitre un humanoïde dans ce tas d’élément. Mais il aurait fini par le reconnaitre.

Le garçon tira des câbles de l’étrange carcasse, des câbles d’alimentation. Il vérifia rapidement, le plus sur le plus, le moins sur le moins et… il brancha. Il n’avait pris aucune précaution. Pourquoi faire ? Il n’avait aucune idée que le courant pouvait être dangereux ou passer à travers son corps. Les pinces étaient en fer, sans protection plastique. L’électricité se précipita dans les pinces et si une partie s’engagea dans le câble, une plus grande partie préféra un chemin plus court et rapide : Nemo. Si vous avez lu plus haut dans la fiche ou si vous lisez plus bas, vous savez (ou saurez) que Nemo est un bien meilleur conducteur que tous les fils de cuivres ou d’or de la terre.

Le courant passa d’une main à l’autre en traversant son petit corps sans le faire tressaillir. En revanche, l’ensemble des petits éléments de la pièce s’envolèrent et furent propulsés à l’écart du garçon. L’immonde squelette de métal vibra lentement, à mesure que la batterie se déchargeait dans le corps de Nemo. Ce dernier dut s’arcbouter sans savoir pourquoi pour rester sur place et garder les pinces en position, mais il finit par céder et fut projeter à l’opposer de la pièce, lâchant la batterie. Il se cogna durement la tête et les larmes lui vinrent immédiatement aux yeux.

En se frottant l’arrière du crâne, il découvrit du sang, pour sa plus grande horreur. La tâche était aussi présente sur le mur et pire encore, le robot ne bouchait pas. Il ne savait pas ce qui venait de se passer mais il avait mal et échoué sans comprendre. Ce n’était pas juste.

Bien sûr, jamais le squelette mécanique n’aurait bougé. Il n’aurait pas pu se redresser, ni même marcher. D’abord parce qu’il était trop lourd. Ensuite parce qu’il n’avait aucun équilibre, un centre de gravité décaler sur l’arrière et la gauche, des vérins de taille, de puissance et de calibre différents, sans parler des éléments plus ou moins bien vissés ou soudés. Non, vraiment, ça n’aurait jamais pu fonctionner. Et sur un autre enfant, les conséquences auraient été terribles.

Mais Nemo descendit de sa chambre en larme, pour venir dans une cuisine, située sous sa chambre, complètement dévastée, car les couverts avaient volé dans tous les sens. Pendant que sa mère le soignait, il lui expliqua tout puis il montra à ses parents sa machine. D’abord horrifiés et perplexes, les deux adultes s’interrogèrent : leur fils venait de s’électriser sur une batterie de voiture et n’avait aucune séquelle et dans le même temps, tous les éléments métalliques avaient été secoués comme par une tempête.

Après quelques examens médicaux supplémentaires et une vérification pour le moins douteuse (« Nemo chéri ? Tu veux bien toucher cette clôture électrique s’il te plait ? Ça ne te fait pas mal ? »), on en déduisit que Nemo était insensible et conduisait très bien l’électricité. Et pendant une discussion autour d’un café du père avec ses collègues, on expliqua aussi le phénomène avec les métaux : son fils devait se comporter comme un supraconducteur.

Ainsi Nemo avait un Alter et il en fut soulagé. Il se sentait moins ridicule, d’autant plus que son armure de combat ne voulait vraiment pas fonctionner. Toutefois, il ne voulait pas abandonner son projet pour autant. Il continua à bidouiller des bidules, à truquer des trucs et machiner des machins, parfois utiles, parfois inutiles. Il réparait les grille-pains et les machines à laver, les moteurs de voitures. Une fois, il a même réparé un micro-onde, même s’il avait tendance à tout surcuire immédiatement. Il se voyait déjà en ingénieur, à créer des machines compliquées pour faciliter la vie des gens.
C’est comme ça qu’il en vint, pour rire, à présenter une candidature à Yuei pour la filière assistance. Et c’est aussi comme ça qu’il a été accepté. Et aussi qu’il a eu les cheveux bleus.
[hb]
[1]L’équipe de rédaction se désolidarise de cette remarque, soulignant par la même occasion que l’auteur fait référence à un livre qui vanne énormément Liverpool.
[2]L’équipe de rédaction tient à s’excuse auprès des habitants de Charleroi et leur souhaite bonne chance dans leur vie.
[3]L’équipe de rédaction fait évidement référence à ce célèbre jeu pour tout la famille, Limite-Limite, par cette petite blague d’une cocasserie en tout point drolatique.
[4]L’équipe de rédaction précise qu’elle a sincèrement essayé.