Bonnes intentions, mauvaise exécution

Musique

Les vibrations de mon téléphone vinrent à me ramener à la réalité. Je crois que j’avais eu un moment d’absence. Peut-être avec la fatigue qui commençait à s’accumuler, ou bien par cette situation qui réussissait toujours à me perdre. J’étais devenue responsable de notre foyer, et maintenant, je me retrouvais à devoir organiser toutes les choses qui pouvaient se dérouler là-bas. La cuisine, le ménage, les courses… Je ne m’étais pas encore frottée aux impôts, mais je n’étais pas pressée, vraiment. Un soupir se faisait alors que je m’arrêtais sur le côté, sortant mon téléphone. Juste un message, de Sue. Qu’est-ce qu’elle voulait encore.

‘’Prend des endives fraiches, pas du supermarché.’’

Ah… Oui madame, bien madame. Franchement, ça la tuerait de balancer un s’il te plaît merci ? Ou un bonjour également, vu que madame arrêtait pas de sortir chez des amies en permanence, me laissant seule dans la maison à devoir m’occuper de tout. Raaah, des fois, je me demande comment ça se fait qu’on soit jumelles. Certes, on a été longtemps fusionnelles, mais là, on vit chacun notre vie différemment. A croire qu’elle s’en fout complètement de moi, de mère ou de nos sœurs. Mais bon, ses copines sont bien plus importantes que nous…

Bon, je vais le faire hein. Je vais m’écraser, comme souvent, mais pas la peine qu’elle espèrent une réponse. A vrai dire, pas comme elle en espérait une de base, donc… Bref, je terminais mes achats, et une fois mon sac bien rempli, je pris la direction du retour, cherchant donc une petite épicerie pas très loin de mon chemin. Rien de bien sorcier pour mon tel, même si, évidemment, il indiquait toujours la même. Une de quartier certes, mais plutôt renommée. En tout cas, les évaluations étaient nombreuses et positives, même s’il y avait toujours des gens pour se plaindre. Mais ça, c’était la vie.

Je connaissais l’endroit, donc lorsque je me trouvais dedans, rien de bien sorcier. Les endives se situaient un peu plus à droite de l’entrée, tandis que le comptoir était à gauche. C’était comme si je pouvais faire ça les yeux fermés. Heureusement même, vu les absences que je semblais pouvoir me taper. Cependant, je crois que j’étais un peu trop ailleurs, vu qu’alors que j’avais les endives à la main, deux types, casques de moto et armes à la main, me dévisagèrent, probablement un peu pantois du fait que je semblais les avoir complètement ignorés jusqu’à maintenant.

Je crois que la scène était un peu surréaliste. J’avais des endives dans la main et des braqueurs devant. Ce n’était pas vraiment prévu comme situation ça ! Mais j’y avais été un peu entrainée : On avait appris, dans quelques stages de prévention des risques, à adapter le bon comportement : Se coucher plus bas que terre. Simplement coopérer, quitte à se faire braquer également. Et d’ordinaire, c’est ce que j’aurais fait.

Mais… Ce n’était plus vraiment l’ordinaire maintenant. Plus que d’être une femme au foyer qui faisait les courses et le ménage, je devais aspirer à être une héroïne. C’était ce que mère voulait, c’était les espoirs qu’elle avait… Et je n’avais pas vraiment le droit de la décevoir, surtout vu son état actuellement. Ce n’était pas très sûr, mais la vie héroïque comportait ses risques. C’était… Le bon moyen de savoir si j’en étais capable, non ? Bon sang, dès que ce sujet était abordé, j’avais l’impression que je devais me faire pousser des ailes avant de sauter d’une falaise.

Prenant une grande inspiration, je sentis que la confrontation allait exploser. Je ne pouvais pas me rendre, donc je devais combattre ! Et dès lors, il fallait que je les désarme. Sauf qu’ils étaient trop loin. Je plongeais donc sur le côté, balançant les endives dans leur direction (Quelle idée stupide tout de même), avant d’espérer pouvoir avoir l’offensive. Et le premier qui vint à s’approcher fut accueillit d’une balayette au niveau de la cheville, de quoi le faire trébucher dans les étalages. Mais le second… Où était le second ?

Aie !

Derrière moi. Evidemment. Il m’avait contourné pendant que son pote faisait le côté normal, et il venait de me mettre un coup de son arme dans la tête. Punaise, ça faisait un mal de chien ! Et inutile de dire que je me retrouvais au sol, à me tordre un peu de douleur tout en étant sonnée !

‘’Fait pas ton héroïne, poufiasse ! Un autre geste et j’te descend !’’

Je… Je crois que ça avait calmé mes ardeurs là… Il allait falloir qu’un vrai héros arrive. Soit qu’il entende ça, soit qu’il se rende compte qu’il y avait un problème… Et pour voir ça de l’extérieur, ça semblait être un miracle. La seule chose qui semblait sortir de l’ordinaire, c’était qu’un pamplemousse, tombé dans la bagarre, était en train de rouler sur le trottoir… Pour être un indice, je crois qu’on devait être sur un niveau cryptique. Dans quoi m’étais-je embarquée…

"Oh, cielo... J'ai fouillé toute la ville, y'a pas moyen d'acheter des cigarettes. "T'es trop jeune" qu'ils disent. E assurdo !", grogne-t-il dans sa tête.

Cela fait en effet un bon moment que Vitale commence à ressentir le manque. Là d'où il vient, le buraliste était plutôt tolérant à ce sujet. Maintenant qu'il est au Japon, il va devoir s'y faire. Arpentant les rues de la ville, vêtu de son blazer et son chapeau en toile lui ombrant les yeux, il profite de son temps libre pour se balader. Il est pensif comme d'habitude. Même après tout ce temps, il n'arrive pas à se faire au pays. Tout est si différent... Mais en même temps, l'idée de devenir un héros et de faire résonner son nom jusqu'en Sicile lui confère une excitation immense. C'est ça qui justifie sa présence ici.

Alors qu'il se promène les mains dans les poches et la tête baissée, certains passants le dévisagent avec méfiance. Pas étonnant vu sa dégaine de type louche et son air sombre. On pourrait jurer qu'il est dans un sale coup, mais non. C'est un élève de Yuei, déterminé à devenir un super-héros. Il aide les vieilles dames à traverser la route et embrasse la Mama avant de quitter la maison. Contrairement aux apparences, c'est un bon garçon.

Alors qu'il marchait tranquillement sur le pavé, un instant d'inattention lui coûte de piétiner un fruit qui traînait par terre. Ce dernier s'écrase, le jus se collant sur la chaussure cirée de Vitale. Un léger grognement tremble dans sa gorge. Il ne manquait plus que ça ! Il retire sa semelle collante de ce qui reste des morceaux éparpillés du pamplemousse en s'efforçant de rester calme.

"Il va falloir nettoyer tout ça, mais je n'ai pas de mouchoir sur moi.", pense-t-il.

Fort heureusement, se trouve une épicerie juste à côté. D'ailleurs c'est sûrement de la que vient le fruit. Jetant un oeil à sa montre pour s'assurer que le commerce soit ouvert, il décide d'entrer. A l'évidence, l'accueil n'est pas des plus chaleureux. A peine entré, il tombe nez-à-nez avec deux hommes casqués et armés menaçant une jeune fille à moitié assommée. L'un d'eux semble se tenir le dos, et le sol est parsemé de fruits. Ils ont du avoir du fil à retordre avec quelqu'un. Pourtant, il n'y a pas grand monde ici. Pointant son arme sur Vitale, l'un des braqueurs s'exclame d'une voix rauque :

-T'es qui toi !? D'où tu sors !?

Impassible, Vitale reste silencieux un moment, à observer les environs. Un détail le percute.

"Une lapine ? Je parie que sa patte doit porter sacrément bonheur.", pense-t-il avec détachement.

Il ne panique pas puisque de toute façon il n'a rien qui puisse les intéresser. Mais il ne compte pas non plus les affronter. Après tout, les apprentis-héros n'ont pas le droit d'utiliser leurs alters même dans ce genre de situation.

-Ne faites pas attention à moi, répond-il avec son accent italien et sa voix monotone. Je fais juste un petit tour et je repars...

-Te fiche pas de moi ! Bouge plus ou j'te bute !

Le braqueur se montre si menaçant que Vitale n'a pas d'autre choix que de s'immobiliser. Lui lançant un regard de côté, le garçon comprend que les choses risquent de dégénérer. Il lève la tête, dévoilant son regard qui jusqu'à maintenant était dissimulé par son chapeau. Celui-ci ne trésaille pas. Ses yeux pleins de mépris semblent chercher à provoquer les criminels.

-C'est indigne d'un homme de manquer de respect à une donna, lance-t-il d'un ton plein de reproches. C'est moche de pointer une pauvre fille avec une arme à feu, bande de lâche. Chez moi, les gens comme vous ne tiennent jamais longtemps.

Alors qu'il joue avec leur nerfs, il prépare discrètement son attaque. En observant bien, on peut remarquer de minuscules éclairs jaillir de sa poche. Il détourne son regard vers le deuxième braqueur pour l'insulter à son tour.

-On va se regarder dans le blanc des yeux encore longtemps où vous allez vous décider. La Mama m'attend à la maison et je n'ai pas de temps à perdre avec des larves insignifiantes comme vous.

Les provocations de Vitale semblent avoir amené la situation à deux doigts d'exploser. On peut voir que les braqueurs commence à perdre leur sang-froid et par la même occasion ils détournent toute leur attention sur lui. Dans un instant, les choses vont tourner au vinaigre...

Musique

Le choc que j’avais reçu à l’arrière de la tête me faisait encore voir des étoiles. C’était comme si je m’étais cognée la tête dans un mur, à la seule différence que c’était peut-être plus le mur qui était venu vers moi… Mais peut-être que cela allait me remettre les idées en place. Après tout, quelle idée stupide que de se dire que ça y est, juste car je voulais atteindre les hautes filières héroïques signifiait que j’avais leur niveau. Et le résultat était là : j’étais au sol, incapable de défaire deux braqueurs dans une épicerie, et obligée de confier ma vie à un stupide pamplemousse !

Bon… Si je devais être honnête, ce serait exagéré que de penser qu’ils allaient me tuer. Certes, je les avais énervé, mais j’avais comme qui dirait eu ma leçon… D’autant que si jamais ils m’attaquaient, ils risquaient bien plus que pour ce qu’ils étaient en train de commettre maintenant. Mais j’étais suffisamment nerveuse et stressée de savoir une arme braquée sur moi que j’étais surement un peu en train de paniquer là. Et encore heureux que j’étais à moitié sonnée, sinon je serais complètement en larmes…

Mais alors que je pensais cette situation comme échouée et une victoire des forces du mal, une personne vint à se présenter à l’épicerie. Vu mon état, un peu difficile de dire de qu’il s’agissait. Surement d’un garçon à la voix, même s’il avait un accent un peu prononcé. Cependant, difficile de dire d’où il venait, même s’il balançait des « donna » et des « mama » dans ses phrases. Et, autre détail un peu bizarre… Il sentait le pamplemousse.

A vrai dire, je ne savais pas ce qu’il faisait ici. Mais il semblait être près à défier les criminels. Soit il était très courageux, soit tout aussi inconscient que moi. En tout cas, les deux braqueurs ne le portaient pas dans leurs cœurs, et commençaient à aligner les menaces envers lui. Je savais pas ce qu’il avait en tête, mais… Je croyais entendre une sorte de petit crépitement. Très léger, qui provenait de sa direction. Il… Avait un plan ? Ou c’était juste une boisson gazeuse d’un gamin à l’extérieur ? Quoi qu’il en soit, c’était assez désagréable de se retrouver dans la position de l’otage, mais… Au moins les deux avaient leur attention focalisée sur ce type.

C’était peut-être l’occasion pour moi d’agir non ? Vu comment ils étaient distrait, je pouvais peut-être tenter quelque chose. Bon sang, j’avais le cœur qui battait à cent à l’heure…. C’était très risqué, mais au moins autant que l’intervention de ce garçon. Si une chose allait de travers, il risquait de se faire criblé de balles. Autant dire que ce n’était pas vraiment quelque chose que je lui souhaitais. Mais si je pouvais au moins en désarmé un… Il aurait moins de problème non ? Mais en étais-je capable ? Ce n’était pas simplement pour moi, ou pour les rêves qu’on me mettait sur le dos là…

Bon, il fallait bien tenter de toute façon.

Allongée sur le ventre, je me tournais afin de me redresser légèrement, et essayer d’envoyer le coup de pied le plus fort possible au niveau de la cheville de mon agresseur, qui perdit l’équilibre et tomba. Sur le retour, je tapais du talon dans son arme, l’envoyant valser plus loin dans la boutique, entre les melons et les salades.

‘’Pu-‘’ Fit le type qui se reçu mes coups, avant de tomber sur le dos et de se cogner la tête sur le sol. Cela semblait être douloureux, vu qu’il fut légèrement sonné, suffisamment pour être au moins un peu ko pour les prochaines secondes.

Mais le choc provoqua le tir, et la déflagration fut assourdissante ! Un sifflement particulièrement horrible à supporter vint à cogner sur mes tympans, me rendant encore plus titubante que jamais, alors que j’essayais de me mettre à l’abri, le plus loin possible. En tout cas, si ce garçon avait besoin d’une diversion pour frapper le plus fort possible, il l’avait sur un plateau.

Mon cœur battait si fort que cela en était douloureux. Et conjugué avec l’impression que ma tête allait sortir ou exploser, peut-être les deux, cela donnait un mélange particulièrement désagréable et éprouvant… Mais j’allais devoir faire avec, surtout dans cette situation critique ! De toute façon, planquée derrière des étalages et des rayons, je ne pouvais pas faire grand-chose que de me plaquer, espérant que tout cela ne vienne à se régler…

J’avais aggripée nerveusement mes oreilles, essayant de les rabattre sur ma tête pour éviter qu’elle ne dépasse et ne me grillent. Cela aurait été une terrible mésaventure si c’était le cas, d’autant que là, ils avaient toutes les raisons du monde d’être énervés, et surement plus à vrai dire. Il fallait croire que le premier avertissement n’avait pas été suffisant hein… Mais pour être honnête, j’étais morte de peur là, tellement que mes mains en tremblaient alors que la pression n’était pas retombée.

Et il y eu un crépitement. Un nouveau, plus fort, accompagné d’un flash bref mais intense. Un qui réussit à me faire sursauter, alors que, la seconde d’après, le bruit d’une personne s’affaissant se fait entendre dans la pièce. Je… Je pensai comprendre ce qu’il s’était passé. Le garçon à l’entrée avait dû utiliser un alter, un taser ou quelque chose du genre. Mais je n’allais pas prendre le risque de vérifier tant que je n’en étais pas certaine ! D’autant que j’entendis après quelques secondes des pas précipités en direction de l’extérieur, comme si quelqu’un prenait la poudre d’escampette. Ils… Ils fuyaient ? Ils n’allaient pas être arrêtés et châtiés pour leurs crimes ? C’était une demie-victoire, mais bon… L’important était que tout le monde allait bien non ?

C’était en tout cas ce que je pensais, surtout que le garçon s’approchait de moi, me tendant sa main pour m’aider à me relever, tout en me demandant si j’étais blessée, non sans me remercier de mon intervention assez téméraire.

‘’Euh, je ne crois pas ? J’ai reçu un coup, donc… Je ne suis pas sûre d’avoir toutes les idées claires en fait.’’

Mais j’acceptais sa main, pour me relever. Ma tête me faisait bien mal en vérité, et mon premier reflexe fut de passer la main, comme pour essayer de forcer. Qui sait, peut-être qu’en compressant suffisamment, la douleur finirait par disparaître ? Enfin, technique souvent essayée, mais avec bien peu de résultats. Cependant, le fait de voir ma main ensanglantée l’espace d’après me fit comprendre que… Eh bien, le choc avait été tout de même un poil violent.

‘’Ah hum… Visiblement oui.’’

Je ravalais ma salive, en regardant un peu bêtement ma main. Bon, cela signifiait que j’étais ouverte à l’arrière de la tête. Vu la quantité de sang, pas trop élevée, cela ne devait pas être trop grave, même si tout de même la couleur de ma main me donnait un peu la nausée et l’envie de crier. Mais il fallait que je reste calme, au maximum. Tant que j’avais les idées claires... Ce n’était pas la première fois que je me blessais, même si c’était rare et la première fois dans une telle situation. Et j’étais partagée le fait que je me forçais à rester normale et tout le stress qu’il y avait en moi suite à cette crise !

‘’Euh, vous… Vous pourriez trouver un peu d’eau ? Et une compresse stérile ? Ou si le propriétaire en a ?’’

Il devait bien y en avoir dans les environs, même si l’épicerie présentait plus de légumes et de fruits que de matériel d’infirmerie. Restait à savoir où était le propriétaire, mais vu la situation, je crois qu’il devait être en état de choc. Etat que je risquais d’atteindre, d’autant que je sentais ma respiration s’accélérer. D’autant que mes jambes risquaient de lâcher à n’importe quel moment.

‘’Je, euh… Je vais m’asseoir.’’

Vu mon état, c’était plutôt normal que j’avais mal. Un coup de crosse en plein dans l’arrière tête n’était pas vraiment une chose agréable, et j’avais probablement un peu de chance de ne pas avoir été assommée. Peut-être que le braqueur avait été galant, et qu’inconsciemment, il avait retenu son coup pour éviter de me faire trop mal… Pas vraiment une galanterie en fait, et de toute façon, il avait fini par le regretter vu comment cette histoire s’était terminée pour lui.

Enfin, je n’allais pas m’en plaindre. Même si j’avais mal et que je saignais. Juste que, assise, j’avais vraiment l’impression d’être en train d’halluciner. Les étoiles se multipliaient, et s’ajoutait à ça tremblements et frissons. Une sensation vraiment perturbante. Comment pouvais-je avoir froid au milieu du mois de juin ?! Vraiment, ce coup à la tête ne me mettait pas vraiment les idées au clair, loin de là.

J’étais juste assise de toute façon, à constater le désordre que cette bagarre avait provoquée. Entre les légumes renversés et ceux que j’avais lancé, cette boutique était devenu un véritable champ de bataille, avec un grand nombre de produits malheureusement à jeter. Et c’était sans compter sur le préjudice moral, qui lui allait être plus élevé encore. Du moins, je crois ? Enfin, si je pouvais avoir une couverture là… Mais j’entendais le garçon commencer à prendre les choses en mains, s’assurant de l’état du vendeur qui semblait être vraiment en état de choc, au point où il ne parlait plus du tout. En même temps, c’était un vendeur de légume ! Pourquoi des criminels viendraient-ils lui prendre de l’argent ? J’ignorais si le business des fruits et des légumes était si prolifique, mais il fallait le croire.

Mais le garçon vint à revenir, armé d’une trousse médicale. Evidemment, les soins n’allaient pas être indolores. Cela aurait été trop beau, mais j’étais prête à ça, au moment même où je lui avais demandé. Toutefois, il me préconisait de tout de même voir un médecin, ce qui se tenait, mais vu la régularité avec laquelle j’allais à l’hôpital pour voir ma mère, j’allais bien trouver un moment pour qu’un médecin ou un infirmier y jette un coup d’œil.

‘’Je devrais pouvoir montrer ça à un médecin.’’ Fis-je tout en me préparant à la douleur à venir, serrant un peu la mâchoire et le poing. Toutefois, il me demandait au passage mon nom. ‘’Je m’appelle Kaza Nousagi, et… Je me suis un peu retrouvée ici par hasard. J’étais juste venue faire quelques achats et… Vous connaissez la suite. Et vous ?’’

Les braqueurs et l’opération improvisée qui avait suivie, dans les grandes lignes. Cependant, il y avait une inquiétude qui persistait, et c’était concernant la manière dont il s’était défait du braqueur :

‘’Vous n’avez pas l’air d’être armé… Est-ce que ça ira ? Enfin… Ça veut dire que vous avez battu ces types via un alter, non ? Vous ne risquez rien ?’’

Une question simple, mais la possibilité qu’il puisse avoir de gros problème pour avoir joué les héros était… Tout de même crédible, et de nombreuses petites affaires recelaient de ce genre d’anecdotes qui pourtant, ruinaient des vies.

''Et... On devrait peut-être appeler les pompiers non ? Pour le proprio..."

Alors qu'il nettoie délicatement la blessure, il réfléchit à ce qu'il y'a de mieux à faire désormais. Au début il hésitait à donner son nom à la jeune fille puisqu'il comptait lui demander de faire comme s'il n'avait pas été là. Elle aurait dit à la police qu'elle ne se souviens pas exactement des faits, mais qu'elle a réussi à faire fuir les braqueurs elle-même. Ne pas lui dévoiler son identité lui aurait facilité la tâche. Cependant, le vendeur aussi l'a vu, et les caméras de surveillances seront forcément visionnées pour retrouver les brigands. En clair, le garçon va devoir assumer ses actes. Il n'a plus qu'à s'excuser auprès de la police et espérer leur clémence. Après tout il a quand même évité un drame.

-Mon nom est Vitale Milize, répond-il de sa voix monotone. J'avais une course à faire moi aussi et je suis tombé sur eux.

-Vous n’avez pas l’air d’être armé, remarque-t-elle. Est-ce que ça ira ? Enfin… Ça veut dire que vous avez battu ces types via un alter, non ? Vous ne risquez rien ? Et... On devrait peut-être appeler les pompiers non ? Pour le proprio...

On peut voir par son court silence que Vitale est tracassé. Il termine de soigner Kaza avant de reprendre.

-Vous avez raison. Je vais tout de suite appeler les pompiers ainsi que les forces de l'ordre. Ces criminels sont encore en fuite. Je risque de me faire un peu taper sur les doigts mais le plus important c'est que tout le monde aille bien.

Il sort son téléphone et explique la situation aux secours. Avant leur arrivée. Il discute un peu avec le vendeur afin de s'assurer que tout va bien. Ce dernier est encore un peu secoué, mais il est reconnaissant que les deux clients soient intervenus. Il explique que de nos jours, ce sont les petits commerces qui sont visés par les bandits. C'est un moyen facile de se faire une bonne somme d'argent avec peu de risque. Le système de sécurité n'est pas aussi infallible que ceux des grandes banques. Forcément, beaucoup d'épiceries, de pharmacies où même de boulangeries ont été confrontées à ce genre d'individu. Cependant pour lui c'est la première fois.

-Je vous aiderais bien à ranger tout ce bazard mais je pense que la police préférerait inspecter la scène telle quelle. Sinon, vous n'auriez pas un mouchoir pour nettoyer ma chaussure ?

Le vendeur offre très généreusement de quoi essuyer le cuir pamplemoussé au garçon. Ce dernier laisse enfin apparaître un léger sourire maintenant que sa semelle ne colle plus sur le sol. Il se tourne alors vers Kaza, d'un air trop sérieux pour ce qu'il s'apprête à dire.

-Vous aviez des achats à faire ? La Mama m'a filé des coupons de réduction. Il me semble qu'ils fonctionnent dans presque toutes les boutiques du coin...

Mes dents grincèrent au moment du contact. Un certain picotement bien désagréable trônait actuellement au sommet de ma tête, mais… Il semblait être presque anecdotique par rapport à ce qu’était le reste et cette impression constante que ma tête était prise dans un étau qui se resserrait progressivement. J’avais connu un grand nombre de situation plus attrayantes et agréables, et celle-ci n’en faisait clairement pas partie.

Le concernant, il se présentait sous le nom de Vitale Milize. Pas un nom qui me disait quelque chose à vrai dire, d’autant que lui aussi présentait son arrivée sur le simple coup de la petite course. Et pourtant, nous étions tous les deux là, après avoir neutralisé deux braqueurs et que je m’en sois reçu une bien belle entre les oreilles. Ça m’apprendra à être stupidement trop imprudente… Les choses auraient pu être bien pire, clairement. Ils auraient pu m’assommer, ou carrément me prendre en otage !

Si jamais mère finissait par apprendre comment cela s’était déroulé, je crois qu’elle allait passer plus d’une heure à me reprocher ça, sans comprendre que c’était pour elle que j’avais prit de telles risques à la base. Si je n’étais pas dans cette optique de rejoindre une formation héroïque, j’aurais appelé la police ou des choses plus moins dangereuses.

Toutefois, il vint à acquiescer sur le fait qu’il devait appeler les services d’urgences, entre les pompiers et la police pour s’occuper de la situation et rechercher les braqueurs, étant donné qu’ils avaient prit la poudre d’escampette. Toutefois, il y avait un détail qui devait être relevé, ce qui le fut à voix basse :

‘’Un peu tapé sur le doigts ? Hum… Ça risque d’être pire tout de même. Mais… Comment dire. La police n’est pas forcément obligée de savoir comment ça s’est déroulé.’’

Sous-entendu, si jamais je devais faire une déposition, ce qui serait bien probable, je n’allais pas explicitement dire qu’il avait utilisé son alter. Après tout, il m’avait sauvé la vie, je ne comptais pas lui apporter des problèmes sur la manière, d’autant que même si les deux criminels couraient toujours, c’était qu’ils avaient encore la force et l’énergie pour ! Donc pas de grandes séquelles en vue pour eux, si ce n’était possiblement la prison.

Dans tous les cas, il prit son téléphone, et fit part de la situation avec les pompiers, qui rapidement, vinrent à vérifier pour ma tête. Bilan des courses : Quelques aspirines et un rendez-vous la semaine prochaine chez le médecin de mon choix pour vérifier l’état de ma blessure. Mais bon, déjà ils n’allaient pas m’embarquer, c’était déjà ça.

Mais ce fut sa proposition qui me laissa quelque peu… Pantoise. Alors que la situation se présentait comme certes résolue, mais avec les lourdeurs administratives et les procédures qui allaient s’en suivre, il vint à me proposer des… Coupons de réductions.

‘’Hein ?’’

Ce fut ma première réaction, accompagnée d’un assez large sourcillement. Etait-ce vraiment le moment de proposer ça ? Difficile à dire, mais… Cela me fit rire. Assez honnêtement ! C’était tellement venu de nulle part, avec son visage tellement sérieux !

‘’Désolé, je ne devrais pas rire de ce que vous proposez mais… Je n’étais juste pas prête à ça !’’ Je laissais quelques secondes passer, le temps de retrouver un peu mon souffle face à cet imprévu. ‘’Et, si vous proposez… Eh bien, je ne suis pas contre ! Cependant, j’ai une question. Qui est… « La Mama » ?’’

Clairement, je crois que j’allais me souvenir de cette journée. Tout du moins, de ce passage. C’était que ce n’était pas que les jours que j’assistais à un braquage de supérette. Aux premières loges en plus. J’étais un peu toute retournée, alternant entre respiration haletante et tremblements. Cette chute d’adrénaline n’était pas très appréciable pour être franche, mais à moins de me mettre un sédatif pour cheval, je crois que j’allais devoir faire avec jusqu’à nouvel ordre. Probablement que les heures de sommeil ce soir seraient peu nombreuses…

Le concernant, il vint à m’expliquer qui était cette fameuse « Mama ». Et donc, c’était tout simplement sa mère ! Il semblait en être particulièrement proche, et je ne pouvais que comprendre ça, vu ma situation. Lorsque l’on m’avait annoncé que ma mère était hospitalisée dans un état grave, je… Ma réaction n’avait pas été belle à voir, et probablement que j’avais dû être aussi livide que mes cheveux, ce qui en soit est un sacré exploit.

‘’Ah, je comprends mieux… Mais avec ce que vous avez fait, je pense qu’elle ne pourrait être que fière.’’

Et peut-être un peu inquiète, étant donné qu’il avait utilisé son alter et que la police s’en mêlait. Et évidemment, même s’il avait sauvé des vies, il allait se faire au moins un peu tapé sur les doigts. Cependant, je n’étais pas sortie d’affaire, et une fois que les pompiers eurent fini d’inspecter ma tête, j’eu le droit aux mêmes questions. Qui étaient-ils ? Quel était mon rôle dans cette affaire ? Heureusement, mon alter n’était pas vraiment quelque chose d’activable à volonté étant donné que je l’avais en permanence. Et pour le peu que j’avais fait, j’esquivais ça. Mais j’eu tout de même le droit à une grande et longue série d’interrogations afin d’établir le portrait robots de ces types. Seul problème, c’était qu’ils portaient tous les deux des casques de moto, donc c’était « un peu » difficile.

Le pire dans tout ça était que j’eu également le droit au coup sur les doigts. De longues dizaines de minutes à me rabâcher que j’avais agis de manière déraisonnée et que je m’étais mise en danger. Et je ne pouvais pas nier que c’était ce que j’avais fait. Et j’avais comprise la leçon. Si je voulais devenir une héroïne, j’allais devoir grandement m’entrainer, sur tous les points. Si je n’étais pas en mesure de contenir une telle situation, autant dire que face à des criminels altérés ou des supers vilains, je n’allais pas en mener bien large…

Mais passé ce temps, je fus libérée de cet interrogatoire, et j’allais enfin pouvoir filer. C’était que je n’était pas vraiment à l’aise face aux forces de l’ordre. Pas que j’avais des choses à me reprocher, mais j’avais toujours la pression à proximité d’eux, comme si j’étais surveillée de trop près, et que le moindre faux pas allait m’attirer des ennuis. Mais bon, c’était derrière, et je comptais bien rentrer chez moi. Même si, avec tout ce remue-ménage, les endives de Sue allaient attendre demain. Les coupons dans ma poche n’allaient pas non plus expirer d’ici si peu, et je pense que ce soir, j’allais manger simple. Rien de bien sorcier.

J’allais tirer bien plus qu’une bosse de cette journée en tout cas.