Kana

Je ne me souviens pas vraiment de mes parents. Monsieur Matsuda, mon père, était un héros fort et charismatique de Tokyo qui possédait sa propre agence, qu’il tenait avec l’aide de sa partenaire et femme, qui était donc ma mère. Ils sont tous les deux morts lorsque j’avais huit ans, tués par des Vilains. Déjà à l’époque je n’avais rien ressenti, ni tristesse ni culpabilité, ni remord, et pas une seule larme n'avait daigné sortir de mes yeux. Pour les uns c’était intriguant, pour les autres j’avais été traumatisée par cette mort violente et brutale, par cette rupture inattendue de l’enfance vers ce que l’on appelle la maturité. Eh bien moi, ce que j’en dis, c’est que ce fut un véritable cauchemar de devoir consulter un psychologue par-ci, un psychanalyste par-là, de devoir entendre l’hypocrisie des voisins, des uns et des autres...

Mes grands-parents sont très vite venus me chercher à Tokyo et j’ai dû quitter la ville pour la campagne. Je n’étais pas habituée à recevoir de l’amour et de l’attention, avant, lorsque j’étais avec mes parents, ils étaient tellement préoccupés par le travail que je pouvais faire à peu près ce que je voulais sans qu’ils ne le sachent. Très tôt, j’eu l’occasion d’être indépendante et de devoir me débrouiller toute seule. Avec les autres vieux, c’était totalement différent, car ils vérifiaient que j’aille bien à l’école, que je fasse mes devoirs, ils me faisaient à manger et ma grand-mère adorait me prendre dans ses bras.

Et puis mon Alter s’est déclaré pour la première fois alors que je me disputais avec grand-mère et grand-père. Le jour avant, j’avais insulté Sensei, voyez cela comme vous le voulez, l’âge con ou autre, mais je n’étais pas d’accord avec l’adulte et il fallait que je le dise, d’une façon plus ou moins salée. Mes grands-parents furent informés de ma colère et je fus bien entendu grondée, mais je n’étais toujours pas d’accord avec tout ça. J’ai crié et ma grand-mère s’est effondrée en plaçant ses mains sur sa gorge comme si une personne l’étranglait, mon grand-père et moi fûmes tout deux surpris et avons appelé l’ambulance, croyant à une crise cardiaque. Puis nous avons appris qu’un choc avait en effet contribué à cette crise cardiaque, choc qui n’était autre que mon Alter que je ne contrôlais pas. Suite à ça, mon grand-père me désavoua, il ne voulait plus me garder avec lui, il me trouvait trop dangereuse...

Avant de rejoindre un nouveau foyer, je fus prise en charge par un amis Héros de mon père qui eut vent de ce qu’il s’était passé. Il désirait m’aider à contrôler mon Alter pour que des accidents pareils ne se reproduisent plus jamais. J’ai passé quelques mois avec lui, c’était amusant de jongler entre école et entraînement. Lorsqu’il me jugea apte, je fus insérée dans un nouveau foyer, une famille d’accueil. Moi je voulais rester et habiter avec cet ami paternel, quant à lui, ne voulait pas me garder pour des raisons qui me sont obscures.

Cette nouvelle famille, ce couple homosexuel était heureux d’avoir trouvé une jeune fille afin de pouvoir l’aimer et l’éduquer, mais je pense qu’il était déjà trop tard pour moi. Au lieu d’avoir un enfant, ils trouvèrent le reliquat d’un enfant, une chose peu expressive et déjà suffisamment forte que pour tuer le couple qui n’avait d’autre choix que de se plier à ses exigences. Pourtant, tout ceci n’étaient que des mots, jamais je n’aurai pu leur faire de mal en réalité. J’étais insouciante et naïve, je ne pensais pas que quiconque pouvait vraiment me croire capable de faire du mal façon intentionnelle. Je les menaient et eux se pliaient, un jeu en sommes, mais eux ne voyaient pas les choses de cette façon et me prenaient au sérieux.

Direction nouveau foyer, direction nouvelle famille, car le couple homo m’avait abandonnée. Cette fois-ci je fus suivie par un psychologue que je devais consulter toutes les semaines, deux jours par semaine. Cette famille était pleine aux as et avait déjà trois enfants, l’intégration ne fut pas facile pour ne pas dire impossible. Mes tuteurs étaient bienveillants et aimables, ils étaient souriants et gentils et aussi incroyable que cela puisse paraître, je m’étais attachée à eux. Mais leurs trois gosses...je les aurai bien tous étripés ! Les disputes étaient nombreuses et étonnement, les parents ne reprenaient jamais pour moi, mais je pouvais totalement comprendre qu’ils préféraient leurs enfants biologiques, quoi de plus normal que d’aimer la chair de sa chair ?

Peu à peu, je me suis résignée à trouver ma place, à trouver l’amitié et l’amour, je me suis désintéressée de tout, me contentant de vivre au jour le jour, d'attendre et de voir ce qu'il adviendrait. En plus, il ne m'était plus possible de cohabiter avec qui que ce soit, car je ne le supportais plus. Alors lorsque je fus en âge de passer devant un juge et de m'entretenir toute seule, je me suis séparée de cette dernière fausse famille.

Ce n'était pas très difficile de convaincre l'homme, je n'ai même pas du mentir ou jouer la comédie, vu que réellement, les familles d’accueilles me détruisaient dans le sens où je n'arrivais plus à vivre sur le dos des autres, chez des inconnus. Il me fallait à tout prix mon indépendance, pour mon bien-être.

Une Académie de Super-Héros, voilà ce qu’il me fallait afin de me développer. Avec l’aide d'une pension du gouvernement jusqu'à ma majorité, le logement m’était offert et mes besoins couverts. Il ne me restait plus qu’une chose à faire : Intégrer Yuei, c'est à dire passer l'examen d'entrée de cette prestigieuse académie.

Mon choix ne se tournait pas vers Yuei par hasard, cette académie était la plus prestigieuse de toute et donc naturellement un grand tremplin vers mon ascension personnelle. Et puis de toute façon, mon école m’avait recommandée pour l’examen d’entrée de Yuei, ventant mon doux et courageux caractère, mon amabilité, mais aussi mon passé litigieux dont des parents Héros morts en combattant et puis mon Alter, un puissant pouvoir polyvalent qui serait très utile à la filière héroïque.

Bientôt, je recevais une lettre de Yuei m’invitant à participer à l’examen d’entrée à une date bien précise. Avais-je peur ? Etais-je nerveuse ? Pas le moins du monde, le vide, le néant, rien d’autre ne pouvait caractériser ce que je ressentais. Je n’envisageais même pas la défaite, moi, aussi belle et forte, intelligente et charismatique, je ne pouvais pas perdre.

Le jour de l’Examen, un homme bizarre qui criait, un héros assez connu je crois, nous présenta le contrôle. Il y avait plusieurs arènes qui ressemblaient à des villes, dans lesquelles il nous fallait détruire des robots Vilains plus ou moins puissants, ceux-ci rapportaient des points en fonction d’une valeur donnée. Le but ? Etre premier de façon héroïque. Durant cette épreuve, je souhaitais rester discrète, me tenir à l’écart et ne certainement pas me placer devant les autres. Qu’ils se chamaillent pour entrer en premier dans l’arène, la fin de la file d’attente m’allait très bien personnellement.

Vêtue de la tenue, j’entrais dans la ville un peu à la bourre par rapport à ceux qui fonçaient tête baissée en voulant exploser le plus de robots possible. J’observais le terrain et j’analysais. Alors comme ça, j’étais une Héroïne et je défendais la ville contre des Vilains ? Je n’ai jamais été très portée sur tous ceci, mais je pouvais à peu près affirmer que ce qu’il se passait devant moi n’était guère un comportement Héroïque.

Au lieu de chasser le Vilain, je me suis mise à chasser les plus faibles comme une prédatrice. Les méchants s’attaquent toujours à ceux sans défense, n’est-ce pas ? J’observais les autres participants, j’attendais patiemment qu'ils tombent, et je venais les sauver des robots en utilisant mon Alter. Le plus simple était d’utiliser ma Télékinésie pour détruire les ennemis affaiblis en les soulevant hauts, très hauts, avant de les faire tomber de plusieurs étages. Je pouvais aussi utiliser des roches ou des morceaux de bâtiments détruits, à peu près tout pouvait me servir d’armes.

Un examen tranquille et facile... Je n’étais pas dernière, je n’étais pas première dans les points, mais j’avais aidé mon prochain et sauvé ceux qui avaient besoin d’aide. Avais-je été héroïque ? Je crois. Puis je suis partie comme je suis venue, comme un fantôme.

Quelques temps plus tard je recevais une lettre...d’admission. Ce ne fut bien entendu pas une surprise pour une personne telle que moi.