Blaguarre [Feat Ayo]

Jiyūhito était dans la merde.

Ayo avait compris ses intentions beaucoup plus rapidement que ce qu'il avait envisagé. Il perdit l'avantage en quelques secondes et fut propulsé à une distance gênante pour ses techniques, une fois de plus. Son professeur avait décidée de faire grimper la tension : il était maintenant coincé dans une enceinte de roche, quelque chose qu'il ne pouvait pas traverser en quelques secondes seulement, et l'adulte avait l'avantage du terrain. Retour à la position de départ donc : le jeune homme était de nouveau coincé contre une batterie d'artillerie mobile, et il allait falloir ramener cette dernière au corps à corps pour espérer faire quoi que ce soit.

La libyenne forma un disque de terre des plus impressionnant et commença à surfer à l'intérieur de l'arène. Elle voulait le pilonner et profiter d'une mobilité accrue pour lui infliger des mauvais coups. C'était puissant, et intelligent. Restait que la jeune femme n'avait pas compris une donnée cruciale : Jusqu'à maintenant Jiyūhito se croyait dans un entrainement, pas dans un combat de rue.

Cette donnée venait de changer là, à l'instant.

"Mieux que ça hein..."

Le jeune aristocrate essuya le filet de sang qui lui coulait doucement du nez et se mit à sprinter, littéralement, en direction de la jeune femme. Elle était plus rapide que lui mais ça ne comptait absolument pas : elle aussi l'avait sous estimée.

Elle aurait dût se débarrasser de la colonie d’insecte lorsqu'elle en avait eu l'occasion.

Jiyūhito siffla, tout doucement. Une petite abeille se détacha de la masse qui grouillait sur le visage de son instructrice pour se diriger, sans un bruit vers son oreille. Elle attendit une petite seconde et se propulsa littéralement dans le conduit auditif externe de sa cible qui, bien évidemment, ne s'attendait certainement pas à quelque chose d'aussi violent. Son tympan se retrouva à trembler fort, trop fort. Conséquence directe : l'oreille interne de la jeune femme s'effondra instantanément. Saha-Terra n'avait pas de quoi lutter contre les dommages internes, c'était du moins ce que Jiyūhito assumait. Dans le cas inverse il était cuit.

Reste que le jeune prince semblait avoir pris un bout du puzzle dans le bon sens. Il ne lui fallut pas longtemps pour observer Ayo chuter de son skateboard en roche, sponsor des tribus nomades depuis moins 3247 avant Jésus Christ.

Tout ce qui lui restait à faire désormais c'était combler la distance et décocher à la libyenne le coup de pied de sa putain de vie.

Avec cette technique, je pensais pouvoir distancer les abeilles… Ou au moins les bouger assez pour récupérer la vision un instant ! Je me trompais. Ses bestioles découlent de son alter, elles sont entraînées et coordonnées, ce ne sont pas des insectes normaux, ils peuvent me suivre sans le moindre soucis… Quand au miel, je ne peux pas l'enlever facilement, il me faudrait du temps pour pouvoir m'en débarrasser correctement… Mais ai-je vraiment le choix ? Si je continue avec ce handicap, je ne pourrais dominer le combat bien longtemps.

Alors que je file à toute vitesse sur les bords du ring, je lève une main recouverte d'une protection pour éviter les piqûres et commence à frotter pour enlever la mixture collante de mon visage. Mais à peine ai-je commencé que je sens quelque chose entrer dans mon oreille. Dans mon oreille ?!
J'ai rarement ressenti quelque chose d'aussi désagréable, ce bourdonnement qui traverse mon cerveau et mon corps, le faisant vibrer de toute part… C'est atroce.

Jiyuhito a bien joué son coup, si il y a bien quelque chose auquel je ne m'attendais pas de sa part, c'était bien une technique aussi intelligente. Mes jambes vacillent subitement, mes sens se perturbent et je bascule. Il a visé l'oreille interne pour me déséquilibrer, c'est malin.
Déséquilibrée, je tombe de mon surf et roule sur quelques mètres, totalement perdue… Sans la vue et avec mon oreille interne en vrac, je ne peux absolument plus me repérer.

Dans un dernier effort, je me stoppe, les deux mains au sol, essayant de reprendre mes marques. Le bourdonnement me tiraille et je serre les poings pour essayer de l'ignorer, comment faire ? Je passe rapidement mon poing sur mon visage pour essayer et j'ai juste le temps d'entrouvrir ma paupière pour voir le pied de mon élève foncer droit vers mon visage.

Pas le temps de réagir.
Un choc énorme me fracasse la mâchoire, décollant mes mains du sol et me faisant basculer en arrière. Un mélange de sang, de terre, d’abeilles et de miel vole, ma tête tourne et le choc manque de me sonner. Mais j’en ai vu des pires, à partir du moment où j’avais pu encaisser le tir d’un tank, je ne pouvais pas me retrouver K.O après un simple coup direct, si ? L’adrénaline était trop présente pour que je puisse flancher.
Jiyuhito, saisissant sa chance, fond sur sa proie et tente d’en finir d’un direct du droit bien placé, mais maintenant, je peux le voir.

Dans un sursaut d’énergie, je me redresse et lève mon bras gauche, coinçant son poing dans une prise rocheuse toute particulière. Cette fois-ci ce ne sont pas mes mains mais mes bras qui se recouvrent d’une couche terreuse incassable, depuis le début il cherche à se battre au corps à corps alors je vais lui donner satisfaction. Une mâchoire minérale sort de mes protection, s’écrasant sur le bras du garçon pour le coincer encore plus à mon contact, il ne peux plus s'échapper.
Nos yeux se croisent et je retrouve encore une fois sa détermination dans son regard sérieux, Jiyuhito a vraiment beaucoup d’énergie à revendre.

Et, sans lui laisser le temps d’observer mon visage abîmé par ses attaques, je l’attire vers moi et enfonce mon coude renforcé dans son estomac avant de relever mon poing pour le frapper au visage. Ses abeilles ont beau matraquer mes yeux et mon visage, il ne pourra plus rien faire dans cette position.

Le coude de la libyenne s'enfonça violemment dans l'estomac de l'étudiant qui recracha immédiatement son liquide gastrique sur le sol. Il aurait voulu réagir mais n'en eut pas le temps : le poing de la jeune femme s'enfonça dans son visage encore, et encore, et encore. Cet entrainement prenait un tour de plus en plus physique. Jiyūhito n'avait même pas eu le temps de savourer l'efficacité de son incroyable coup de pied qu'il se retrouvait déjà en échec et mat. La victoire avait été de courte durée. Il avait désormais l'impression d'être une plaque de fer coincée entre une enclume et un marteau, et son crâne le lui faisait clairement sentir. C'était une impression bien particulière : le jeune homme, qui commençait désormais à saigner du front, laissa échapper un rictus de plaisir. Son professeur pouvait le tuer là, maintenant, tout de suite. Voilà qui l'excitait au plus au point.  

L'esprit de Jiyūhito se délectait en silence. Il ne ressentait pas souvent quelque chose d'aussi primaire dans sa morne vie de palais.

"C'est douloureux ça..."

Cette réplique, que le jeune aristocrate venait de chuchoter sans vraiment y penser, fut le début de la contre attaque. Il concentra toute sa force dans un seul mouvement et, après un grognement annonciateur, se dégagea de la prise de son opposante avec une telle force que la barrière minérale qu'elle avait dressée entre lui et la liberté ne suffit pas à le retenir. Le poing du jeune homme se dégagea dans un craquement douloureux et la roche qui l'entourait vola en éclat. Il le dégagea aussi vite que possible et la jeune femme, qui coinçait toujours son deuxième bras dans l'estomac du jeune homme, n'eut pas le temps d'intercepter ce qui lui tombait sur le nez. Le front de son étudiant, qui n'avait plus grand chose à perdre, se fracassa sur son visage, mélangeant au miel et à la sueur une couche de sang de plus en plus épaisse. Les abeilles, qui avaient vues le coup venir à trois kilomètres, se dispersèrent avec une vitesse inhumaine avant de relocaliser leur attention sur une nouvelle zone sensible : les pieds de Saha-Terra. Si elles ne pouvaient pas l'aveugler définitivement elles s'attaqueraient à son équilibre. Avec des pieds en sang on ne se relevait plus, ou du moins peu !

L'inconscient de Jiyūhito, de son coté, s'était fait une raison. Il ne gagnerait pas ce combat, et il le savait, mais il n'allait pas abandonner pour si peu. La défaite, même lorsqu'elle était certaine, ne faisait pas partie de son vocabulaire.

Ce n'était pas une instructrice arabe qui allait pousser Jiyūhito Kyōkan-no-miya dans les choux.

"C'est douloureux ça..."

Chuchote Jiyuhito avant de se dégager de ma prise terrestre dans un effort aussi surprenant qu'impressionant. La terre explose, où va-t-il donc puiser toutes ces forces ? Même moi, après un échange de coups aussi intense, je ressentais l'épuisement m'envahir…
D'ailleurs, son action me prend tellement au dépourvu que je ne vois pas venir le coup de boule énervé qui me frappe en plein front, me faisant tituber en arrière.

"Hmph !"

Ma tête tourne sous la violence du choc et je manque de tomber une nouvelle fois. Je porte ma main à mon visage et sens la chaleur du sang qui s'échappe maintenant de mon arcade sourcilière, il n'y est pas allé de main morte.
Je lève les yeux et découvre un regard plus que avide de se battre et rempli d'une détermination brûlante… Seule l'adrénaline commande encore à aux muscles de mon élève.

Mais je n'ai pas le temps de réfléchir, ses abeilles reviennent déjà à la charge, se faufilant dans mes chaussure pour agresser mes pieds. Je serre les dents, la sensation est extrêmement désagréable, la douleur est intense et Jiyuhito en profite pour s'élancer en avant, bien décidé à en finir… Tout comme moi.

Je recule mes appuis à l'instant où son direct du droit me touche en pleine figure et, alors qu'il s'apprête à enchaîner d'un uppercut décisif sur un adversaire déstabilisé, je pousse sur mon pied droit en ignorant l'horrible douleur de dizaines d'abeilles déchiquetant mon talon.
Ma feinte fonctionne bien, j'esquive son coup en le prenant à contrepied et le fauche efficacement avec ma jambe et mon élève, déséquilibré, tombe en avant.

Il ne m'en faut pas plus. Alors qu'il chute, je me retourne en un éclair, et crée une zone de terre molle afin qu'il s'écrase avec douceur. A peine touche-t-il le sol que je suis déjà sur lui, coinçant son bras droit dans son dos tandis que de la terre vient enserrer son autre bras et sa taille pour l'emprisonner contre le sol.
C'est terminé.

Je soupire fort, reprenant mon souffle petit à petit  tout en fermant mon oeil gauche, recouvert par le sang qui coule de ma blessure.

"On va s'arrêter là."

Jiyuhito est à bout de force, si le match avait continué ainsi, il aurait pu se blesser. Il est de mon devoir de prof de stopper l'entraînement ici.

Jiyuhito n'avait rien vu venir. Son Sensei était vraiment une femme exceptionnelle.

Il l'avait fait saigner, assez fort en plus, mais elle s'en moquait. L'attaque de ses abeilles n'avait même pas réussi à la faire flancher. Elle avait disposée de lui comme un humain disposait d'une mouche : un simple mouvement de jambe combiné à son Alter plus qu’impressionnant avait suffit pour mettre le jeune aristocrate dans une situation dont il ne pouvait pas se relever. Son bras était coincé sous la roche, et son adrénaline n'était plus assez vive pour lui permettre un second coup de génie. Le combat était terminé.

Jiyuhito avait perdu.

"On va s'arrêter là."

Le jeune homme poussa un profond soupir tandis que ses insectes rentraient au foyer. Il ouvrit la bouche pour laisser sa colonie pénétrer plus facilement, inspira doucement, et laissa les abeilles regagner leur zone de confort par la gorge, le nez, les oreilles et d'autres endroits dont les médias refusaient de parler. Il se sentait complétement vidé. Il avait voulu un entrainement, mais il avait obtenu quelque chose de bien plus intéressant : un tabassage en règle.

Le prince impérial essaya de se relever, échoua, et se rendit compte qu'une bonne partie de son corps était toujours coincé sous le sol. Il tira un bon coup, se contorsionna aussi fort que possible, et comprit que son corps ne l'aiderait pas sur ce coup. C'était terminé. Ayo lui avait pompé toute son énergie. Il n'avait plus rien !

"Mon adrénaline..."

L'étudiant de Shiketsu, qui n'avait pas pour habitude de se laisser aller, décida d'essayer une nouvelle fois au grand désespoir de ses abdominaux.

"Aaaaaah..."

Rien à faire. Si ça professeure ne l'aidait pas il allait rester comme ça un petit moment.

"Je ne pensais pas que j'en étais aussi dépendant beuah... Vous frappez fort Sensei."

Le jeune homme, couvert d'une sueur de plus en plus gluante, essaya de sourire mais son menton lui faisait mal. Il était ridicule, coincé comme ça dans le sol, mais il était bien plus fatigué que conscient donc, comme à son habitude, il ne ressentait pas vraiment cette chose si importante dans la psyché humaine que Freud nommait "la honte". Si il avait pût lécher sa sueur, il l'aurait certainement fait.  

"Comment est-ce que j'ai cassé l'autre enclave de roche déjà ?"

Lorsque ses abeilles quittent enfin ma peau aussi abîmée qu'un champ de bataille, je soupire et me laisse tomber sur le côté pour m'asseoir en soufflant. Ce combat avait été éprouvant, mes muscles sont brûlants et je suis couverte de terre… Comme a la fin de chaque combat en fait.

Je passe ma main sur mon visage, essuyant le sang qui coule abondamment de ma blessure… Rien de grave heureusement.
Quand à Jiyuhito, il est en train de grommeler et essaye encore de s'échapper de ma prison de terre...

"Mon adrénaline…"

Murmure-t-il en forçant une nouvelle fois sur ses liens. Il ne pouvait plus bouger, il était totalement épuisé. Un sourire amusé en coin, je le regardais se débattre inutilement, il me rappelle décidément beaucoup mes années d'apprentissage en Lybie.

"Je ne pensais pas que j'en étais aussi dépendant beuah... Vous frappez fort Sensei."

Il se trompait, l'adrénaline est certes une hormone indispensable pour combattre, mais s'y abandonner totalement brouille le jugement et ne permet en aucun cas d'avoir plus de chances de gagner.

"L'adrénaline peut te permettre de faire des choses surprenantes Jiyuhiyo. Mais elle t'empêche également de te rendre compte de ton état."

L'élève coincé marmonne quelque chose mais n'arrive décidément pas à se libérer. Je m'approche alors doucement de lui et pose ma main sur la terre qui l'entoure.

"C'est une question de maîtrise, tu ne dois pas laisser le combat te contrôler, tu dois contrôler le combat."

Sa prison rocheuse se dissout lentement, laissant finalement ses membres libres et je lui souris, à la fois épuisée et amusée :

"Héhé, ça fait un peu mystique dis comme ça mais je pense que c'est ce qui t'as fait défaut pendant l'entraînement. En tant que héros, tu dois apprendre à capturer les vilains et comme tu le sais, c'est bien plus compliqué que de simplement leur taper dessus…"

Je passe mes bras autour de mes jambe et pose ma tête sur mes genoux en soupirant, j'ai été aussi fougueuse que lui à une époque, vouloir vaincre à tout prix, être inarrêtable pour venger mes proches… C'était facile.

"En combat c'est pareil. La facilité ne vient pas à bout d'un adversaire puissant. Comprends ça et tu progresseras."

Ça fait beaucoup pour un cours particulier mais je pense sincèrement que lui avoir tapé dessus lui aura au moins appris deux trois trucs.

"Noté."

Jiyuhito, qui n'avait aucune envie de produire une réponse cinglante, se contenta d'un simple mot d'usage pour exprimer son opinion. Il avait beaucoup à apprendre de ses professeurs, si on exceptait leur pseudo-mysticisme un peu bizarre sur "le sens du coup de poing", et n'était clairement pas en position de cracher dans la soupe. Ayo se tapait la goule contre les autres depuis bien plus longtemps que lui, elle savait donc de quoi elle parlait. C'était une grenouille, lui n'était qu'un misérable têtard. Un têtard de combat, mais un têtard tout de même !

Comme disait son grand frère, il n'allait pas apprendre à un vieux singe à faire la grimace.  

"Z'avez raison Sensei. Il ne faut pas vendre la peau de l'ours avant de l'avoir tué. Si je me repose sur mes acquis je prend le risque de devenir..."

Le jeune aristocrate, qui avait retrouvé une base d'énergie plutôt correcte, se releva lentement et poussa un profond soupir. Il ne comprendrait jamais l'attachement que possédait l'administration de cette école vis à vis de la tenue. Pourquoi se coller une laine sur la peau alors que la plupart des vêtements poussait vers l'impraticabilité ? Pour les conventions sociales, d'accord, mais dans ce cas il suffisait de se coller un pantalon et puis terminé ! Elle était loin l'époque ou le Japonais moyen était incapable de supporter la vue d'un téton, non ?

L'adolescent termina sa phrase après avoir repris son souffle. Sa famille dirigeait tout de même une nation excessivement prude lorsque ça l'arrangeait.

"...quelque chose de pas très sexe."

Sur cette phrase il se dirigea vers ces affaires posées non loin et, après avoir fouillé quelques secondes dans son sac à dos, se versa la moitié de sa bouteille d'eau d'un litre sur la tête. Quelque chose lui disait que ses cheveux, véritable amalgame de sueur, de terre et de sang séché, n'étaient pas la chose la plus agréable à regarder pour le moment.

"Vive l'eau fraiche."

"...quelque chose de pas très sexe."

Les propos de Jiyuhito me laissent un instant perplexe. L'héritier de la famille royale n'est clairement pas du genre à se soucier des conventions sociales. Bien qu'il semble avoir pris mes conseils en compte, j'ai l'impression que le jeune prince n'avait pas fait ce combat seulement pour s'entraîner, il avait pris un réel plaisir à se battre contre moi, un plaisir presque malsain.

Je me relève à mon tour, posant les yeux sur mon élève torse nu se déversant avec joie sa bouteille d'eau sur le crâne. Lorsque je me suis entraînée à m'en briser les os, je faisais ça pour devenir forte, pour ne plus avoir à me lamenter sur ma faiblesse... Lui s'était battu pour se défouler et s'amuser... en vérité, je ne sais que penser de cet entraînement.

J'abaisse ma main et les murs de l’arène s'enfoncent dans le sol, remettant le terrain de sport dans son état d'origine... Ou presque.

"Vive l'eau fraîche."

Une fois les murs abaissés, je m'approche de l'étudiant héroïque et frappe son crâne trempé d'un coup sec :

"Surveille ton langage."

Prince héritier du Japon ou pas, Jiyuhito est un élève de Shiketsu et, comme tout élève de Shiketsu, il représente le lycée. Ce n'est pas parce que j'ai accepté ce petit entrainement privé que j'allais le laisser esquiver les règles.

"Il ne te reste que quelques heures pour te laver et te changer. Quand à moi, je ne tolérerais pas que tu te pavane dans cet état au beau milieu de l’établissement tout ce temps."

Je croise mes bras devant moi et prend une mine un minimum sévère :

"Et la prochaine fois que je te vois sans ta casquette, tu ne t'en sortiras pas aussi bien."

Jiyuhito Kyokan-No-Miya n'est pas un élève ordinaire mais comme tous les autres, il est déterminé et souhaite devenir plus fort. Cependant, cette touche malsaine que j'ai ressenti durant notre combat me laisse sceptique. Pourquoi a-t-il réellement intégré Shiketsu ? Veut-il vraiment devenir un héros ? Ce sont des questions auxquelles je devrais avoir la réponse en tant que prof.
Je pensais me retrouver un peu en lui mais là... Je suis perdue.
Je finis par soupirer, chassant mes questions de mon crâne avant d'ajouter d'une voix inquisitrice :

"Maintenant file, j'ai un terrain de sport à remettre en état."

Ce n'est pas le moment de faire la conseillère d'orientation ou de l'ennuyer avec des questions gênantes, le combat d'aujourd'hui suffira. Je vais le garder à l’œil lors des prochains entraînements car je pense que le prince me réserve encore bien des surprises.

"Maintenant file, j'ai un terrain de sport à remettre en état."

"Yes, filer, mon activité préféré."

Numéro 30, qui observait les conséquences du combat en silence depuis quelques secondes, posa une main ferme sur l'épaule de son VIP. Jiyuhito, intrigué, releva la tête en direction de son garde du corps qui prit la parole d'une voix ferme. Il n'avait vraiment pas l'air de rigoler.

"Je me dois de m'opposer. Sa Majesté régnante m'a ordonnée de vous empêcher de filer. Aucune exception."

"Euh, Numéro 30, il a dit ça, OK, mais je n'ai pas de bobines de laine sur moi là, donc je vais pas commencer à filer maintenant beuah."

Le clone de sécurité le plus professionel de histoire du Japon se stoppa quelques secondes avant de se mettre à réfléchir. Ses petits yeux tournaient en rond derrière ses lunettes. Il fallait se rendre à l'évidence : c'était vrai ! Jiyuhito ne pouvait pas filer de la laine dans ses conditions, sa mission n'était donc pas à risque ! Le garde du corps impérial baissa son regard froid vers le jeune aristocrate et annonça son approbation d'un air enjoué.

Il n'était vraiment pas très intelligent.

"Effectivement, je ne remarque aucun fil. Je me dois cependant de vous le rappeler, juste par principe."

"Sweet. Bonne après midi sensei hein, et merci pour tout!"

Jiyuhito fit un petit mouvement de casquette en direction de la libyenne et se dirigea vers le bâtiment, avec une idée en tête : se pavaner sous la douche ! Il allait en avoir besoins, son empereur de père n'était pas du genre à apprécier les odeurs de sueur en pleine cérémonie. Restait que tout le monde n'était pas son père.... Le jeune aristocrate aimait bien Ayo ! Elle était puissante, c'était un bon prof, elle se montrait vachement agréable à regarder et, en plus, elle avait acceptée de le sortir de son ennui avec un combat de chauffe. Voilà qui était vachement gentil ! Et vachement pratique ! Avec un rythme pareil, il ne pouvait que monter en niveau !

Jiyuhito était loin de se considérer comme un Pokémon mais parfois, dans la vie, il fallait aller de l'avant !