"Tournoi God Hand"
Je marche le long d’un couloir sombre, accompagné par un gars apparemment chargé de me guider vers les vestiaires en attendant le début du match. Des néons éclairent d’une lumière tamisée, assez pour pouvoir mettre un pied devant l’autre mais pas pour percevoir clairement le visage de mon accompagnateur :
| « C’est ici, attendez qu’on vous ouvre à l’autre porte du vestiaire. »
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Arrivé au bout du couloir, il ouvre une porte grinçante et frottant le sol sur son battement, avant d’appuyer sur l’interrupteur. Un flash lumineux en surgit alors du plafond, mais plus rien.
| « Putain d’merde. Je savais que ce coin était tranquille, mais pas qu’la lumière sauterait encore. »
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Il sort sa torche et éclaire un banc à l’intérieur, proche de la porte d’entrée :
| « J’espère que vous avez pas peur du noir, je vais devoir vous laisser. Je reviendrai si c’est pas encore ce foutu disjoncteur qui a sauté. »
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Bon… ça commence bien.
Habituellement j’aurais répondu qu’avec mon Alter les pannes de courant c’est pas ce qui m’effraie le plus, mais bon un certain vieux capricieux insiste pour que je l’utilise et en parle le moins souvent possible. Décidément…
La porte claque et me plonge dans le noir le plus complet, à part une toute petite lumière orangée sortant du bas d’une porte visiblement située sur le mur d’en face. Ce doit être cette fameuse « autre porte du vestiaire » j’imagine, je me demande bien à quoi il ressemble d’ailleurs.
Et après quelques instants de questionnement dans le noir la lumière revient, mais pour rester cette fois. Dévoilant une pièce vide de vie, avec des casiers muraux, des bancs passant devant chacun, une petite table adjacente à l’un d’eux et de la boisson. Une bouteille de whisky en l’occurrence, à côté d’un petit verre à shot.
Sûrement est-ce là pour donner du courage, suivant les raisons des participants cela peut se comprendre : entre obtenir le pactole pour s’acheter plein de filles de joie et tout simplement assouvir ses désirs guerriers, un fossé peut vite se créer et le public n’est pas venu pleurer les sentimentaux. C’est vaincre ou être vaincu, il n’y a pas d’entre-deux. Un vrai paradis pour certains, ou une fosse à barbares pour d’autres. Personnellement, je ne me sens pas d’y mourir – et heureusement le règlement ne le permet pas – mais avec mon expérience de fille pauvre de la banlieue on développe assez facilement l’envie de tuer, par survie. Ne serait-ce que quand des gars, qui n’ont plus rien à perdre, prennent les filles dans un coin de rue plus vite que n’interviennent les héros.
Je me réinstalle alors à côté de cette petite table et me sers un shot avant de me l’enfiler d’une traite dans la seconde. Punaise, si j’avais su qu’un jour je me retrouverais dans l’équivalent morbide d’un lieu dont on ne doit jamais parler j’en tomberais de l’armoire… Devrais-je m’en servir un autre ?
Sans crier garde, le seul et unique néon du vestiaire grésille, pétille, au rythme des piétinements fracassants, incessants des spectateurs qui se trouvent de l’autre côté de cette fameuse porte face à moi. Tous chauffés et remontés à l’idée de voir du spectacle, du beau spectacle, deux combattants qui ne se connaissent pas et vont pourtant partager un moment mémorable dans le sport ou le sérieux le plus implacable. Et en effet, s’il y a bien quelque chose qui ne m’arrange pas, c’est bien le type d’adversaire auquel je vais avoir affaire.
Hamlin, le rat mercenaire.
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| « Ce mec est un taré entouré de tarés. Peu importe le contrat, si dedans des gens de tout âge doivent mourir, ils finiront dans une cuve d’acide, sur le toit d’une voiture, ou encore dans le casier d’un proviseur d’école suivant le tordu qui le lui a refilé. »
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Généralement, c’est le genre de personne avec qui j’ai le plus de difficultés. Ces gens qui ont soit perdu toute notion d’humanité, soit complètement dérivé sur le darwinisme le plus absolu – quand les deux ne se croisent pas – pensent ainsi pour se protéger du monde terrible dans lequel ils ont grandi. Et malheureusement, ce n’est justement pas ce genre que l’on va pouvoir convaincre dans le cadre d’un tournoi de combat complètement libre, où sang et bestialité font loi. Pour eux, les mots ne font plus sens mais les actes oui. Du moins, la plupart du temps.
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| « Si tu veux un conseil l’apprentie, ne lui laisse jamais aucune issue. Au contraire, laisses-en lui autant que tu le peux. »
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Et comme d’habitude, mon maître me donne toujours des indices aussi cryptiques.
Je remplis à nouveau mon verre, l’exaspération pouvant se lire dans le soupir que j’y joins au même moment. J’hésite même quelques secondes à prendre cette deuxième gorgée mais me ravise quand j’entends tambouriner du pied à l’unisson. Et il faut à peine quelques secondes avant que par la même occasion pète le peu d’accroche qui restait au néon, tanguant désormais de droite à gauche par son câble d’alimentation et luisant par à-coups en face de mon masque réfléchissant légèrement la lumière. Je reste impassible, le regard plongé dans cette obscure pièce que le tube finit par ne plus éclairer après quelques tressaillements lugubres comme pour se battre et garder le peu de présence qui lui reste, avant de disparaître dans le néant.
La porte face à moi s’ouvre alors, c’est le moment. Mon verre demeurant rempli sur la table, je me lève et approche cette nouvelle source de lumière qui ne sera pas celle de mon salut. À la place, un combat pour la voie du Guide.
Tandis que j’approche cette lumière, une voix vient perturber le chaos déjà présent parmi la foule que j’y perçois :
| « Premier combattant à entrer, Le Guide ! »
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Les cris bestiaux et appels au combat se changent alors en clameur lorsque je franchis le pas de la porte. La salle n’est pas tellement grande, mais pour la somme promise c’est tout de même impressionnant. À vue d’œil je dirais même qu’ils sont au moins une centaine présents ce soir, tous collés-serrés qu’ils sont c’est un exploit qu’une telle quantité de gens tienne autour de l’arène. En parlant d’arène, l’octogone semble au contraire copieusement large avec son carré au centre et la cage sans toiture encore suspendue en l’air. Ma démarche quant à elle reste sobre, réajustant ces nouveaux gantelets spécialement conçus pour le tournoi, jusqu’au moment où j’aperçois mon maître m’accueillant près du ring. Nos regards se croisent un instant sans échanger mot et je retire ma veste à capuchon pour la lui tendre :
| « Tiens le vieux, je ne pourrai pas m’en servir contre lui. »
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Ce à quoi il répond en opinant du chef, avec cependant un léger grognement – certainement désapprobateur de la formule magique absente mais il faut avouer que le stress ne m’aide pas – pour l’installer sur son avant-bras. Mon identité est désormais protégée par mon masque seul, dont un petit espace circulaire à l’arrière habituellement caché par le capuchon laisse sortir ma longue chevelure attachée en bandoulière aussi pour l’occasion. Une fois placée sur l’un des côtés du carré, la voix retentit de nouveau tandis qu’au même moment mon adversaire apparaît sous les projecteurs, de l’autre côté de la pièce :
| « Combattant suivant, Hamlin le mercenaire ! »
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Nouvelle clameur, on ne sait pas pour qui le public crie mais l’un de nous deux semble davantage attirer l’attention que l’autre, le mercenaire. Entre la musique rap underground et l’arrivée en peignoir, ce n’est plus un hommage envers les sportifs américains mais un jeu de rôle à ce stade. J’en rirais presque sous le masque s’il n’était pas aussi sérieusement impliqué, mais il faut l’admettre, il sait soigner sa présentation. Et même une fois découvert, ses pectoraux, ses cicatrices et son short léger pour seul habit, c’est plus que suffisant pour séduire les plus habitués au MMA et autres sports de combat peu réglementés, les femmes incluses. Je n’irais pas jusqu’à le trouver mignon avec ses balafres mais c’est un sacré morceau. Il est d’ailleurs intéressant comme il semble exotique et proche à la fois, serait-il du continent ? Je lui poserai la question quand ce sera terminé, je ne voudrais pas l’offusquer avec une question complètement sortie du contexte.
Et pendant que ce dernier approche après avoir laissé tomber son peignoir, nos yeux fixant et jaugeant l’autre après une salutation cordiale mutuelle, la foule bruyante s’écarte en une ligne droite et laisse passer quatre hommes pas très commodes mais taillés comme des armoires. Et un plus chétif au milieu, masqué, dont les mains luisent d’une aura jaune. À ce que j’ai compris c’est celui qui a permis ce tournoi, Healing Touch. Tout le monde se met d’ailleurs à scander son nom à l’unisson, comme si lui aussi allait se battre avec nous, à la différence qu’il va jouer un rôle autre mais tout aussi important en apposant sa main sur ma nuque puis celle de mon adversaire. J’en sens une forte décharge électrique dans l’instant mais la douleur cesse dans la seconde, le temps qu’il rejoigne sa garde rapprochée qui s’était légèrement dispersée sur la frontière séparant le ring des spectateurs en l’attendant. L’un d’entre eux a même des avant-bras gatling approvisionnés par un énorme sac à dos de munitions, j’espère qu’il n’aura pas à faire feu.
L’homme du tournoi reparti avec ses hommes, le public resserre les rangs et se remet à appeler au combat. Je me mets en garde, les deux mains ouvertes, les bras levés vers Hamlin, et la jambe gauche légèrement devant l’autre :
| « J’imagine que tu es prêt, avec une telle entrée difficile d’être plus explicite. »
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Il se met alors en garde à son tour en guise de réponse, pas très causant mais ça me va. Et son sérieux témoigne sa hargne de vaincre, je sens que ce combat va être intéressant.
La cage tombe et sans se faire attendre Hamlin fonce droit sur moi, approchant sûrement au plus près pour ne pas montrer comment il compte me frapper. Je riposte en me protégeant à l’aide de mes bras par un coup de tête dans les chicots pour stopper net sa course.
Cependant mon coup part dans le vide et je me retrouve étranglée sans comprendre comment il a pu s’effacer aussi vite, mais je devine à la pression des bras que je me trouve à sa gauche et tente un coup de poing au foie en apercevant sa jambe se armer, me libérant de peu de sa prise et frôlant donc son attaque.
Il souffle un instant sous la surprise mais ne s’arrête pas pour autant, reprenant confiance en donnant plusieurs coups légers successifs qui à chaque fois me rapprochent de l’erreur. Bordel s’il m’atteint ne serait-ce qu’une fois, c’est foutu, je ne peux le laisser me toucher. La tension naît, je finis dos au grillage, quand ce que m’a dit mon maître revient en tête :
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| « … ne lui laisse jamais aucune issue. Au contraire, laisses-en lui autant que tu le peux. »
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Un éclair traverse mon regard et je souris sous le masque. Laisser plusieurs issues hein ?
Je semble me dédoubler, sans entièrement me détacher, ne me permettant plus de discriminer ce qui est projeté de mon vrai corps par la vue. C’est toujours aussi perturbant que d’habitude, mais c’est pas ma première fois. J’ose même pas imaginer le résultat sur lui, car même s’il peut essayer de se faire une représentation de ma posture en fonction des zones que je protège, je ne lui laisse pas le temps de s’y concentrer.
Et comme je m’y attendais d’un assassin professionnel, ses attaques sont précises et visent directement vers les organes vitaux. Une telle précision certes efficace en règle générale, du moins tant qu’on voit réellement sa cible. C’est suffisant pour me laisser réfléchir et reprendre du terrain pour l’obliger à reculer, mais pas assez pour l’atteindre. Même en utilisant ma doublure pour sembler frapper à deux endroits en même temps, il parvient à se dégager sans laisser d’ouverture. Nous sommes à armes égales.
Je le sens alors s’énerver et mettre de plus en plus d’énergie dans ses coups, brisant par moments ma garde mais n’arrivant pas à enclencher par la suite. Je sens mes bras faiblir de fatigue mais son regard se nourrit de haine, c’est à mon tour de réagir !
J’esquive un poing haut en passant dessous, faisant disparaître ma doublure, et j’assène un uppercut qu’il parvient à bloquer avec son autre bras. Mais son déséquilibre réduit grandement sa garde et mes bottes appuyant ma posture permettent de passer à travers, atteignant sa mâchoire. Et c’est maintenant que j’ai enfin l’occasion d’apercevoir l’Alter d’Hamlin en action.
Il se décompose et une volée de rats traversent l’arène par mon poing. Et avec plus de rongeurs qu’il n’y a de public sur le terrain, une bonne partie de l’assistance panique devant la projection que nous venons tous les deux de réaliser. Certains de ces mammifères passent même de l’autre côté de la cage sous les cris de dégoût avant d’essayer de rejoindre l’arène, quand ils ne se font pas découper en deux sur le grillage.
Avec cette énergie de propulsion complètement ignorée, je me retrouve en l’air, presque au niveau du plafond, avec une nuée de rats au sol recouvrant tout le terrain de brun et de leurs petits cris. Je ne peux pas atterrir simplement, sinon ils vont me submerger et je ne pourrai pas faire grand-chose… Et si…
C’est complètement désespéré, mais ça semble fonctionner. Une partie d’entre eux à proximité semble totalement effrayée et tente de fuir devant la demi-douzaine de chats qui vient d’apparaître parmi les spectateurs, un chaos qui semble séparer en deux les rongeurs effrayés désordonnés et ceux regroupés autour d’un seul, un poil plus gros et que je distingue à peine grâce aux lentilles et la hauteur. Attendant mon atterrissage pour m’affronter à plus de cent contre une. Mes chats semblent jouer avec eux en ratant exprès leurs coups, mais ça ne risque pas de leurrer longtemps. Quant à moi j’atterris sur la cage en équilibre très précaire :
| « Si tu comptes te battre sous cette forme, tu vas en décevoir plus d’un. Et je ne parle pas de la réputation que tu vas en retirer, c’est pas très courageux de ta part, » dis-je en tournant légèrement la tête derrière moi pour crier « n’est-ce pas public ?! »
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En réponse, le cri de chauvins du beau jeu et des citadins apparemment très friands de mes félins dans cette situation, que je salue en descendant du perchoir. Une manière de défier la nuée qui se rassemble plus loin pendant que les gentils chatons repartent et se noient dans la foule avant de disparaître.
Bien, maintenant que j’ai restreint l’utilisation de son Alter, place au deuxième round. J’ai pu reprendre des forces mais je pense que les choses sérieuses vont bientôt commencer.
Aussitôt pensé, aussitôt fait. À peine l’essaim réorganisé il comble l’espace nous séparant à une vitesse fulgurante, si bien que même avec mes bottes je n’arrive à l’esquiver, malheureusement dos à la grille.
Trop tard. Je me prends un… coup de genou au visage ? Et… qu’est-ce que… qu’est-ce que je viens de voir une demi-seconde avant ?!
Et alors que j’essaie de comprendre ce qu’il se passe, ce que je voulais absolument éviter se produit. Je subis ses assauts tous les côtés et avec une douleur intense à chaque coup. Parfois en flottant littéralement à quelques centimètres du sol sous les attaques ascendantes sans que je puisse capter quoique ce soit. Ça résonne, je tombe le genou à terre, j’ai mal partout, mais je tiens. Je l’entends respirer ou baragouiner quelque chose mais les acouphènes sont encore plus forts, je le vois devant moi mais même avec les lentilles augmentant le champ de vision je ne perçois que ses jambes, je me sens lourde mais rien d’autre sous la douleur qui me stérilise.
Je pensais que ma stratégie serait suffisante, maintenant son Alter restreint. Mais ce n’est pas le cas.
« Haaaamliin ! Haaaamliin ! Haaaamliin ! Haaaamliin ! … »
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Il doit penser que je suis tombée dans les vapes, maintenant que je bouge plus.
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| « Alors ? On va dire quoi ? T’es énervée ? Tu sais que je suis pas seule, moi. »
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J'entends un craquement de phalanges accompagné d’un rire rauque :
| « Henry ? Occupe-toi d’elle s’il te plaît. »
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| « … Inspire, expire. Inspire, expire… »
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Mais ce n’est pas le cas.
D’une main je saisis fermement sa paire qui pendouille depuis trop longtemps tandis que de l’autre je profite des bottes pour refaire un uppercut surprise.
Il se change alors à nouveau à peine la saisie faite, j’en retiens mon poing et cette fois mon surplus de vitesse engrangé par mes bottes ne sert pas à me propulser en l’air.
Cette fois c’est pour préparer la hauteur nécessaire au coup de pied circulaire descendant, atteignant dans une bouillie de chair et de sang la majorité de la nuée n’ayant pas encore pu se disperser.
À peine l’attaque portée, j’enchaîne avec un push kick dans le tas difforme qui tente de reprendre apparence humaine.
C’est bloqué et l’ensemble brun est de nouveau humanoïde, mais détail, mes bottes peuvent provoquer des décharges. Sa garde se brise alors et son expression de surprise apparaît clair comme le jour. Et maintenant le voile sur ma vision levé rien ne m’empêche de lire cette surprise mêlée à la rage de vaincre dans ses yeux. Je ne m’arrête pas et profite de sa récente transformation pour attraper sa tête à la main d’un bond, vomissant de la bile sous l’effort que je m’impose.
Il tente de répliquer en mettant son bras sur la trajectoire mais il se retrouve submergé et le bras déboîté qu’il crie de douleur.
Nous volons à environ un mètre du sol et traversons le ring d’un bout à l’autre. Je redirige mes jambes et change de main qu’il mord comme il peut pour lâcher prise et rater notre entrée en contact avec ce qui semble être la grille.
À peine la cage sous mes pieds je nous propulse droit vers ce qu’aussi je perçois comme le gris du ring. Si vite que lorsque sa tête entre en contact avec le sol un très gros bruit sourd résonne dans toute l’arène et ses jambes flottent un instant en l’air, moi aussi manquant de prendre les dégâts en roulant lamentablement avec une légère traînée sanguine sur mon passage et mon épaule aussi déboîtée sur le coup.
J’inspire.
Je me retrouve au centre du carré, en étoile et la tête tournée vers Hamlin mais encore consciente. Contrairement à ce dernier qui ne bouge plus d’un pouce avec son regard vide et ses jambes appuyées au grillage. Je pense que j’ai gagné.
J’expire.
Je tente de me relever d’une main, difficilement, et crache une nouvelle flaque de sang avant d’arriver à quatre pattes puis basculer en arrière, me reposant presque entièrement sur mes exo-bottes pour me maintenir en équilibre. Comme un pantin qu’on ne tient que par les jambes et agite dans tous les sens.
Je n’arrive même pas à lever mes bras ballants par la fatigue et la blessure, mais à ma respiration forte et saccadée mêlée à un rire faible et bête, on devine que j’en bave pour exprimer mon exultation.
| « Et notre vainqueur est… Le Guide ! »
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Le public exprime alors sa plus grande joie, sans que je puisse comprendre quoique ce soit de ce qu’ils prononcent sur l’instant. Alors qu’ils ignorent complètement Hamlin qui finit par glisser sur le grillage en cachant enfin ses attributs, allongé sur le ventre. La cage s’élève à nouveau pour laisser passer le vieux et les quelques intéressés que je zappe complètement sans trop m’en rendre compte, mon maître se chargeant de discuter avec eux.
Je manque de m’évanouir sur place, toute mouillée de sueur que je suis, mais dans un dernier effort je ramasse le short du mercenaire pour le déposer sur lui de ma main valide. Certes il a le droit de se mettre à nu comme ça, ce n’est pas interdit par les règles, mais il faudrait quand même pas abuser de son inconscience pour l’humilier en public. Et puis je pense qu’une discussion avec lui quand il ira mieux sera plus faisable, s’il ne nourrit pas plus de haine que nécessaire à mon égard. Après tout, Le Guide est bien ici pour agrandir son cercle, pas se faire des ennemis.
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| « Au fait, il semblerait que nos contacts à son sujet le pensent mort, et quasiment tous. Je pense qu’il travaille pour du gros poisson si tu vois ce que je veux dire, l’apprentie. Il est rare d’annoncer la mort d’un simple second couteau pour seulement le protéger, la plupart du temps on s’en débarrasse. Soit le parrain lui en devait une, soit c’est actuellement l’inverse. Et je pense que nous en avons tous les deux une petite idée au vu de sa participation. »
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Des larmes coulent sur mes joues. Je viens peut être de réduire à néant ses chances de sortir rapidement de sa condition terrible, mais je l’ai juré à mon maître : Le Guide ne le laissera pas tomber. Il ne les laissera pas tomber.
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| « Même si notre lumière éclaire le monde entier, il y en aura toujours qui utiliseront un filtre pour en changer la couleur. Notre travail n’est donc pas d’éclairer ce monde de notre lumière, mais d’allumer la lanterne de ceux qui ne veulent plus rester dans l’obscurité, qui sont prêts à éclairer à leur tour avec leur propre teinte, afin de préserver la plus grande diversité possible. Ainsi, grâce à nos efforts et le panel de couleurs qui en naîtra, nous permettrons à l’humanité de choisir de lui-même sa propre teinte, d’être son propre guide. »
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