Daily Training [Ft. Logan Bishop]

"Avec Wendy"

BIIIIIIP ! BIIIIIIP ! BIIIIIIP ! BIIIIIIP ! BIIIIIIP ! BIIIIIIP ! CRAC !

Raaaah merde, encore cassé. Heureusement que ça m’arrive une fois tous les deux mois, ma peau étant bien trop dure il suffit que je ne fasse pas attention et je pète le snooze… au sens littéral pour le coup. J’espère que ma mère pensera à me prendre un vrai réveil un jour, ou qu’on développera un réveil renforcé pas trop cher. Avec l’arrivée des Alters – notamment les mutations de renforcement – c’est devenu chose commune ce genre de réveils, mais ça coûte une blinde… ‘Faudra un jour que ma mère comprenne le principe de rentabilité un jour, ça en devient limite cartoonesque la manière dont je me réveille.

Bon, c’est le moment de se préparer. J’ai une course quotidienne à faire. Je sors alors du lit et m’étire dans la cabine de douche, faisant trembler mes cristaux de carbone qui brisent ma peau lisse et cliquettent.
Bonheur, en plus de me réveiller ça me permet de me m’aérer les atomes qui ont passé toute la nuit resserrées. Bah quoi ? Vous vous lavez bien les dents qui ont passé toute la nuit avec votre salive stagnante dans votre bouche, au point de devenir pâteuse le lendemain non ? Oui ce sont des atomes purs donc il y a pas de dégradation quelconque, mais certaines molécules peuvent quand même s’y fixer et garder des odeurs indésirables. Ce qui est assez embêtant quand on veut, quitte à être un « caillou », être au moins propre.

Mes cheveux arrangés devant le miroir et mon visage révisé de potentiels changements inattendus durant la nuit, je mets ma tenue de sport en faisant de mon mieux pour ne pas la déchirer. Décidément c’est vraiment relou la vie en société, devoir mettre un uniforme… Heureusement qu’une fois héros ce sera vraiment rare que je porte des vêtements. Une fois prêt je me sors après avoir vérifié rapidement l’heure sur ma montre : cinq heures cinquante-cinq, tout juste l’heure me permettant d’arriver à temps au terrain d’entraînement pour mon entraînement quotidien. D’habitude je fais le tour du campus, mais je veux savoir comment je peux m’améliorer, pas juste m’entretenir. Je remplace donc ma tête humaine par mon casque avant de sortir du bâtiment de l’internat, comme à chaque fois que je sors d’un bâtiment de UA. Évidemment après avoir mémorisé l’état de mon visage et mes cheveux.

Mes affaires de rechange posées à quelques pas des voies de course – parce que je ne peux évidemment pas passer toute la journée en tenue de sport – je commence mon échauffement et étirements. Et mes atomes bien rangées, je fais quelques tours de piste pour m’habituer à la texture du sol. Cette matière caoutchouteuse est décidément extrêmement fragile, je ne peux absolument pas utiliser mes crampons au risque de la déchirer…
Bon aller… je dois prendre mes automatismes de course…



Oh punaise elle m’a fait peur celle-là. Wendy, une camarade de classe à l’Alter intéressant et aux aptitudes plutôt élevées pour la moyenne. Très dévouée dans ses études, peu d’élèves de la promo peuvent rivaliser en termes d’heures libres passées à travailler. Je me souviens qu’elle s’entraînait aussi quotidiennement mais je ne pensais pas que c’était ici. Et encore moins qu’elle m’aborde maintenant… je vais devoir parler si je veux lui répondre en continuant de courir. Quelques secondes s’écoulent le temps que je forme mon système de parole, tandis que d’un doigt levé je lui fais signe de patienter pendant notre course :



Au moins, le bon point, c’est que je m’entraîne à parler à quelqu’un en courant. J’espère que j’aurai d’autres occasions à l’avenir.

"Avec Wendy"

Elle marque un léger temps de pause, peut être pour reprendre son souffle, l’air légèrement sérieux, tandis que je regarde tour à tour devant et ma camarade. Même si en théorie je pourrais séparer la vue de mes deux yeux tel un caméléon. Mais bon d’un point de vue social ce n’est pas très attirant de ce que j’ai pu remarquer avec l’expérience. Un sourire se redessine à son visage avant de continuer :



Oh je vois qu’elle a le genre de détermination que j’aime, parfait. Elle commence même à prendre les devants :



Un défi de course hein ? Pourquoi pas. Ce sera l’occasion d’apprendre à doser mon endurance lors d’une course poursuite.

Règles de la course:

Je commence à me pencher davantage, bien plus qu’une personne normale le ferait, et prends graduellement de la vitesse. Mes pas sont de moins en moins fréquents afin d’économiser mon énergie et la trajectoire de mes jambes est de plus en plus elliptique. Il n’est pas question que je me défile devant un tel défi ! Ne m’attends pas Wendy, j’arrive !
Un sourire se dessine à mes lèvres tandis qu’un petit rire en sort, enfin une camarade qui sait me défier !

"Avec Wendy"

Quelques pas plus tard, j’atteins la hauteur de mon adversaire harpie, décidément toujours enjoués de ce défi surprise. Elle me lance alors d’un air rieur :



Un sourire tout aussi amusé se dessine sur le casque qui se scinde alors légèrement en réponse à sa provocation. Les derniers échanges de regards faits, je m’amuse à changer la forme de mon « couvre-chef » en tête de missile, jusqu’à le faire couvrir mes épaules. Toujours le sourire :



La poussière vole alors sous notre impulsion combinée, tandis que je sens le sol rugueux et adhérent profiter un maximum de sa plasticité à la limite de la déchirure. Wendy a des pattes puissantes, moi un poids lourd à transporter au quotidien. Je sais que je pourrais partiellement m’en délester et courir bien plus vite mais je veux savoir si je peux toujours rivaliser à mon poids maximum. Je n’ai pas souvent l’occasion d’affronter à la course une camarade de classe de sa trempe. Et dans la joie surtout. Le genre qu’un témoin externe de la scène pourrait trouver bizarre, comme le technicien de surface qui nous dévisage actuellement. « Depuis quand des élèves de la 1-A adorent autant courir ? Ne travaillent-ils pas assez lors des cours héroïques pour en faire la dernière occupation ? À cette heure si matinale de surcroît ? » doit-il se dire depuis les gradins qu’il nettoie si minutieusement. Ou peut être est-ce mon effrayant sourire s’approchant de lui à vitesse grand V qui le pousse à se cacher derrière l’un d’eux ?

Malheureusement je ne peux parler pour le moment, mais je me contente de sourire comme je le fais toujours lorsque je prévois de dépasser mes limites. Un sourire certes effrayant pour certains, mais pourtant celui qui me vient toujours naturellement peu importe la raison.
Nous sommes au coude à coude et il semblerait que l’issue de cette première bataille soit à qui pourra maintenir cette cadence le plus longtemps, du moins c’est ce que je vais essayer de faire comprendre en ne lâchant pas un seul pas d’avance à mon adversaire. Quitte à empresser davantage la course pour nous pousser dans nos derniers retranchements.

Après tout, on se pousse à bout ou on ne le fait pas, n’est-ce pas ?

"Avec Wendy"

Ayant passé des années à accepter le polymorphe que je suis, j’ai appris à laisser libre cours mon imagination dans le seul et unique but de m’amuser. Car s’il y a effectivement quelque chose que j’adore, c’est adopter une forme respectant la thématique de l’instant. Ça ne m’arrive pas souvent en cours car on nous demande un certain sérieux (à la limite pour déstabiliser un adversaire), mais dans ces petits moments où se mêlent jeu et exercice mes pulsions créatives prennent forme assez facilement. Quitte à parfois effrayer sans trop le vouloir comme ça a dû être le cas pour ce pauvre spectateur, lui qui n’a plus seulement cherché à se cacher mais à carrément monter au dernier rang des gradins de peur que je le rejoigne et le mange tout cru.

Je pensais jeter un œil vers la harpie pour prendre la température mais il semble que ce n’est plus nécessaire. En effet, malgré mes efforts et attaques successives, son poids plume et mon attention légèrement détournée me coûtent quelques pas de retard. Vilain Logan, un Héros se doit de rester concentré lors de ses entraînements, même s’il doit littéralement avoir une tête de missile. Cela dit, je ne peux pas rester retardataire sinon ce sera sa victoire. Et je ne me sens pas sortir l’excuse du gars distrait alors que l’on est censés tous les deux fournir notre maximum, ce serait bafouer ses efforts. Je vais donc devoir gagner ce tour.



J’imagine que je n’ai pas le choix alors…

À chaque pas, un épais nuage noir me recouvre en se dispersant la seconde d’après. Commençant par la tête, qui retrouve une forme normale au fur et à mesure que je perds ce surplus de carbone, finissant par les jambes en passant par le reste du corps. Une traînée se dessine sur mon passage et mes pieds laissent une trace considérable sur le sol. Mon corps semble plus simple, épuré et à la limite du minimalisme, mais c’est le strict nécessaire dont j’ai besoin pour sprinter bien plus vite que jusqu’à lors. Et je dois avouer, je commence à sentir mes forces s’amoindrir. Après ce tour il faudra impérativement que je me calme, sinon je ne pourrai plus tenir mes atomes en place du tout. Je me suis certes libéré d’un poids mais je n’ai pas une endurance infinie non plus.

Cette fois mon sourire disparaît pour laisser place à mes yeux qui grandissent en taille, prenant presque la moitié du visage chacun. Un peu comme sur ces masques de super-héros dans les bandes dessinées, où le contour des yeux prend la moitié supérieure du visage. Avec cet espace alloué, je vais pouvoir regarder la sprinteuse aux serres acérées sans avoir à trop tourner la tête.

Vas-y, fais-moi voir ce dont tu es capable aussi dans tes derniers retranchements. Sais-tu utiliser ton Alter à ton avantage sur une course ?

"Avec Wendy"

Plus que quelques mètres, c’est le moment où jamais Wendy !

FRRT FRRT

Il ne faut même pas une demi-seconde pour que le son s’accompagne de mes prédictions : elle vient de plonger à ras du sol pour me prendre de vitesse. Exactement ce que j’attendais de sa part ! Pour la peine moi aussi je me rapproche du sol, formation quatre pattes !
Je m’élance alors aussi vers l’avant et développe mes bras pour qu’ils aient la même force que mes jambes qui s’atrophient légèrement par la transmission d’atomes. Je gagne en vitesse et rattrape la harpie tel un guépard noir poursuivant sa proie mais le résultat de cette course reste complètement incertain.

Cinq mètres, l’écart que sa projection creusait se stabilise pendant ma transformation.
Quatre mètres, je reprends un peu de vitesse mais la fatigue se fait lourdement sentir.
Trois mètres, notre écart diminue mais ce n’est pas suffisant.
Deux mètres, je concentre mes dernières forces et bondis à nouveau pour rejoindre mon adversaire.
Un mètre, nous sommes tous les deux à la ligne d’arrivée et notre vitesse prodigieuse provoque un courant d’air sur notre passage.

FRRRRRRRT

À peine la ligne d’arrivée franchie, Wendy fait la bise au caoutchouc sur encore quelques mètres pendant que je dérape littéralement sur mes quatre pattes qui laissent un long rail de carbone sur mon passage. Je pense que je vais devoir faire un peu de nettoyage avant de partir, je ne peux laisser le stade dans l’état qu’il est. Entre mes atomes encore en suspens dans l’air et ceux au sol, il manquerait plus que les prochains utilisateurs s’intoxiquent au monoxyde de carbone qui risque de se former durant la journée. Je rejoins ma camarade, restée au sol le sourire aux lèvres déformées par la fatigue, et reprends forme humaine :



Hmmm… si j’ai bien fait attention, c’est… effectivement elle qui a gagné. À rester entièrement concentrée sur ses efforts elle s’est économisée sur ce que j’ai fait à sa place : m’assurer qui gagne.
Je souris à mon tour un peu gêné, c’était une très bonne course et je serais ravi de recommencer, mais je ne peux plus parler avec le peu de carbone qu’il me reste. À moins de lui montrer mon noyau et tout le système vocal… La lumière se trouve dans mon dos donc elle ne pourra pas me lire, j’imagine que je n’ai pas le choix le temps qu’elle retrouve des forces.
Mon torse rétrécit alors jusqu’à laisser voir deux grosses formes comme des poumons avec une partie du noyau qui ressort en partie sur le ventre :



Je lève le pouce en signe de satisfaction et m’écroule au sol sous la fatigue, toujours souriant mais sur le dos à quelques pas d’elle en la regardant :

"Avec Wendy"

Un léger rire s’échappe entre deux gémissements de la bouche de ma camarade. À croire que mon attention malgré notre état déjà lamentable s’avère assez coquasse :



Il est vrai que vu ainsi, elle a plus à craindre de l’infirmière que du carbone en suspension dans l’air. Déjà qu’il lui arrive d’y passer plusieurs fois par semaine, quand elle saura que cette fois c’est parce qu’elle a voulu faire la course avec autant de vergogne que moi-même… même moi j’en sens le remontage de bretelles comme si ma mère avait pris possession du corps de la soigneuse.

Wendy, malgré ses blessures, se relève tandis que je fais de même avec son aide. Heureusement que j’ai purgé une partie de mon corps sinon je ne serais même pas sûr de pouvoir me relever, mais malheureusement je vais devoir ramasser ce que je peux sinon je risque la punition :



Et moi donc…

Elle fait quelques pas puis m’adresse un dernier message avant de quitter définitivement le lieu :



Je lui réponds du mieux que je peux, pouce de nouveau en l’air et le buste droit, sans doute par fierté ou plutôt respect de ce moment mémorable, au moins pour nous :



Mais j’espère surtout que j’aurai pas à faire tout ce nettoyage à chaque fois, vu l’état présupposé dans lequel je serai. Je me change une dernière fois pour devenir un aspirateur et commence alors le nettoyage le plus rapide possible afin de ne pas rater l’heure de cours.

C’est si lourd… pourvu qu’on ne me réveille pas pendant les pauses de récréation, je sens que j’aurai besoin de ce repos, coûte que coûte. En plus je dois porter des vêtements…

Pendant ce temps notre spectateur ressort la tête des gradins, guettant la fin mais n’osant pas descendre en me voyant en bas. Ma trompe de fortune arrête net son aspiration et pointe dans sa direction :



Et c’est ainsi qu’une habitude est née entre Wendy et moi… Évidemment, c’est aussi la raison de mes repos intempestifs lors des horaires de pause, mais c’est aussi un entraînement dont je n’ai jusqu’alors jamais eu l’idée et qui, en contrepartie, favorise mes aptitudes de régénération en plus de mon endurance. Et l’endurance semblant tout autant problématique pour elle que pour moi…