Surbookée

Musique

Une mauvaise sensation commençait à me prendre l’estomac. Des gargouillis, pour le moment léger, mais dont le moindre décibel serait socialement inacceptable. La faim, aussi cruelle que délicieuse maîtresse, me prenait à la gorge faute d’attention. Combien d’heure avais-je passée sans manger ? Eh bien… Peut-être une dizaine ? Ou une douzaine ? Je ne devais pas être très loin dans les faits. J’avais juste dû prendre un petit déjeuner léger après une longue nuit blanche, avant de partir assister à une quinzaine de rendez-vous.

Je sais, je sais. J’exagérais sans doute sur le nombre, mais cela m’avait paru être une éternité. Entre les assurances, une rencontre parent-professeur pour Noki et un sacré paquet de corvées… J’aurais aimé dire que j’avais passé ma nuit sur des animes, des jeux vidéos ou d’autres occupations beaucoup plus légères, mais non. Entre insomnie, nettoyer les carreaux à quatre heures du matin, vérifier la nourriture et les dates de péremption, les économies et me rappeler en catastrophe que je devais aller voir la banque, je… Le sommeil avait été absent, et les marques noires sous mes yeux confirmaient un peu de mon état.

Mais je ne pouvais pas y faire grand-chose de plus. Je devais bondir partout, être sur tous les fronts. Faire à manger pour tous sans savoir si Sue comptait rester. Combien de fois avais-je cuisiné pour deux et qu’elle partait sans même jeter un regard, juste pour aller voir des amies ? Raaah, cela avait le don de me frustrer !

Ce n’était cependant pas le moment de l’exprimer. La soirée était tombée, mon sac à main avait quelques courses de compléments que je n’avais pas pu faire dans la supérette à côté, faute de stock, et je me retrouvais dans le métro, attendant un futur arrêt pour descendre sans même y réfléchir.

Mais assise sur l’un des sièges, la tête basculée en arrière contre la vitre… Le « Tac tac, Tac tac » des rails avait le don de réussir à me captiver. Certes, il y avait bien un duo un peu plus loin qui parlait assez bruyamment, sans compter les rires à des blagues sans nuls doutes de mauvais goût, mais mon attention avait été perdue. Seul le bruit du wagon m’intéressait maintenant.

Tac tac, Tac tac.

Evidemment, il y avait des endroits plus confortables pour rêvasser. La vitre était comme animée par un marteau-piqueur, et les vibrations bien fréquentes étaient même un peu dérangeantes. Mais même si elles étaient désagréables, elles avaient aussi ce côté berçante. Ce côté monotone, si régulier et prévisible. Je pouvais fermer les yeux, et prédire quand les autres viendraient.

Tac tac, Tac tac.

J’essayais de dissimuler un bâillement, montant mon poignet à mes lèvres, avant de tourner un peu ma nuque, suivit de mes épaules. Quelques étirements certes, mais qui me servirent également à me replacer, essayer d’avoir un peu plus de confort. De toute façon, mon arrêt devait être un peu loin, j’avais le temps... Je pouvais juste fermer les yeux quelques minutes.

Tac tac, Tac tac.

Juste… Quelques minutes…

Musique

Mes pensées étaient parfois bizarres. Parfois uniquement. Là, j’oscillais entre ma chambre, mon lycée, l’hôpital, avec des visages, des sons et tout un paquet de chose. Je revoyais des scènes, je revoyais des moments. Des vies aussi. Mais toujours ce même passage qui revenait. Ce coup de téléphone, précédant la terrible annonce. A partir de ce moment là, tout était tombé de mal en pire. Une chute sans fond, une chute sans fin. Et j’en étais presque à me demander si ce n’était pas un nouveau cauchemar…

Il y avait des voix, des personnes qui me parlaient, mais je ne faisais pas attention. Qu’est-ce que c’était de toute façon, ma conscience non ? Mange cinq fruits et légumes par jour, couche-toi tôt, fait du sport régulièrement, garde ton calme, ne loupe pas ta station de métro… Oui, je savais, mais… J’avais encore du temps, et un simple léger mouvement d’oreille me débarrassait de ce qui semblait être comme un moucheron à mes yeux clos.

Enfin, jusque ce qu’il y eu un contact. Quelqu’un qui poussait un peu mon épaule. Bien loin du doux remue ménage si régulier des transports en commun, c’était comme rouler sur un ralentisseur. Sur une ligne de métro. Oui, un peu moins habituel, mais… Hum. Peut-être devrais-je ouvrir les yeux ? Juste pour vérifier ?

Difficilement, je sortis de ma torpeur. La lumière artificielle des ampoules du métro m’aveuglaient un peu après ce qui avait été une courte sieste, mais après m’être frottée les yeux un court instant, je commençais à prendre un peu plus conscience de ce qu’il se passait. Une personne, un adolescent comme moi, était en train d’essayer de me réveiller, ce qu’il fit avec succès visiblement, vu que je commençais déjà à étirer mes épaules.

‘’Bonjour ?’’ Lui fis-je, un peu confuse par rapport à ce réveil imprévu. Certes, dormir dans le métro n’était pas vraiment la chose la plus saine et sure, mais… Bon, surement voulait-il s’assurer que tout allait bien avant que les problèmes ne me tombent dessus. Mais c’était loin d’être la première fois que je prenais cette ligne. Au bout d’un moment, je la connaissais. Et puis, un rapide coup d’œil sur le dessus de la porte me montrait que j’avais encore du temps devant moi. Plus beaucoup certes, j’avais fermé mes paupières plus longtemps que prévu, mais cela allait, tout était contrôlé.

Enfin, tout… Pas vraiment.

Car il y avait d’autres voix. Tout du moins, une qui se rapprochait derrière, de pas lourds, voir même un peu maladroits. Pas besoin d’avoir une superbe audition pour entendre ça, même au réveil je réussissais, donc bon. Mais le discours tenu ne fut pas si agréable à entendre :

‘’Hey la lapine ! Tu nous ferais pas un peu ton show ?’’

Mon show ? Je devais être encore un peu trop gazée pour bien comprendre ce qu’il mentionnait par là. Etait-ce de la musique ? Pourtant, je n’avais pas mon instrument sous la main, même si je rêvais d’un jour, faire une telle démonstration dans les transports en commun. Un duel d’improvisation, un récital de nouvelles notes juste pour le plaisir et l’instant. Mais avec ma tête un peu groguie par ce court sommeil, je ne voyais pas où il venait en venir.

‘’T’aime bien les carottes non ? Ça te dirait de gouter la mienne ?’’

Oh. Ce genre de stupidités. Super… J’avais l’habitude pourtant. Il fallait croire que mon apparence évéillait quelques fétiches chelous. J’avais suffisamment entendu parler des bunny-girls pour savoir où il voulait en venir, et j’avais juste envie de l’ignorer. Mais… J’avais comme l’impression que comme les lourds de son genre, il n’allait pas être très compréhensif.

‘’Vous savez que vous-‘’ Je m’interrompis, remarquant quelque chose de particulièrement désagréable. Plus que ses mots en fait, ou son apparence assez bizarre, couverte d’yeux à peu près partout. Non, le pire dans tout ça, c’était l’odeur. J’en avais la nausée, et je me plaquais une main sur le nez et la bouche par réflexe. Uh, déjà que l’odeur du métro n’était pas tous les jours ragoutante, mais lui multipliait les saveurs là…

‘’Pouah… Hey, les douches ça existe hein ! Même si avez peur de vous piquer les yeux avec !’’

Alors. Oui, il le méritait. Entre sa grossièreté et les nuisances qu’il provoquait, c’était la moindre des choses. Mais vu le type de personnage, il n’allait pas vraiment apprécier, et je sentais que ce transport allait être plus pénible et mouvementé que prévu. Ai-je déjà dit que j’avais un réveil maussade ?

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Il fallait que je l’admette tout de suite. J’avais fait une bêtise. Une grande et stupide connerie qui risquait d’être préjudiciable. D’ordinaire, les critiques, les injures et compagnie, je passais outre. Je ne comptais plus le nombre de fois où, au collège, on m’avait tiré les oreilles, que cela soit par curiosité ou méchanceté. Mais là, j’avais été prise de court. La fatigue, le réveil, cumulé avec la surprise de l’odeur de cette personne… Il y avait beaucoup de choses qui faisaient que j’avais perdu mon sang-froid. Et malheureusement, cela n’allait pas être en s’arrangeant…

Certes, il y avait bien ce garçon, qui semblait avoir bien compris que ce type avait des idées derrière la tête avant même que ces paroles ne commencent. Etait-ce pour cela qu’il avait tenté de me réveiller ? Probablement… Dormir dans le métro n’était pas vraiment l’assurance de passer un voyage tranquille, surtout pour moi en fait. Vu le nombre d’agression de jeunes femmes et de lycéennes dans les transports en commun, je devais vraiment être patraque pour réussir à dormir sur mes deux oreilles dans un tel endroit.

‘’Euh je…’’ Fis-je, mal à l’aise face à la manière dont les choses commençaient à tourner. Je pouvais toujours chercher à m’excuser, mais j’avais le pressentiment surement vrai qu’ils voudraient quelque chose en échange de mes excuses. Et vu son comportement vaseux, je craignais d’imaginer ce qu’il pourrait m’imposer. Donc autant dire que c’était une mauvaise idée. Puis mince quoi ! Il puait vraiment !

Alors qu’il s’approchait, je commençais à avoir un mouvement de recul, essayant de me faire le plus petite possible (un comble vu ma taille), pendant que le garçon se faisait médiateur, voir protecteur. Au moins j’avais de la chance qu’il y ait une personne qui n’allait pas autoriser ce genre d’actes. Seule, je… Eh bien, je ne voulais pas non plus l’imaginer. De quoi avoir des cauchemar surement.

Mais avec la manière dont il avançait… et surtout le fait que, derrière lui, deux autres hommes assez menaçant d’apparence se rapprochaient avec de sales idées, vu leurs petits gestes qui présageaient d’une bagarre… Je ne savais pas trop où je devais me mettre. Loin, c’était sûr, mais où ? Le wagon était en plein mouvement, donc il allait falloir attendre la prochaine station. Quitte à devoir terminer cette marche à pied. Ce serait plus long, mais c’était un mal que j’étais prête à supporter.

Cependant… Je crains que je n’allais pas avoir vraiment le choix. Le garçon, qui s’interposait pour me défendre, n’eu pas le temps de proposer l’idée qu’il vint à se faire attraper au niveau du torse, puis projeter vers les deux autres, qui commencèrent à le frapper ! La situation dégénérait bon sang ! Et qu’est-ce que je pouvais faire ? Je n’étais pas une héroïne, juste une simple lycéenne, qui voyait son bon samaritain payer le prix de ses bonnes actions !

‘’Non le frappez pas !’’

Après tout, c’était moi qu’ils voulaient. Je n’aimais pas ça, ni même la notion de sacrifice et compagnie, mais je n’allais pas laisser quelqu’un prendre des coups pour moi ! S’il fallait que quelqu’un récolte le prix de ses mots, c’était moi… Enfin, en réalité, c’était eux, mais… Cela allait être un peu difficile... D’autant qu’avant même que je ne puisse essayer de lui venir en aide, d’une manière ou d’une autre, le rustre aux milles yeux m’agrippa par le bras, avant de me plaquer contre le mur avec violence.

‘’Alors ma lapine ? On tente de jouer l’héroïne pour son beau chevalier blanc ?’’

Tss… Il était écoeurant. Dans l’odeur, les manières… Et dans ses propos. Il m’avait fait mal au dos en me poussant, d’autant qu’il maintenait mes poignets fermement serrés. Il était fort, beaucoup plus fort que moi… Et qu’est-ce que je pouvais faire ? Le laisser faire pendant que ses potes tabassaient ce lycéen, en espérant qu’hypothétiquement, quelqu’un nous vienne en aide ? Trop risqué… Surtout que je sentais la main de ce gros dégueullasse commencer à aller vers mon haut.

‘’T’inquiète pas, on va bien s’amuser mes potes et moi !’’

Respire Kaza, respire… Il va falloir que tu fasses différemment. Oh ça oui… C’est le genre que tu peux pas simplement laisser faire. Tu peux pas te laisser peloter par un type comme ça et juste rien dire ni réagir. C’était trop grave !

Donc il fallait réagir, mais… Comment ? Pas comme si je m’étais déjà vraiment battue ou autre, mais… Humpf… Riku m’avait toujours donné un conseil : Si un garçon s’approchait trop près, il fallait lui donner le plus fort coup de pied entre les jambes. Je n’étais pas vraiment partisante de cette méthode, un peu violente, mais… Je n’étais pas sûre que d’autres fonctionnerait. Grande-sœur, j’espère que tu ne m’as pas menti pour me taquiner, car j’en ai réellement besoin…

Prenant un peu d’élan, je relevais brutalement mon genou en plein dans l’entrejambe de ce pervers, qui eu un souffle beaucoup plus court et un gasp de douleur, lui faisant lâcher prise et le stupéfiant l’espace de quelques secondes. Ça devait être douloureux certes, mais… Mais comme disait Riku, ce n’était que la première étape, car il fallait profiter de cette occasion ! Je le repoussais alors, avant de l’accompagner d’un nouveau coup de pied à l’estomac, me libérant de son étreinte. Mais il restait ses deux potes, dont un qui laissait apparaître une fumée sombre. Je ne savais pas ce que c’était, mais tout ce que je pouvais dire, c’était que je n’aimais pas du tout ça.

Les jambes, pensent à tes jambes. Comment tes jambes peuvent-elles t’aider ?! Mère disait toujours que nos jambes étaient parmi nos meilleurs atouts, en plus de nos sens, à mes sœurs et à moi. Et je n’étais pas sûre que d’entendre pourrait être utile. Ni même de sentir… Enfin, si l’on excluait l’odeur de transpiration de ces types et celle de la canette d’alcool au sol.

Minute, une canette ? Elle était vide certes, mais cela pourrait faire diversion ! Je l’attrapais, avant de la lancer en direction de la tête de celui qui fulminait, espérant le distraire. Manque de chance, mon tir était trop hasardeux, et toucha son collègue. Mais peut-être que j’allais avoir leur attention maintenant.

‘’Hey, c’est moi que vous voulez, pas lui !’’

C’était le plan en tout cas, mais cela comportait un problème : S’ils s’en prenaient à moi, j’étais sensée faire quoi ? Bonne question… Je crois que dans ce genre de situation, j’avais encore une vision à trop courts termes. Et maintenant, je devais assumer. Assumer le fait que, peut-être pour la première fois de ma vie, je devais me battre.

Des bruits de combat me parvinrent du côté de la demoiselle. Si son agresseur semblait avoir pris du terrain dans un premier temps, les grognements qu’il poussa ensuite me laissaient à penser qu’elle savait se défendre, c’était déjà ça! Malgré tout ce grabuge, j’avais toujours mon sac avec moi. D’un mouvement vif je me saisis de la gourde qu’il contenait et aspergea les mains de l’homme qui se jetait sur moi, accompagné de son nuage de fumée noir. Déviant la trajectoire de son bras de mon avant-bras droit, je parvins à plaquer ses doigts humides contre le dossier du siège et à l’y coller dans un nuage de vapeur. La soudure n’était pas très solide mais me donna une ouverture pour lui asséner un coup de talon dans la mâchoire.

La vibration de sa mandibule se détachant traversa tout mon corps, me donnant envie de vomir quasiment instantanément. Alors que le bougre s’écroulait sur moi, inconscient, son pote était apparut soudainement, un putain de couteau à la main!

- Mais qu’est-ce que tu me veux!!?

J’étais pas vraiment en position de me défendre. Mr Smoke pesait le poids d’un âne mort et collé comme il était au dossier, je n’arrivais pas à le faire basculer au sol. Le mec au couteau ne prit pas la peine de me répondre, il avait pas trop l’air de savoir ce qu’il voulait faut dire. Son bras dessinait des gestes aléatoires dans l’air, balançant la lame à tout va sans pour autant essayer de vraiment m’atteindre. L’adrénaline me faisait trembler, d’une main peu habile j’atteignais la soudure que je venais de réaliser et la défi au moment même où un objet vint heurter le crâne de mon nouvel adversaire. Le gars eut un mouvement de repli et ramena ses mains vers lui ce qui me permit de lui sauter dessus sans risquer de me faire poignarder au passage.

Il ne restait plus grand-chose dans ma gourde, juste de quoi asperger le bras au bout duquel se trouvait l’arme blanche. Le contact avec le liquide froid sembla le surprendre tout autant que l’objet qui avait frappé sa tête et il dansa du coq-à-l’âne pendant une demi-seconde. Juste de quoi souder le bout de la manche de sa veste à son épaule. Le salaud émit un gémissement dépité avant de laisser tomber son canif. Plus qu’un!!

…

Ou pas. Le gars fétide était déjà étalé par terre. Les larmes qui s’échappaient de ses mille yeux offraient un spectacle pathétique. A mon envie de vomir s’ajoutait maintenant une envie de pleurer. Pauvre gars, il avait dû en voir des vertes et des pas mûres pour en arriver là. Évitant de me questionner quant à son enfance, j’enjambais les sièges pour me jeter en direction de la demoiselle. Les speakers du wagon crachaient le nom de la prochaine station en plusieurs langues, j’avais beau ne pas reconnaître le nom, je savais que c’était notre arrêt. De ma main sèche je me saisis du poignet de la jeune fille.

- Tout va bien? On va descendre ici et prendre le prochain train.

Dans ce genre de situation, la première chose à faire est de mettre les victimes en sécurité… Je crois… Aussi j'entrepris de la tirer doucement vers l’avant du wagon. Deux des gars étaient encore conscients et Mr Canette se relevait déjà. Il s’était défait de son entrave en relevant sa manche depuis son poignet jusqu’à son épaule.

- Vous allez pas vous en tirer comme ça!!

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La situation était peut-être pire que ce que je le pensais. L’un de ces sales types avait sorti une arme blanche, et semblait être prêt à nous attaquer ainsi ! Cette situation dégénérait complètement, à un point où j’en étais presque catastrophée. Me dire que quelqu’un allait peut-être être grièvement blessé à cause du fait que j’avais rembarré un peu méchamment un type qui le méritait me paraissait être complètement exagéré, et pourtant, cela allait peut-être arriver…

Mais malgré le désavantage numérique, il semblait réussir à se débrouiller face à ses deux agresseurs. Cela ne devait pas être la première fois qu’il se battait… Même si cela se faisait était peut-être lié avec le fait qu’il semblait… Il utilisait son alter non ? Il prenait d’énormes risques pour ça, pour moi ! C’était beaucoup tout de même, et tout cumulé… Oh punaise, je ne savais pas trop quoi faire là, ni même la moindre idée de comment je pourrais le remercier. Mais nous en étions pas vraiment là.

Un jet de canette plus tard, qui toucha maladroitement en pleine tête, j’étais prête à en découdre, même si je ne savais pas comment. Mais je n’eu pas vraiment besoin, car mon protecteur du jour sauta sur l’occasion pour… Coller le bras de ce type et le désarmer. A moins qu’il ne l’agrafait ? C’était difficile à dire dans les détails, mais au moins, le couteau était au sol, et nos trois opposants à terre, même si je revérifiais celui que j’avais neutralisé… Fiou, ce mot tout de même. Et il était toujours au sol, à se tordre de douleur. Il allait falloir que je remercie Riku, son conseil avait été… Plus qu’efficace.

‘’Ça y est ? C’est terminé ?’’ Demandai-je assez nerveusement au garçon, qui commençait à me prendre le poignet pour que nous puissions sortir, étant donné que la prochaine station était en train d’être atteinte. C’était vrai que si jamais ces types se relevaient, le second round risquerait d’être désagréable… Donc autant éviter toute suite, et tout simplement partir, même si cela signifierait que j’allais devoir marcher pour rentrer, mais bon… C’était un moindre mal. Mais lui proposait de simplement prendre le prochain train, ce qui… Eh bien, même si c’était une idée, n’était pas non plus pour me rassurer.

‘’Et s’ils nous attendent à la prochaine station ?’’

Mais alors que nous progressions et commencions à sortir, l’un d’eux vint à se relever. Celui qui s’était reçu ma canette en pleine tête semblait être plus que motivé à nous faire payer. Et je n’étais pas sereine du tout à l’idée d’affronter quelqu’un d’armé… D’autant que les portes n’étaient pas encore ouvertes, même s’il ne restait plus que quelques dizaines de secondes, ce qui allait signifier que… Le freinage !

‘’Accrochez-vous !’’ Dis-je un peu fort à mon protecteur, alors que, dans les secondes qui suivirent, le métro vint à piller assez brutalement. Essayer de marcher vu la décélération et ses potes par terre revenait à prendre un direct pour le sol. Et c’était ce que j’espérais pour lui, même si ma priorité était de sortir de ce métro, coûte que coûte.

‘’Dès que les portes s’ouvrent, on… On court jusqu’à le semer ? Ou on… L’affronte sur le quai ?’’

J’avais ma préférence, clairement. Mais de l’autre côté, savoir que ces types seraient hors d’état de nuire et auraient un aller simple vers le poste de police le plus proche était également appréciable… Restait à savoir son point de vue sur la marche à suivre. Après tout, sans lui je… Eh bien, je serais dans une bien moins bonne posture.

Mes jambes étaient presque en train de trembler. Je sentais des spasmes d’adrénaline essayer de contenir ça, mais… Juste que je n’avais pas l’habitude de riposter face aux attaques que je subissais. J’étais angoissée, nerveuse et toutes ces choses, et je n’avais qu’une envie : M’allonger chez moi et oublier tout ce qu’il s’était passé durant ce trajet en métro. Ça et une douche aussi… Je crois que j’en avais particulièrement besoin actuellement.

Mais c’était un peu trop tôt pour se projeter, car nous avions un cinglé devant nous. Il faisait de grands gestes avec son arme, probablement pour nous impressionner. Et ça fonctionnait, au moins un peu. J’étais vraiment mal à l’aise à l’idée de m’avancer vers lui, au point où je fis deux-trois pas modérés en arrière. Cependant, le garçon qui m’accompagnait était suffisamment confiant, et lorsque le freinage vint à se produire, notre agresseur chuta, non préparé et déséquilibré. C’était l’occasion que nous avions besoin pour prendre la fuite, ce qui semblait être la meilleure solution !

Une course s’engagea dès lors que les portes s’ouvrirent ! Plusieurs regards confus se tournèrent vers nous alors que nous déboulions à travers le quai et les couloirs. C’était un peu difficile de suivre également, étant donné qu’il continuait de me tenir le poignet, mais j’avais un bon cardio, donc… ça allait encore. Mais les escaliers par contre, c’était une toute autre affaire, et à plus d’une reprise, je faillis trébucher. Je crois que le stress me faisait perdre l’équilibre en plus…

Et alors que j’ignorais jusqu’où nous comptions aller, une personne vint à sortir d’une cabine. Vu son uniforme, il… Il s’agissait d’une chef de gare, qui avait dû être tenue informée de la situation. On ne devrait pas avoir d’ennuis, mais… Enfin, il avait tout de même utilisé son alter. Mais bon, la priorité était que nous étions tous les deux hors de danger, et je crois que la pression allait retomber, même si cela allait être dans les minutes qui allaient suivre.

‘’Fiou…’’ Laissais-je échapper, alors que je regardais tout de même derrière moi. Mais pas le moindre poursuivant. Au moins, c’était sûr que nous étions à l’abri maintenant, même si je n’allais être vraiment rassurée que lorsque je serais chez moi… Mais bon, il fallait les rassurer sur mon état.

‘’Ça va, grâce à vous. Si vous n’aviez pas été là, je… Je ne sais pas ce qu’ils auraient fait.’’

Et j’étais sincère. Même si j’avais mit un coup de pied assez cinglant, s’il ne m’avait pas réveillé et protégé, je serais probablement dans leurs griffes. Et qui sait ce qu’ils auraient fait de moi… Probablement valait-il mieux éviter de creuser cette question, et se contenter de souffler. Peut-être pas d’en rire non plus, j’étais encore trop stressée, mais… Bref !

‘’Vraiment… Merci.’’

C’était la moindre des choses tout de même que d’être extrêmement reconnaissante envers lui. Après tout, il avait prit des coups et des attaques pour ça. Sans compter le préjudice moral qu’était de se faire menacer à l’arme blanche ! Mais… Il me demandait si j’étais encore loin de chez moi. Comptait-il faire plus que nécessaire ?!

‘’Euh, bonne question ?’’ Fis-je, un peu confuse, avant de réfléchir. C’était vrai que j’étais encore à plusieurs arrêts de mon domicile, ce qui… Eh bien, présageait d’une longue balade : ‘’Je devais descendre dans quelques arrêts. Mais je crois que je vais rentrer à pied du coup. Rien que ces jambes ne peuvent pas faire !’’

Un peu d’entrain accompagnait cette dernière phrase, même s’il ne devait pas forcément comprendre que je faisais référence à mon alter. Cependant, le fait de les regarder m’obligea à admettre que je ne devais pas vraiment donner confiance, étant donner que… Eh bien, elles flagellaient.

‘’Hum, c’est un peu gênant là…’’

Voyant que nous allions bien, la dame s’était retirée dans son habitacle et avait repris le combiné, elle devait probablement informer les autorités de la situation. J’avais pas envi de rester une seconde de plus sous terre et avait grandement besoin de respirer un peu d’air frais, aussi pollué soit il.

- Je devais descendre dans quelques arrêts. Mais je crois que je vais rentrer à pied du coup. Rien que ces jambes ne peuvent pas faire !

Je dois avouer ne pas vraiment m’attendre à ça mais je ne questionnai pas la décision. Il était hors de questions que je me retrouve de nouveau dans un train souterrain et marcher me ferait le plus grand bien. La jeune fille tremblait légèrement, j’étais personnellement prêt à rendre mon goûter. Il valait mieux que l’on s'éclipse le plus vite possible, avant que l’employée du métro ne reçoive l’ordre de nous retenir.

L’angoisse avait rendue mes mains glacées, du bout des doigts je touchais le coude de la jeune fille pour l’inciter à prendre la direction de la sortie. Les racines de mes cerisiers me dérangeaient particulièrement, j’avais pourtant pas l’impression de les avoir tellement malmenés. Ma main libre passa dans ma chevelure, elle était humide de sueur, sûrement l’origine des démangeaisons. Je les séchais d’un coup d’alter tout en marchant vers le dernier escalier avant la délivrance.

Ces quelques instants de répits m'avaient permis d’observer l’adolescente plus calmement. Le gars l’avait traité de lapine, elle possédait en effet de longues oreilles blanches… Des oreilles de lapin, pas des oreilles de lamas… Elle devait mesurer quelques centimètres de plus que moi, avait une carrure svelte et semblait définitivement exténuée. C’était pas vraiment un horaire pour prendre le métro, travaillait-elle en plus du lycée? On m’avait dit que c’était assez commun ici…

Alors que je grimpais les premières marches, j'envisageais que des présentations pourraient être sympa.

- Au fait, moi c’est Nomori Nikita! Mais vous pouvez m’appeler juste …

J’avais vraiment plus de souffle.

- Nikita. Woah, c’était flippant çahaha

Un rire nerveux brisa ma voix au milieu de ma phrase. J’avais rarement vécu des frousses pareils et c’était bien la première fois qu’un être humain menaçait ma vie comme ça, en agitant couteau et alter fourbe sous ma gorge.

- Tu veux un coup de main pour porter ça?

Mon keigo avait pas duré une seconde, comme toujours, faut dire que j’avais pas vraiment la tête à ça. Du bout du menton j’avais pointé son sac à main, il semblait peser son poids et la demoiselle avait bien dit quelques arrêts.

Je devais avoir l’air d’être une buse là… Tout de même, à dire que j’étais capable de marcher avec mes affaires sur plusieurs kilomètres alors que mes jambes peinaient à me maintenir debout. Je crois que j’avais besoin d’un support, d’un appui, et ce fut le mur le plus proche qui vint à mon secours. C’était un peu optimiste de ma part de penser que j’en étais capable, mais… Eh bien, je n’avais pas envie d’embêter ces personnes plus que ça. Déjà que j’avais esquivé un mauvais quart d’heure, autant éviter de rajouter de longues demies-heures.

Mais il semblait que je n’allais pas avoir le temps de souffler. Le garçon vint à m’indiquer, d’un geste rapide, qu’il fallait mieux partir. C’était possible qu’en effet, avec l’utilisation de son alter, il ne souhaitait pas trop s’éterniser dans le coin… J’hochais donc la tête, avant de bouger, quitte à devoir forcer un peu sur mes jambes. Mais tant qu’on évitait de courir, cela devrait aller. Du moins, je l’espérais.

Le concernant… Eh bien, il y eu un détail que je n’avais pas vraiment fait attention dans le feu de l’action. Ça et la fatigue qui faisait que mes yeux n’étaient pas forcément en face des trous. C’était qu’il avait, au niveau de sa tête, quelques petites branches d’arbres. Etait-ce un choix vestimentaire, ou bien une mutation comme cela pouvait l’être pour moi ? Aucune idée, mais je me contentais de le suivre, espérant gagner la sortie et m’approcher de mon lit à une plus grande échelle. Sauf que, dans le tas, il vint à se présenter, mais plus que ça : Il me donnait déjà l’autorisation de l’appeler par son prénom ! C’était un peu surprenant tout de même… Mais bon.

‘’Hum, très bien, Ni… Nikita.’’ Fis-je, en essayant de retenir son prénom. Entre ça, le fait qu’il souhaitait être appelé par son prénom et son teint de peau, j’avais des raisons de penser qu’il venait d’un autre pays. Mais son Japonais allait, donc peut-être qu’il tenait juste quelques origines ? Enfin, j’étais un brin mal placée pour parler de ça, pour bien des raisons.

‘’Eh oui c’était… C’était vraiment terrifiant ! Habituellement, il y a tellement de monde dans le métro que ce genre de type n’ose pas agir, et je ne parle même pas des heures de pointes où là personne ne peut bouger ! Mais bon, entre l’odeur et les bruits, c’est… Assez désagréable.’’

Un mal pour un bien j’imaginais. En tout cas, c’était comme ça que je le voyais. Cependant, il fallait aussi que je me présente :

‘’Kaza Nousagi. Aussi nommée « La lapine » visiblement. Les gens s’arrêtent souvent là-dessus en fait.’’ Je roula rapidement des yeux pour poursuivre : ‘’J’ai un peu l’habitude des remarques et de ce genre de chose, sans compter les mains trop curieuses… Mais là, la fatigue n’a pas vraiment aidé à être patiente.’’

Je n’allais pas non plus mimiquer un baillement, mais l’idée y était. Mes paupières étaient un peu lourdes déjà, et les pensées de mon oreiller de plus en plus envoutantes. Restait à savoir si j’allais tenir jusque là. Cependant, il me proposa tout de même de porter mon sac ! Eh bah, c’était gentil de sa part, juste de proposer déjà, mais… J’avais pas mal de choses dedans.

‘’Je vais m’en sortir, ça ira. Et puis, si l’une de mes sœurs voit ça, je crois qu’elles ne vont plus jamais me lâcher avec.’’

Et ça, ça serait leur donner trop facilement l’arme nécessaire pour me hérisser le poil. Surtout Sue !

‘’Et du coup… Tu sauves souvent des demoiselles en détresse dans le métro ? Tu n’as pas eu l’air d’hésiter en tout cas !’’

‘’Kaza Nousagi. Aussi nommée « La lapine » visiblement. Les gens s’arrêtent souvent là-dessus en fait. J’ai un peu l’habitude des remarques et de ce genre de chose, sans compter les mains trop curieuses… Mais là, la fatigue n’a pas vraiment aidé à être patiente.’’

Ah oui, la lapine… c’est pas très créatif comme surnom. À force de rencontrer des gens à tout vas j’avais fini par devenir plutôt doué lorsqu’il s’agissait de retenir noms, prénoms, surnoms, téléphones et tout le tralalère. Kaza comme une maison et Nousagi un peu comme du lapin, that was easy. Avec ses grandes oreilles et ses cheveux clairs, elle me rappelait pas mal Mirko, l’héroïne qui avait perdu un bras durant les événements de Mustafu. J’étais pas vraiment très informé par rapport au milieu héroïque mais disons que c’était sur toutes les bouches et que mes potes du club de Go ne m’avait pas trop laissé le choix de l’ignorance.

‘’Je vais m’en sortir, ça ira. Et puis, si l’une de mes sœurs voit ça, je crois qu’elles ne vont plus jamais me lâcher avec.’’

Oh, elle a plusieurs soeurs? Bah décidément, voilà qui potentialisait un possible lien familial entre la jeune fille et l’héroïne! Je ne suis pas du tout un fanboy dans l’âme, mais à force de dédier la moitié de mes semaines à étudier et m’entrainer pour faire partie de ce milieu, bah, forcément, j’avais fini par m'intéresser un peu au sujet. Mon père avait fini d’installer son agence le mois dernier, il commençait à reprendre du poil de la bête et prétendait toujours pouvoir me caser chez n’importe quel héros pour un stage, c’était cool mais… ça venait de mon père quoi.

‘’Et du coup… Tu sauves souvent des demoiselles en détresse dans le métro ? Tu n’as pas eu l’air d’hésiter en tout cas !’’

Un large sourire se dessina sur mon visage alors que je prenais la remarque comme un compliment.

“Non, c’est pas souvent non et c’est pas comme si les types m’avaient vraiment laissé de la place pour hésiter."

Les rues étaient vides, on s’engouffrait dans un quartier résidentiel peu éclairé. Cela faisait longtemps que je n’étais pas passé dans le coin mais je reconnus les bâtiments que je longeais habituellement pour me rendre à la piscine depuis chez ma soeur.

“Après, ça se comprend que tu attires les regards, des oreilles en cotons comme ça, c’est super mignon, c’est pas comme les bras couverts d’yeux de l’autre gars.”

Je réprimai un frisson au souvenir des dents pourries et de l’odeur nauséabonde. C’était pas que ses yeux le problème.

“En tout cas tu lui a bien réglé son compte, j’aurais pas aimé être à sa place! T’as du sang héroïque dans la famille?”

C’est du forcing ça? Noooooon, pas du tout. Que voulez-vous, j’étais curieux! Elle avait bien dit avoir des sœurs, peut-être que l’une d’elles était l’ancienne héroïne de top 10?

J’ajustais rapidement ma boucle d’oreille de la main gauche, la plume s’était emmêlée avec les billes. Mes doigts encore légèrement tremblants heurtèrent ma pommette qui était plus que sensible. J’allais avoir un énorme bleu. Rentrer après le couvre feu avec un oeil au beurre noir… Ça valait la santé de Kaza, sans aucun doute doutes.