Un pas après l'autre, je tire avec difficulté le corps de l'héroïne inconsciente appuyée sur mes épaules. Le vieux bois du parquet de l'appartement crisse en rythme avec ma respiration courte, je ne pensais pas que ce serait aussi crevant.
"Héhéhé... T'es lourde..."
Mon ricanement épuisé résonne à peine, son bras m'échappe subitement, glissant à travers mes mains pleines de sueurs et elle s'écroule au sol dans un bruit sourd. Je pose mes mains sur mes genoux et reprend doucement ma respiration, un sourire en coin et mes yeux posés sur ma proie endormie.
Le combat m'a plus épuisée que je ne le pensais et la traîner jusqu'ici n'a pas aidé, mes muscles me brûlent et mes membres me font mal... Quand à mon visage... Je passe une main sur la plaie encore chaude et la rage me monte au cerveau, je ne lui pardonnerais jamais d'avoir osé l’abîmer ! C'est sûr, il faut qu'elle paye pour son insolence et son non-fun, je vais lui apprendre les bonnes manières !
J'inspire fortement et ajoute :
"Mais malheureusement pour toi, on est quand même arrivés à destination !"
Soudain, un bruit de sirène siffle et une lumière bleue passe rapidement devant la fenêtre, éclairant la pièce pendant une longue seconde, m'arrachant mon sourire. Ça y est, les flics rappliquent enfin, quelqu'un a du les avertir vu le ramdam que j'ai fais mais ici, je ne risque pas grand chose. Ma planque du moment est assez éloignée et pour une petite rue abîmée il ne vont pas fouiller jusqu'ici, si ? C'est juste un appart abandonné au rez-de chaussé d'un immeuble perdu dans une résidence à moitié vide... Et ce ne sont pas les voisins du dessus qui viendront se plaindre, ils ont l'habitude des squatteurs et depuis que je suis là, ces derniers préfèrent éviter l'endroit.
"Bienvenida !"
Les murs sont tagués et les pièces insalubres, le sol est sale, recouvert de poussière, de cendres et de toutes sortes de mégots. Au centre de la pièce principale, il y a un vieux canapé en cuir marron à moitié déchiré recouvert de plusieurs sacs noirs contenant mes affaires qui est placé face à une télé datant du dernier siècle. Et pourtant, je suis heureuse de retrouver mon petit chez-moi... avec enfin une véritable occupation à portée de main !
Je ricane et me dirige alors vers mes affaires pour la première étape de mon plan diabolique : me refaire une beauté !
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Tout en sifflotant, je finis de ligoter ma proie, maintenant allongée sur le canapé, avec excitation. Ses poignets sont liés dans son dos et ses pieds, maintenant débarrassés de leurs bottes mécaniques, sont également attachés entre eux, du vrai travail de pro, Thready serait fière ! De ce que j’ai compris de son alter, saucissonnée comme ça, il n'y a aucune chance qu'elle m’inquiète lorsque je m'occuperais de la partie la plus intéressante : retirer ce masque affreux et découvrir son visage !
Maquillée et recoiffée, j'ai troqué mes habits déchirés pour un t-shirt tout neuf et je me suis arrangée pour cacher la sale balafre qu'elle a osé m'infliger sur ma joue délicate... Ça, je l'ai toujours en travers de la gorge et compte bien le lui faire payer. Je resserre un nœud avec un léger mélange de haine et de sadisme, t'as cru que tu pouvais te foutre de moi hein ? Que tu pouvais me battre ?!
Je me lève subitement, la seule lampe de la pièce s'éteint et une lame de lumière sort de ma main pour venir se poser sur sa gorge fragile...
Ceci est une suite directe d'Epic Light Battle, si vous avez peur de ne pas tout comprendre, n'hésitez pas à aller le lire en amont.
Je dois avouer, entre un sol de hall froid et dur, et le canapé usé de ce que je suppose être un squat – ou du moins un vieil appart’ insalubre, il y a pas photo : même si la posture n’est pas des plus agréable c’est tout de même bien meilleur. Cela dit, le réveil douloureux aux chevilles je l’ai senti passer. À peine les yeux ouverts, le peu de lumière me permettant d’identifier les lieux disparaît pour en laisser une autre apparaître à mon cou. La voix de la tarée, proche, me demande si je suis sortie de mon sommeil douloureux, certainement par impatience. Je lui réponds alors, d’un ton amusé pour me détourner de la tension et des sueurs froides ruisselant peu à peu mon front masqué :
« Je ne savais pas que c’était mon anniversaire aujourd’hui : on éteint les lumières et on laisse les bougies sous mon visage pour que je les souffle… Cela dit, je ne m’attendais pas non plus à tel cadeau : c’est la première fois qu’on m’offre une séance de BDSM. »
Je n’ai pas pu percevoir mes bottes, mais je sais que je dois gagner un maximum de temps pour laisser le vieux préparer mon échappée. Et dieu sait à quel point je vais certainement souffrir en l’attendant, connaissant l’énergumène se trouvant face à moi.
—
Quelques minutes plus tôt, peu après la prise en chasse de l’Ancien sur Illuminación :
« C’est tout beau tout propre, master ! »
« Bien. » Il pianote de nouveau sur son écran d’avant-bras en continuant sa poursuite : « Le reste a été versé. Tu me suis toujours ? »
« Super ! Vous comptez aller jusqu’où avec vos chérubins ? C’est qu’ils sont agités ces petits polissons. »
Il s’arrête. Apparemment sa cible vient d’entrer dans un immeuble à quelques mois d’être rebâti ou rénové, en attente d’une décision de l’ancien propriétaire. En tout cas c’est que semble dire le registre en tapant l’adresse. Ce n’est clairement pas le genre d’endroit qu’on garderait pour QG de groupe terroriste, une planque de secours peut être ? Ça serait cohérent. Au vu de la situation, soit c’est un endroit choisi au pifomètre, soit c’est à peine équipé pour garder de quoi se reposer. Dans les deux cas, il faut rester vigilent, si cela se trouve d’autres personnes sont sur les lieux :
« Tu as de la chance, je peux maintenant te donner les nouvelles coordonnées. Tu peux leur donner des habits de livreurs de pizza s’il te plaît ? Peu importe la marque, ne t’embête pas. »
« Tant que vous avez les moyens, je suis toujours partante ! »
Dernière édition par Ayako Idō le Ven 17 Jan - 22:02, édité 1 fois (Raison : ajout du lien du précédent opus)
"Héhéhé salut, bien dormi ? Je savais que t'étais une rigolote au fond."
Dis-je avant de tirer la langue, amusée. Je n'arrive pas à croire qu'elle n'ai pas déjà fondu en larmes, est-ce du courage ou de la folie ? Peut-être qu'elle pense que parce que je l'ai épargnée une fois je vais recommencer ? La détresse pousse parfois la nature humaine à tout tenter pour survivre, jusqu'à provoquer une psychopathe qui vous tient en vie uniquement car ça l'amuse... Jusqu'à mettre son bon sens de côté.
Je m'accroupis pour approcher mon visage près de son masque et la fixe tout en appuyant lentement ma lame sur sa gorge. Là, je peux sentir sa jugulaire vivre, les vagues de sang affluent vers son crâne avec difficulté et une goutte écarlate glisse le long de son cou lorsque la peau s'ouvre légèrement.
"Donc... tu n'as pas peur ? Interressant. Je me demande jusqu'où je pourrais aller pour te forcer à me supplier."
Non, la mutiler juste pour voir le sang gicler ne m'intéresse pas pour l'instant, si je dois la faire saigner, autant le faire en combat. Je détends mes muscles et mon arme cesse soudainement d'appuyer sur sa gorge, la laissant respirer de nouveau.
"Mais avant... Ma lame glisse alors lentement vers une des jointure de son masque horrible, caressant sa peau sensible. J'ai envie de savoir ce que tu caches là-dessous."
Un léger son métallique se fait entendre lorsque mon épée se heurte au masque, éclairant ce dernier d'un léger halo rose. Je lui souris alors, excitée. Cacher son identité c'est plus un truc de vilain peureux, alors pourquoi elle ? Pourquoi une fille qui vient de sauver trois balourds machistes cherche-t-elle à cacher son précieux visage ? Depuis qu'elle est là, je me retiens de ne pas le découvrir alors que j'en meurs d'envie seulement parce que je voulais qu'elle soit éveillée à cet instant, lorsqu'une super-vilaine connaîtra son visage et qu'elle sera désespérée !
"Pitié, dis-moi que ce n'est pas parce que tu es moche !"
Clac Et sur ces paroles pleines d'espoirs, la jointure claque. Pendant qu'elle dormait, j'ai pris le temps d'étudier chaque morceau du masque pour pouvoir le briser rapidement sans abîmer le précieux visage de ma prisonnière. Je bouge mon épée pour l'approcher d'un second point sensible. Clac
"Oups ! Plus qu'un !"
Je pose finalement mon épée sur le dernier point qui détruira l'affreux masque tandis que mon regard scrute là où sont censés se trouver ses yeux avant de lui demander en ricanant :
Étrangement, je ne suis pas particulièrement apeurée : Mon corps répond de lui-même mais mon esprit, lui, reste calme. Encore je ne saurais pas qui j’ai en face ni l’endroit où je me trouve, ce serait différent, mais il faut dire que ma stratégie d’éviter un coup potentiellement mortel – même si c’était davantage un réflexe qu’un geste réfléchi – m’a au moins permis d’éviter une galère pas possible voire les portes de la mort. Il me faut donc survivre coûte que coûte pour pouvoir espérer rentabiliser ce sursis et les moyens dépensés à ma libération de cette situation précaire, je dois rester forte et garder espoir. Suite à ma punchline réflexe, Iluminación lâche un petit rire avant une petite salutation en me demandant si j’ai bien dormi, pour ensuite remarquer mon humour puis tirer la langue dans la seconde qui suit. Visiblement elle semble amusée, et son impulsivité se confirmant, je suppose que tant que je n’évoque pas l’état son visage tout se fera davantage dans le jeu que le ressentiment :
« Règle numéro un des rendez-vous chez des instables psychologiques et des psychotiques, les caresser dans le sens du poil et éviter de contredire ou juger leur logique tout en restant naturel. Règle numéro deux, si possible, prenez la situation avec la même légèreté que mon interlocutrice, paniquer ne ferait que confirmer sa supériorité qu’il faut absolument remettre en doute, afin de favoriser la règle suivante. Règle numéro trois, restez intéressant et accessible au possible, il faut faire naître cet intérêt à vous garder et développer des liens dans le meilleur des cas, afin d’éviter la solution simple et brève de s’éloigner ou se débarrasser de vous. Règle numéro quatre, les sources d’intérêt autodestructeurs ou ayant une fin doivent être un dernier recours suivant les moyens que vous possédez, le cas échéant trouvez une autre source d’intérêt le plus vite possible. » – Mes notes de travail, 2057
Lâchant un tout petit grognement de réveil : « Salut, un peu mouvementé mais j’ai au moins une surprise à mon réveil, donc l’un dans l’autre c’est pas si mal je suppose. » Je hausse les épaules pour appuyer mes propos : « Ouais, en combat j’ai rarement l’occasion de discuter, surtout en situation d’urgence. Désolée si je t’avais déçue jusque-là. » Fais-je d’un ton tout aussi amusé voire presque complètement décalé de la situation.
Rester calme, rester calme… rester, calme… Ce n’est pas la première fois que tu rencontres des cas psychiatriques. Ça va être horrible, tu le sais, tu as vu les rapports à son sujet. Quoiqu’il arrive, ne perds pas la face, ne la laisse pas gagner l’ascendant.
Elle s’accroupit et nous nous regardons mutuellement pendant que je sens la chaleur s’intensifier et me brûler la gorge. En silence, sous le masque, je me mords la lèvre inférieure pour faire passer la douleur et retenir un cri de surprise tandis que la sadique remarque son intérêt pour mon absence de peur, semblant vouloir me faire supplier. À ces mots, mes poings se serrent alors, forçant légèrement sur les liens qui m’assurent en retour l’impossibilité d’agir autrement que par la parole et mon Alter. Mon corps réagit, il veut s’échapper de là, la sueur froide dégouline en se mêlant au sang de l’infime plaie, mais tout ce que je peux faire c’est réfléchir, réduire les dégâts au possible et attendre le moment opportun pour satisfaire cette peur volontairement oubliée. Du même coup, mes bras me font un mal de chien suite à la contraction de mes poings qui parcoure peu à peu ces derniers, comme pour me rappeler que tout ceci n’est pas un pur cauchemar.
Sans prévenir, la pression de sa lame se relâche, dégageant le cou et me permettant à nouveau d’inspirer correctement. Plongée dans mes pensées, je n’avais pas remarqué à quel point je ralentissais ma respiration, la tête étant encore un peu vaseuse du réveil soudain ma respiration est bizarrement régulière. Attachée de la sorte, le chef d’orchestre n’est définitivement pas mon corps, mais bien mon esprit. Et c’est un réflexe qui fort heureusement me fait garder mon calme pendant qu’elle m’effleure, afin de découper une à une les attaches tenant mon masque en place, se faisant d’une joie grandissante et espérant mon apparence physique à son goût, jusqu’à la dernière où une question de sa part provoque ce que je préparais pendant ce temps :
« Alors ? Je l’ouvre ? »
—
Une poignée de dizaines de minutes plus tôt, sur le toit d’un immeuble visible depuis la fenêtre du salon. L’Ancien, son fusil à l’épaule et le bipied posé sur la bordure, est allongé l’œil rivé dans la lunette, visant Iluminación qui vient de passer devant la fenêtre. Aucune trace de l’Apprentie, l’angle ne permettant pas d’apercevoir l’entrée de la pièce. S’est-elle débarrassée d’elle ? Non, lors de la symbiose télépathique sur le trajet elle n’avait pas spécialement envie de l’éliminer à peine à destination. Au contraire, elle semblait excitée à l’idée de la démasquer et décidée de lui faire regretter sa blessure au visage. Mais où se trouve-t-elle alors ? Lâchant son fusil, il rampe alors sur les côtés afin de changer d’angle de vue et peut être apercevoir la jeune apprentie, mais ne décerne tout au plus qu’un bras ganté jonchant le sol. Est-ce l’apprenti ou un malheureux témoin que la vilaine venait de surprendre ? Pour en être sûr, il décide donc de changer d’emplacement et descend du bâtiment en rappel, priant qu’on ne le surprenne pas avec son fusil dont le canon dépasse de la cape :
« C’est bon, tu peux les faire venir. »
« OK ! »
Quelques secondes plus tard, quatre livreurs de pizza sortent d’une ruelle adjacente, tous avec un uniforme de marque différente et deux d’entre eux ont une boîte de pizza à la main. Ce n’est pas ce à quoi il pensait par « peu importe la marque » mais tout bien réfléchi ça n’est pas une si mauvaise chose, car une idée bien meilleure vient d’émerger de sont esprit. Arrivé au niveau de la porte d’accès du rez-de-chaussée, il s’arrête et reste suspendu et droit à l’horizontale, le corps tourné vers le bas et accueillant les livreurs blessés, à peine remis du combat qu’ils avaient eux-mêmes provoqué quelques minutes plus tôt. L’un d’eux le reconnaît en s’approchant et s’exclame à peine audiblement :
« C’est lui ! L’homme dont parlait la gamine, Le Guide ! »
Un autre répond à voix basse lorsque le vigilant fait signe du doigt au niveau de la bouche, tous les quatre arrivés juste en-dessous de lui :
« Mais que fait-il ici ? Et elle est où l’autre ? »
L’homme répond alors, d’un ton grave et sérieux malgré la posture quelque peu originale :
« Appelez-moi L’Ancien, Le Guide est la personne qui vous a évité une mort certaine, et je vais justement vous donner une occasion de racheter votre dette… »
—
Une voix brise le silence avant même que je ne puisse le faire comme prévu :
« Non mais vous vous foutez de moi ?! Puisque je vous dis que je n’ai pas commandé de pizza ! Vous avez vu l’heure en plus ?! Vous n’avez pas honte de réveiller d’honnêtes gens pour de la pizza au poulet-champignons et aux anchois ?! De plus, notre famille est végétalienne de génération en génération depuis deux mille dix-huit, vous pensez sérieusement que ça aurait pu être de notre fait ?! »
« Hé ! Il y a des gens qui dorment ici ! »
« Allez dire ça à ces débiles qui viennent sonner à ma porte à une heure pareille ! »
« On s’en tamponne ! Vous avez pas à leur faire la morale aussi fort à une heure pareille non plus ! »
« Je vous préviens, si vous continuez j’appelle la police ! »
La police ?! Remarque… Je doute qu’ils se bougent rapidement pour une dispute entre voisins. Cependant, la tension est montée d’un cran, me faisant lâcher une remarque plus adaptée à la situation que prévu :
« Tu veux vraiment ouvrir ? Remarque, avec ce qu’il se passe dehors tu devrais peut être te dépêcher. »
L’intonation est étrangement calme, presque enjouée comme au réveil. Ne me sachant plus seul dans le coin et n’imaginant absolument pas mon interlocutrice comme une assassin discrète, capable de tuer avec de potentiels témoins alentours, je fais confiance à ma témérité et ma curiosité pour chercher à cerner sa personnalité :
« À moins que l’idée de « déballer le cadeau » au dernier moment t’intéresse davantage ? »
Évidemment, rien ne se passe jamais comme prévu. À chaque fois que je veux m'amuser il faut que quelque chose vienne gâcher mon plaisir… Et là c'est au tour des voisins chiants. En plus je suis sûre qu'elle était sur le point de craquer ! Ça fait plusieurs minutes que je bosse cette mise en scène pour arriver à un "oh non, ne me retire pas mon masque par pitié." et voilà que l'élément perturbateur se ramène, interrompant mon monologue de méchante diabolique.
Blablabla les pizzas, blablabla la police, ils sont sérieux vraiment ? Je grimace, énervée, avec notre combat à quelques pâtés de maisons d'ici, il pourrait y avoir des héros dans le coin… Ça n'arrange pas vraiment les choses.
"Tu veux vraiment ouvrir ? Remarque, avec ce qu’il se passe dehors tu devrais peut être te dépêcher."
Et voilà. Je m'en doutais, maintenant cette idiote reprend la confiance tss… Comment tu veux faire craquer quelqu'un dans ces conditions sérieux ?
"À moins que l’idée de « déballer le cadeau » au dernier moment t’intéresse davantage ?"
Ma grimace laisse la place à un sourire sadique, elle a du cran c'est sûr mais dans sa situation, je ne sais pas si la ramener et la meilleure idée, surtout avec une lame de lumière aussi proche de sa gorge sensible.
"Je vais finir par croire que t'as envie de crever."
Tant pis pour l'effet dramatique mais pas question de ne pas finir ce que j'ai commencé et puis ce n'est pas le moment de lui donner raison non plus… Ça n'aurait rien de drôle ! Ma lame se relève soudain, faisant claquer la dernière attache en même temps que son sale masque qui heurte le sol avec un bruit métallique.
"Héhé !"
Une grande masse de cheveux bruns se déploient autour d'un innocent visage à la peau douce, enfin libérés de leur atroce prison. J'en étais sûre, avec un corps aussi beau, elle ne pouvait être que magnifique ! Bon, y'avait encore du chemin niveau style et maquillage pour atteindre la perfection maiiiis… Y'a du potentiel !
Alors que les esprits continuent de s'échauffer dehors, j'approche mon visage du sien et glisse mon ongle pointu sous son menton avec douceur :
"Je te rassure, c'est pas mon genre de déchiqueter les beaux visages hihi… Avec un peu plus de charisme tu pourras être carrément excitante tu sais ! Et pour ça j'ai mes petites techniques…"
Avec son alter marrant, son étrange fierté et son beau visage, je suis sûre qu'elle déploiera tout son potentiel en se battant pour sa vie. Il n'y a rien de plus plaisant qu'un adversaire qui se bat pour survivre, il n'a aucune limite, se bat sans se soucier de qui il est et dévoile sa vraie nature… Et je suis sûre que cette héroïne à deux balles cache bien plus que ce qu'elle ne laisse paraître.
Il semblerait que mes paroles fassent effet, j’ai réussi à titiller sa curiosité. En mêlant ce sacrifice du secret de mon visage à une personnalité à découvrir et mesurer, la transition d’intérêt est passée comme peuvent l’attester son sourire malsain et sa réponse enjouée. Le masque tombe, et désormais je me retrouve à devoir jouer un nouveau rôle, celui de la demoiselle devant s’assurer qu’on gardera le silence à son sujet. Une chose difficile face à toute personne rationnelle, mais Iluminación ne semble pas guidée par la raison. Ses comportements sont beaucoup trop chargés d’affect pour parler de manipulation froide et calculée. Cependant, je dois garder à l’esprit que la réactance a été suffisamment présente dans son ego pour faire fi de ce même affect. Celui-là même que je titillais par mes précédentes phrases. Autrement dit, il faudra qu’Iluminación pense être la seule arrivée sur une conclusion qui m’avantage.
Reste à déterminer quelle conclusion.
La bonne nouvelle, c’est que mon apparence lui fait suffisamment d’effet pour m’épargner une défiguration. La mauvaise, c’est que cette attirance physique – aussi légère soit-elle – vient d’une tueuse impulsive qui me menaçait mortellement il n’y a pas dix secondes. J’espère sérieusement que par « excitante » elle ne pense pas à des choses que je ne saurais prononcer. Suppositions dérangeantes mises de côté, Iluminación vient de m’ouvrir une porte vers la discussion, quoiqu’un peu dérangée par les voisins un peu trop bruyants qui semblent se calmer quelque peu pour l’instant. Certainement en train de régler silencieusement leur litige avec le livreur de pizza. Quant à moi, grimaçant légèrement en essayant de me mettre à l’aise sur le canapé – pas évident avec ces liens et les épaules HS, j’exprime mon intérêt à cette porte ouverte presque sur le ton de la blague :
« Des petites techniques qui réussissent visiblement… »
Puis je montre de la tête ma posture de faiblesse apparente, souriante. « Quitte à passer un moment tendu, autant le faire avec le sourire » que disait le vieux.
« À moins que tu parles uniquement de l’esthétique ? »
J’espère qu’il se rendra compte dans quel guêpier cette histoire me mène, mais je suppose que c’est une situation à haut risque et haute récompense : No pain, no gain…* comme aiment dire les américains. Peu de personnes ont l’occasion de parler avec des criminelles de son gabarit et rester vivantes. Cette discussion devrait nous permettre d’établir de manière fiable un début de profil psychologique, à coupler avec les infos de la police. Heureusement que le vieux m’avait conseillé de prendre des options de profilage pour m’y initier…
Décidément, cette fille ne semble pas comprendre. Comment peut-elle sourire dans une situation pareille ? Il me suffirait que d'une seule envie, d'une seule pulsion pour ouvrir sa gorge en un éclair.
"L'esthétique compte beaucoup. Tu ne devrais pas sourire mi bella."
Mon sourire disparaît alors que je viens passer ma main sur sa gorge en faisant briller mes tatouages un peu plus fort. J'ai envie de voir enfin la peur naître dans ses yeux, pouvoir apercevoir la terreur que je lui procure, observer son corps se crisper à chacun de mes mouvements… Elle doit savoir qui elle affronte.
"Vu que tu sembles être trop stupide pour comprendre, laisse moi t'expliquer ta situation."
Une vague de lumière rosa traverse ma main, brûlant légèrement sa peau douce alors que mes yeux se posent sur les siens :
"Tu es là, seule, ligotée et à la merci de la vilaine la plus dangereuse du pays qui t'as déjà battue une fois sans difficultés."
Un ricanement m'échappe au souvenir de cette bataille.
"Je peux te tuer sur ce canapé sans problèmes. Je peux te faire plein de trucs que les médias qualifieraient d'horrible. Et je peux même faire en sorte que personne ne retrouve jamais ton corps !"
Je lui souris, comme si je venais de donner mon incroyable CV à un entretien d'embauche, ce que je n'ai jamais fait d'ailleurs.
"Et, je ne sais pour qu'elle raison, tu continues de faire la maligne. Alors…"
Je me lève soudainement et dégaine une gigantesque épée de lumière verte que je viens apposer sur l'un de ses liens.
"On va faire un jeu."
Je laisse quelques secondes de silence s'écouler pour qu'elle puisse comprendre vu que visiblement, les informations ont du mal à monter au cerveau de cette fille.
"Les règles sont simples : Je pose une question, tu réponds. Si j'ai l'impression que tu me dis la vérité, je coupe l'une de ces cordes. Par contre si je sens que tu me mens… Je couperais autre chose. C'est que du feeling !"
Ma lame se déplace alors lentement le long de son corps pour s'arrêter à quelques centimètres de son visage. Elle veut me cacher de quoi elle a peur ? Je vais le découvrir moi-même.
"Première question. Mon épée s'éloigne d'elle pour pointer le masque au sol. Pourquoi tu caches ton identité ? T'es une sorte d'héroïne anonyme ? Ou tu fais plus dans le vigilantisme ?"
Un sourire moqueur se dessine finalement sur mon visage :
"Et il se passerait quoi si on apprenait qui se cache derrière ?"
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