Let me save you - Hide [TERMINE]

Est-ce une réalité ou une hallucination commune à tout le monde ? Le fait de revoir en boucle ce moment précis où le monde s'est écroulé pour toi. Ce moment où tu as tout gâché sans même t'en rendre compte, sans même pouvoir y faire quoi ce soit. Et les autres te le rappellent, sûrement pour te consoler, te dire que tu n'y pouvais rien. C'est terrifiant de savoir que tu ne pouvais rien faire et que tu ne peux toujours rien faire. Nanako me regarde toujours avec ce petit sourire, comme-ci je ne l'avais pas condamné. Je me force à lui sourire aussi mais elle le voit. Elle le lit dans mes yeux que j'aimerais m'effondrer en pleurs, la prendre dans mes bras et m'excuser... Mais ça ne sert à rien. On toque à la porte, je sais déjà ce que l'infirmier va me dire alors qu'il m'annonce que les visites sont terminées. D'un revers de manche, je sèche la seule larme que je n'ai pas pu contenir, roulant le long de ma joue. Je pose mes lèvres sur le front de ma petite sœur Nanako, et je sors de cette foutue chambre. J'ai un train à prendre de toute manière.

A peine la porte de la chambre d'hôpital passée que je me vois enfant. Comme si j'avais été téléporté. Je me vois très petit, 3 ans je pense. Et je me vois courant dans le jardin de la maison familiale, située dans un petit bout de terre à Okinawa. Ah Okinawa, ma ville natale. Un peu éloignée de toute l'effervescence de la ville mais toute de même touché par ses découvertes. Derrière moi,  Nanako tient à peine sur ses jambes mais essaye tout de même de me pourchasser. Le petit jardin de la maison me paraissait si grand à l'époque, tellement grand que je n'entendais pas les cris et parfois les pleurs qui venaient de la maison familiale. Maman et papa se disputaient souvent mais jamais rien de bien grave, juste un couple qui s'aime. Et puis quand on fut un poil plus âgé, Papa eut la bonne idée de nous construire une cabane dans la jardin. Alors on s'y cachait, moi et Nanako, et on imaginait notre Batcave à nous.  Maman et Papa n'étaient pas du genre très progressistes, et même si les Alters n'étaient plus inconnus de tous, ils n'avaient jamais eu à faire à des possesseurs. Au point de ne pas le voir même chez leur propre fille, Nanako, alors même qu'il était impossible d'avoir plus brillante mécanicienne. A 5 ans, elle construisait déjà des petits mécanismes en bois, plus le temps passait et plus elle s'améliorait. Personnellement je me voyais déjà en Batman, sauvant le monde dans la nuit. Nanako se voyait déjà en une sorte de Lucious Fox. Oui, Batcave, c'était vraiment le terme le plus approprié.

Mais un jour c'est arrivé. La Nova est arrivée.

Le cri d'un bébé me fait sortir de mes pensées. J'ai la tête posée contre la vitrine du train, je me rend compte d'à quel point mes souvenirs sont vivaces et puissants. Mais celui-là est le pire. Le plus flou peut être mais le plus violent. Impossible de ne pas me revoir, littéralement faire exploser une partie du jardin. Je revois ma mère, mon père et Nanako arrivés en courant. Je peux presque sentir les larmes qui coulent sur mes joues alors que je me demande si je vais mourir. Mourir, tout aurait été tellement plus simples si j'avais juste pu mourir. Mais à part ça, il y eut les tests médicaux conventionnels d'abord. Puisque j'avais déjà 10 ans, mes parents ne pensèrent pas qu'ils puissent s'agir de mon Alter. Ces tests furent évidemment un échec cuisant mais très vite la question des Alters prit la relève. J'aurais aimé qu'on m'explique comment le contrôler, au lieu de parler de "Matière énergétique inconnu" ou de "potentielle énergie solaire détournée", j'aurais aimé qu'on s'intéresse à moi qu'on ne me laisse pas seul. Nanako ne m'avait pas laissé tout seul, elle aurait dû.

Tiens, les cris du bébé sont de plus en plus forts. Peut être que lui aussi ressent ce que je ressens. Peut être que lui aussi voit ce que je vois. Peut être qu'il me voit, tremblant comme une feuille alors que de l'énergie émanait de mon corps sans que je sache ce qui m'arrive. Alors que je sentais cette force qui pressait sur mon cœur. Je me rend compte que je tiens mon propre cœur en me remémorant ses souvenirs, et je hurle à plein poumons quand le souvenir de cette énergie se libérant malgré moi, le souvenir de mon corps qui semblait se scinder en deux me revient en tête. Je me souviens m'être réveillé, une incommensurable douleur dans mes deux bras. Je ne les sentais plus. Je ne les avais plus. Maman et Papa ont bien essayés de m'emmener à l'hôpital mais ce fut sans succès.

Mes souvenirs paisibles d'enfance semblent se changer en cauchemars. Les petites disputes se changèrent en grosses, presque toute concernant ce qu'il fallait faire pour mon cas. J'étais déprimé par ce qu'il m'arrivait et l'idée que ça m'arrive à nouveau. Le pire c'était Nanako, ce regard qu'elle avait quand elle me voyait, j'avais l'impression qu'elle se sentait coupable. Elle a commencée à s'enfermer dans notre cabane et à se renseigner, à travailler, à essayer. Jusqu'à parvenir à mes prothèses. Cette image m'arrache toujours un sourire. Quand elle me les a montré, je n'en revenais pas. Elle m'a dit qu'ils étaient encore instables, que je devais pas les garder trop longtemps, le temps qu'elle les améliore. Et quand elle ajouta qu'elle essayait de trouver un moyen de me sauver de mon Alter, je ne l'avais pas écouter, je trouvais juste les prothèses trop cool. Je voulais les essayer. Et elle me les fit essayer, alors même qu'elle n'était pas pour l'idée. Je m'en foutais je voulais mes nouveaux jouets.

Ils étaient presque parfaits mais moi je n'étais pas prêt pour avoir ceci. Alors évidemment quand viens le moment de décharger la Nova de mon Alter... Il fallut que je ... Et ce regard de terreur dans ses yeux quand je la touchais.  Elle est à l'hôpital depuis ce moment là, dés fois dans un état totalement stable, très encourageant et dés fois frôlant littéralement la mort. Et moi je continuais d'améliorer ses prothèses, en venant la voir pour lui montrer mon humble travail et pour qu'elle me conseille ou me dise quoi faire.
Mais surtout je venais la voir. Et je le fais toujours. Il faut que je comprenne mieux mon Alter et son énergie dans l'espoir de la sauver. Et je ne peux pas le faire seul, j'ai besoin de gens comme moi. Alors je me dirige vers cette académie, vers cette foutue épreuve d'admission. Je ne me laisserais pas faire, je ne peux pas me laisser faire.