Two vigilants in the night
"Patron, vous allez bien ?", me demanda une voix interrogative.
Pas de réponse.
"Youhou, la terre au patron !", ajouta la même voix, comme pour m'appeler.
"Ça va, je suis pas sourd !", hurlais-je, laissant mon énervement prendre le pas au point de surprendre mon employé qui s'adressait à moi ainsi que quelques clients qui étaient assis au comptoir, ces derniers ne cachant pas leur étonnement face à ma réaction et me demandant même si j'allais bien. "Je suis désolé, c'est juste que ça fait deux semaines depuis que la vieille Kamogawa s'est faite agresser et on a toujours pas retrouvé les responsables, ça me ronge et frustre en même temps.", expliquais-je tout en reprenant la préparation des boissons des clients.
Deux semaines qu'ils continuaient de courir les enfoirés. En réalité, ma frustration venait surtout du fait que je les avais ratés de peu la veille. Sur le temps que je m'accordais chaque soir, j'avais potentiellement retrouvé leur trace et je pensais pouvoir au moins en choper un à part, mais malheureusement, ils avaient réussi à me semer en passant par des coins de la ville que je ne connaissais pas, sans compter sur le fait qu'une descente de flics avait eu lieu dans le quartier des bars et ça m'obligeait à retourner à mon établissement au cas où. Bref, je n'avais pas passé la meilleure soirée et ça se voyait pas mal sur mon visage apparemment, mais tout le monde comprenait mon ressenti, ce qui avait au moins le mérite d'apaiser un peu ma colère.
Mais pour cette fois-ci, j'avais prévu un coup d'avance. Au lieu d'y aller à l'aveugle et d'espérer tomber dessus, j'avais demandé à un de mes trois employés, Toshi, de faire du repérage pour moi et de me prévenir dés qu'il avait la moindre trace de ces types. Au cas où vous vous demanderiez : oui, mes employés sont au courant de mes activités nocturnes, mais on s'est mis d'accord sur une clause qui font qu'ils m'aident quand j'en ai besoin sauf pour ce qui est du combat. Déjà parce qu'aucun d'eux ne sait réellement se battre et aussi parce qu'avec au moins trois personnes qui travaillent, ça me permet de faire tourner le bar et donc de m'éclipser pour m'occuper de mes "problèmes personnels". Bref, une organisation basique mais qui me donnait une certaine liberté de mouvements tant que je ne me faisais pas attraper.
Vingt heures et toujours aucune nouvelle ne m'était parvenue. Je devais ronger mon frein pour ne pas partir tout de suite et ça commençait à devenir compliqué, tellement compliqué que je commençais à mélanger les commandes et commettre des erreurs que je n'aurais jamais fait en temps normal. Une fois mon bordel nettoyé, je faisais un rapide signe avec mon paquet de clopes à la main, signe que j'allais fumer pour essayer de me calmer et me remettre un peu les idées en place. Je m'adossais contre la façade de l'établissement et sortais mon briquet pour allumer la cigarette se trouvant entre mes lèvres avant de tirer un grand coup dessus et de regarder les nuages passés.
"Si seulement les jours pouvaient être calmes et se ressembler…", murmurais-je en expirant la fumée de ma clope et ne faisant pas attention à ce qui se passait autour de moi.
JAWN