-Madame Lockout, vous n'êtes pas venue à votre rendez-vous. Les examens médicaux préliminaires sont importants avant avant une opération vous savez ?
-Ah ça, je peux pas venir, on reporte ?
-Hum oui. Que diriez-vous d'en fin de sem-
-Trois mois ? Ouais ça me paraît pas mal ! Quatre mois ! Nan, cinq !
-...
-Ouais bon ça va, fin de semaine si vous voulez...
*click*
-... Comme si j'allais pointer.
Celeste était en patrouille au moment de recevoir cet appel. Une alarme constante qui lui rappelait pourquoi elle était venue au Japon : son opération du coeur, censée améliorer les performances de son alter. Mais l'héroïne n'était toujours pas résignée à en arriver là. Elle comptait bien vaincre ses problèmes par elle-même avant d'être ouverte ! Pour ce faire, elle avait commencé tous les soirs à s'entraîner sur ses grosses transformations, tentant aussi bien qu'elle le pouvait d'en produire deux en même temps... Mais c'était bien trop fastidieux et elle sentait son coeur s'emballer à chaque fois.
Elle avait donc passé ce coup de fil dans une ruelle pour éviter que des rumeurs ne puissent circuler. Après avoir raccroché, elle poussa un soupir avant de se gratter le sommet du crâne. Combien de temps pourrait-elle repousser l'échéance ainsi avant que l'on ne la traîne en clinique par la queue de cheval ? Elle s'étira et retourna dans la rue principale, observant autour d'elle.
-Mmmmh... Eh beh c'est pas bien agité aujourd'hui. Je vais commencer par un tour à pieds, je verrai pour les toits après.
Peut-être ferait-elle une petite session de break-dance en pleine rue si rien d'intéressant ne se passait. Dans tous les cas, depuis son arrivée, aucune mission d'ampleur ne lui avait été confiée et elle était condamnée à surveiller les rues pendant un moment, sautant sur la moindre occasion criminelle pour se donner un peu de divertissement... Ce qui n'était arrivé que trois fois. Le Japon était un pays calme de manière générale, les crimes se passaient surtout dans les bâtiments, beaucoup plus rarement dans les rues contrairement à ses habitudes d'Harrisburg. La criminalité là-bas était bien plus affichée, bien plus fréquente.
Mais peu de crimes signifiait plus de planification, moins de coups de tête et sûrement une meilleure préparation. Pensant cela, Celeste demeurait relativement vigilante. Surtout du fait qu'elle ne pouvait s'ôter de l'instinct cette sensation étrange... qu'elle ne parvenait que difficilement à identifier.
-Don't worry... you're just not used to be out of Harrisburg... Doesn't mean you're followed every step you make.
C’est drôle comme une journée peut changer du tout au tout en un rien de temps. Il y a une heure, je flânais tranquillement en centre-ville pour faire le tour des boutiques et voir si y’a pas des trucs intéressants à acheter. Et maintenant je suis cachée derrière trois poubelles, à surveiller ma cible qui vient suspicieusement d’entrer puis de sortir d’une ruelle, son téléphone à la main. Malheureusement, y’avait pas de coin assez sûr à proximité pour que je puisse écouter…
Note pour moi-même: Trouver un moyen de toucher ce téléphone pour récupérer le souvenir.
Maintenant que la cible est dans la rue, j’abandonne ma “cachette” pour entamer une filature plus classique, c’est à dire en marchant dans la rue comme une passante tout à fait normale, gardant l’héroïne du coin de l’oeil tout en affichant le moins d’intérêt possible pour elle.
… “Pourquoi ?”, pourait-on se demander. Eh bien c’est très simple: ce matin je l’ai vue sur le net dans mon fil d’actualité, et si je n’y ai pas spécialement prêté attention dans l’immédiat, le hasard a fait que sa patrouille passe par la rue principale au moment où je m’y trouvais. Du coup ça m’a intrigué et je me suis dit “hey ! Ça fait longtemps que j’ai pas stalké une super, faudrait pas perdre la main !”, et voilà. Mh? Non non, y’a pas d’autre raison. ...Booon, ok… son apparence bestiale m’intrigue un peu et j’espère secrètement voir si elle a des comportements s’approchant de celui d’un animal. Et c’est encore mieux si elle le cache. Raison de plus pour mettre la main sur ce téléphone, qui sait ce qu’il s’est passé dans cette ruelle?
Pendant la marche, je prend note de mes observations dans mon petit carnet, sans quitter la bestiole du coin de l’oeil. Le genre de notes qui iront accompagner les différentes photographies de ce sujet dans mon journal… et parlant de photographie, il faut que je sois prête. Je prend donc mon smartphone en main et place les écouteurs à mes oreilles pour faire genre “j’écoute de la musique”, et le sors de temps en temps pour faire semblant de consulter mes messages. Alors qu’en fait la surnommée Boom Beast se fait photobombarder sans aucune pudeur. Bon, d’habitude pour la photo je préfère largement mon polaroïd mais… ce serait moins discret.
C’était beaucoup, beaucoup, beaucoup trop cool. Je peinais à retenir les palpitation qui filaient jusque dans mes doigts. Impossible de m’y habituer ou de me dérober. La coïncidence était trop belle, c’était forcément un signe. Alors, il n’était pas tout à fait prévu non plus de me mettre à suivre une héroïne mais avec un alter aussi cool, j’aurais peut-être aussi suivi une civile. S’il y avait une chance qu’elle puisse l’utiliser en public bien sur. Ce qui aurait été… illégal… Mais super cool quand même.
Les transformations bestiales, je connaissais bien. Il suffisait de voir l’alter de ma mère qui pouvait transformer tout ou partie de son corps en grizzli. Mais Boom Beats c’était encore autre chose. En plus d’avoir constamment cette apparence de raton laveur absolument adorable, pouvait mimer plusieurs sortes d’animaux, ce qui était, à nouveau, beaucoup trop cool. Alors au moment de reconnaître sa queue de cheval, ça avait été plus fort que moi.
Trouver des lunettes de soleil, une casquette et un masque dans ma course poursuite avait été plus compliqué. Casquette jaune, masque noir et lunettes roses, je n’avais pas eu le luxe de faire la difficile, en particulier quand en essayant de les mettre, une des branches des lunettes s’était cassée, me condamnant à les tenir devant mes yeux comme s’il s’agissait d’un monocle. La casquette, un peu trop grande avait du passer par-dessus mon casque plutôt qu’en dessous. J’avais lu suffisamment de manga pour savoir que c’était à peu près comme ça qu’on ne se faisait pas remarquer.
J’avais même failli la perdre, jusqu’à ce que la vois sortir d’une ruelle. Un grand soulagement pour la fan que j’étais qui pouvait reprendre sa filature, ma main libre broyant le bas de mon pull oversized comme une boule anti-stress, un moyen aussi d’éviter de sautiller sur place ? Les photos et les interview étaient toujours sympas à lire mais qu’était-ce quand on avait l’occasion de voir le personnage en vrai ?
J’avais besoin… d’informations, de détails qui pourraient m’aider dans mon hobbies dans le journal de l’école. Et ne pas directement lui sauter dessus avait quelque chose d’assez excitant. J’avais bien trop travaillé ma pause du « non, non, je ne fais rien » pour manquer cette opportunité.
La sensation instinctive désagréable de Celeste ne s'estompait toujours pas. Mais sachant parfaitement que cette dernière était faussée, elle décida de purement et simplement l'ignorer et de continuer sa patrouille. Et pour étouffer d'autant plus son sentiment d'être suivie, elle décida qu'elle ferait des acrobaties ! Elle sortie une paire d'écouteur, mettant l'un d'eux dans une oreille... puis ses jambes prirent la forme de celle d'un kangourou. Elle lança une musique, commençant à claquer des doigts.
Elle prit appui sur une voiture avant de se propulser contre un mur avant de rebondir vers un lampadaire. Elle s'y accrocha, se faisant tourner dessus avec l'élan et se propulsant plus haut vers le milieu de la rue tout en marquant des poses bien visibles en l'air, cherchant bien entendu à capter l'attention. Retombant, elle se rattrapa sur un autre réverbère avant de cette fois se laisser retomber sur une poubelle et décidant de sauter de support en support, variant des mains aux pattes afin de rebondir sans s'arrêter tout en tâchant d'avoir le style en le faisant.
Le meilleur moment pour remarquer deux étranges énergumènes dans sa vision périphérique... mais elle n'y fit pas plus attention que ça. Elle préférait se concentrer sur ses figures et et les potentiels actes répréhensibles qu'elle pourrait entendre.
En attendant, elle se retrouva de nouveau sur le trottoir, changeant ses pattes en celles d'un lapin et se permettant de bondir en rythme sur sa musique à travers les gens dans la rue... frôlant y compris ses deux stalkeuses qu'elle traita simplement d'un finger gun et d'un clin d'oeil comme tout le monde. Après tout, elle n'avait pas encore remarqué qu'elle était suivie.
Une fois la foule passer, ses bras et ses jambes prirent l'apparence de celle d'un gecko, lui permettant de grimper les murs pour se retrouver sur un toit. Elle décida de ralentir la cadence, reprenant son apparence habituelle. Elle était bien visible d'en bas et marchait normalement, sautant occasionnellement d'un toit à l'autre tout en surveillant attentivement les rues.
-Hehehe, les Tokyoïte sont pas l'habitude on dirait, j'ai l'impression d'être deux ans en arrière !
En effet, quand elle commençait ses activités héroïques à Harrisburg, elle avait tendance à faire sursauter vu qu'elle bondissait partout.
Dernière édition par Celeste Lockout le Dim 4 Juil - 22:40, édité 1 fois
Moi qui m’attendais à une filature tranquille, à suivre une super au travers des rues de Tokyo, voilà qu’elle se met d’un coup à faire un spectacle ! A bondir dans tous les sens comme ça, il devient impossible de la louper et ça me donne une bonne excuse pour la photographier… par contre avec son agilité j’espère qu’elle va pas filer ! Je vole pas moi ! Note sur Boom Beast: Aime faire des shows acrobatiques en pleine rue?
Héhé, en tout cas ça a l’air vachement amusant d’être une vraie héroïne. Plus personne pour nous embêter quand on utilise son alter… le rêve ! Je repense à tous les adultes qui m’ont grondée dans ma vie, quand je me servais du mien “sans raison acceptable" qu’ils disaient. Pfeuh ! Ils verront bien quand j’aurais ma licence. Mais voilà que la super-rongeur grimpe sur les toits maintenant. La suivre va devenir plus dur… Quoique. Il me vient une idée. Une idée probablement stupide et insensée. Mais c’est exactement pour ça que je vais foncer dedans.
Je rejoins en vitesse la ruelle la plus proche, repère un escalier d’évacuation, quelques irrégularités dans le mur… Parfait. Ni une ni deux, j’escalade la paroi en m’aidant des prises, rejoint l’escalier, et commence à monter à toutes jambes, espérant que personne ne m’ait repérée. Une fois tout en haut, il me suffit de m’accrocher à la fenêtre du dernier étage, et de me hisser sur le toit, après m’être assurée que la voltigeuse ne regarde pas dans ma direction. Elle veut jouer sur les hauteurs? Challenge accepted.
Une fois en haut, je me planque derrière une sortie d’aération et reprend l’observation de l’héroïne acrobate, d’encore plus près qu’avant à présent. Bon, ça me permet aussi de constater qu’elle saute vachement mieux que moi et qu’il faudra que je fasse un peu attention quand il faudra passer au dessus des ruelles…. Mais ça vaaaa.
J’étais un peu jalouse. Les alter de mutation et de transformation avaient ce côté impressionnant que le mien n’aurait jamais. Les alter à activation étaient un peu les sous-alter du monde esthétique. Enfin, pas tous, il suffisait de voir le style d’Endeavor. Mais sérieusement, même si je le voulais, comment pourrais-je rivaliser contre ça ? Me faire des bracelets en barre de fer ? Ce serait moche en plus.
Je l’admet, j’avais eu peur d’avoir été démasquée quand elle était passée tout près de moi. Mais au final ma motivation n’en était que plus grande. Car soit elle m’avait vu et me mettait au défi de réussir à la suivre, soit c’était un accident et j’avais quand même envie de la suivre. Sauf qu’avec les moyens du bord, il allait falloir être créative. Monter sur les toits m’aurait pris trop de temps, j’aurais risqué de la perdre. Ce qui ne m’empêchait pas de commencer par en bas.
A défaut de pouvoir sautiller comme un lapin ou m’élancer comme une cigogne, je pouvais me montrer créative. Les lunettes devinrent encombrantes au moment où je du commencer à courir. Leur seul abris, une poche arrière, bien trop petite pour y stocker quoi que ce soit, mais qui devrait faire l’affaire faute de mieux.
L’inconvénient de ne pas passer par les toits était la distance, plus grande à parcourir pour rattraper l’écart imposé par Boom Beast. Je ne pouvais pas toujours voir où elle était mais n’était pas du genre à se faire assez discrète, il suffisait de voir les réactions des enfants la pointant parfois du doigt pour savoir dans quelle direction je devais aller. Au moins, ma course d’obstacle ne se faisait pas trop remarquer à côté.
Une ruelle, puis une autre, j’enjambais une poubelle, les lunettes tombant derrière moi dans ma chasse, je freinais embarrassée, trottinant encore sur place. Je ne pouvais pas laisser de déchets au milieu d’une ruelle comme ça ! Bon, avec un peu de chance, elle avait ralenti le rythme là-haut, je devais donc avoir juste assez de temps pour revenir en arrière, ramasser les lunettes et les jeter. Si je les remettais dans ma poche, j’allais encore les perdre.
Une ombre passait au-dessus de moi alors que je me redressais. J’aurais juré qu’elle était déjà passée, j’aurais finalement réussi à la rattraper alors ?
Passé un moment, Celeste réalisa que les rues étaient relativement calmes et que personne ne comptait effectuer d'acte incriminant dans l'immédiat. Du moins c'était ce que l'on pourrait penser. En sa qualité polyvalente, elle avait vite appris qu'un crime se préparait et que tous les bandits ne jouaient pas au cowboy. Parfois, cela se jouait sur des micro-expressions, des intonations de voix, des gestes maladroits et autres. Ainsi l'une de ses leçons régulières avait été d'affuter ses sens animaux afin de ne RIEN laisser passer.
Sur sa tête, ses oreilles de raton prirent la forme de celles d'un lapin et ses yeux la teinte de ceux d'un vautour. Ce n'était pas aussi bien que ceux d'un aigle certes mais les rapaces se distinguent par leur vue affutée de manière générale. Celle des vautour sert principalement à repérer les cadavres et est couplée avec un cou très flexible. Mais bon, deux petites transformations, c'était déjà bien assez pour une patrouille.
*BONK* *CRUCK* *RRRROUROU* *Meow* *"T'étais au courant du dernier disque de-"*
Rien de bien passionnant à l'audio en somme. Quant aux visuels, elle pouvait apercevoir un homme fumer une cigarette dans une ruelle. C'était bien une cigarette, rien d'illégal. Cela dit, le Japon n'était pas censé avoir des coins fumeurs pour ça... ? Il fallait que Boom Beast revoit le code pénal au cas où. Sinon des adolescentes qui mangeaient des crêpes, d'autres qui la filmaient à qui elle envoya un baiser dans le vent... Beaucoup de pigeons, de chats, des "IRRASHAIMASE" à chaque ouverture de porte et autres vieillards promenant leurs chiens.
Et soudain. Un son très léger sur sa gauche. Venant d'un tuyau.
Elle tourna brutalement la tête avant de l'entement se lever pour s'approcher. C'était probablement un animal caché derrière la tuyauterie et elle ne le voyait pas encore.
-Hey hey... come on little guy... c'm'here...
Et comme elle l'avait bien envisagé, c'est un chat qui s'extirpa de là ! Il s'avança vers l'héroïne qui en profita pour l'enregistrer à la place de son kangourou et évidemment pour le caresser un peu.
Quand Boom Beast a brusquement tourné sa tête vers là où je suis, je me suis figée, passant en revue tous les moyens possibles et envisageables de fuir une héroïne avec un alter physique. Et vu le mien ainsi que mon absence totale d’équipement utile, on a vite fait le tour ! Du coup j’étais plutôt partie sur les excuses à trouver pour expliquer ma présence ici. Et c’est à ce moment que le chat est sortis d’un coin pas loin de moi, et que j’ai pigé ce que la super regardait vraiment. Fiou.
Par contre j’ai eu une super vue sur ses yeux de piafs et ses oreilles de lapin. J’imagine que c’est pas juste décoratif ces machins là… Ce qui veut dire qu’elle doit avoir des sens améliorés ou un truc du genre. Et vu ce qui vient de se passer, je suis pas super emballée à l’idée de rester trop près d’elle, sur le même toit. Tant pis si la filature perd en qualité, mes plans B et C sont vraiment pas assez viables pour que je prenne le risque !
Du coup, changement de toit. Sauf que là ma seule destination possible demande de sauter par dessus une ruelle, derrière moi… et autant je l’ai fait juste avant quand l’héroïne faisait son numéro de raton-kangourou volant, autant maintenant qu’elle a l’air de surveiller ça va être un peu grillé de prendre de l’élan, sprinter puis sauter. Va falloir faire sans !
A pas de souris je me faufile jusqu'au bord du gouffre histoire de voir un peu plus concrètement ce que j’ai à faire. Bon. Sans élan le saut va être dur maiiiis….au pire j’aurais qu’à me rattraper sur l’une des nombreuses imperfections du mur et remonter, nan? Ouais, voilà. Facile.
Un regard derrière moi pour m’assurer que BB ne surveille pas par ici, je fléchis les jambes quand mes pieds sont le plus au bord possible et… hop !
Entre ce toit et le mur d’en face, il doit y avoir moins d’une seconde de saut. Moins d’une seconde de battement durant laquelle je me retrouve entre ciel et terre, où la gravité a tous les droits et où la moindre erreur dans le geste précédent ou le geste suivant peut avoir de graves conséquences. Un bref instant durant lequel je me permet de regarder vers le bas, laissant une pensée éphémère envahir mon esprit aux réflexes exacerbés par l’adrénaline, comme un éclair jaillissant d’un nuage d’orage.
Qu’est ce que c’est que cette tenue ridicule?
Il faut dire que la fille en bas, qui vient de jeter quelque chose à la poubelle, a vraiment des accessoires zarbes sur sa tête. Ou alors ils sont mis bizarrement, s’pas comme si j’avais vraiment le temps de voir mieux. Sauf qu’à cause d’elle -oui, c’est sa faute-, je juge très mal mon timing et au lieu de chopper une zone où la paroi est partiellement effondrée, mes doigts atteignent une gouttière. Une gouttière fragilisée par le temps et mal entretenue, car à peine le temps de comprendre ce qu’il se passe qu’elle commence déjà à fissurer, s’affaisser, et moi à lâcher prise:
Dommage pour les lunettes mais il n’y avait pas grand chose à faire. Si les verres ne s’étaient pas fissurés en tombant, peut-être que j’aurais pu leur donner une seconde vie à coup de super-glu histoire de les laisser traîner dans un coin de ma chambre pendant des années avant de finalement un matin marcher dessus, réaliser leur existence et cette fois réellement les mettre à la poubelle. Ce n’était pas forcément très bon pour l’environnement. Bien que ce soit une de mes premières filatures mais il allait réellement falloir investir dans du matériel de qualité si je voulais recommencer.
Sauf que mes lunettes n’étaient pas la seule chose dans cette poubelle et qu’en dessous il y avait l’air d’avoir un sac ? J’avais plus important à faire mais ma curiosité était titillée. Jusqu’à entendre le cri d’une hystérique venant d’en haut. Ah oui, l’ombre... Non quand même… Pas ?
« Kyah !…. »
Etant celle qui s’était fait écraser comme une crêpe, mon cri fut le moins long. Ça devait avoir un rapport avec tout l’air qui avait été forcé hors de mon corps au moment de me faire aplatir. Ma casquette, propulsée par l’impact avait roulé à deux mètres de là, ne laissant que mon casque et mon masque. Etalée par terre, me sentant lourde, vraiment lourde et un peu sonnée, j’arrivais tout de même à distinguer quelqu’un, bien moins classe que Boom Beast mais quelqu’un quand même.
« Hngh… Ca.. va ?… »
Je m’adressais à elle, à moi, peut-être même à la poubelle à ce stade. La lumière perçant entre les deux immeubles de la ruelle provoquaient un contre jour particulièrement désagréable. Mais à vue d’oeil ça devait bien faire deux étages ? Pfouah, je prenais plusieurs grandes inspirations, arrachant cette fois mon masque pour mieux y arriver, avant de réaliser, plissant doucement les yeux, levant une main pour bloquer les rayons entre mes doigts.
« Tu es… On se connait ? »
Ce n’était pas vraiment une question. Je l’avais déjà vue quelque part. Au lycée mais pas dans ma classe. Enfin, soit c’était ça, soit c’était l’ange de la mort venu me chercher et attendant le parfait moment pour me l’annoncer. Mais étrangement, j’avais une préférence pour la première option. Je déposais ma tête à même le sol, ayant soudainement besoin de repos. De toute façon, mieux valait attendre qu’elle bouge d’elle-même.
Celeste profita longuement de caresser le matou, ce dernier se plaisant parfaitement à l'exercice et se frottant à la fourrure de l'héroïne pour en avoir plus. Ah si elle avait pu le garder... malheureusement il avait un collier et l'air relativement bien nourri. Bref avoir un petit compagnon poilu au Japon, ce ne serait pas pour de suite. Elle poussa un léger soupir en continuant de câliner l'animal quand... deux cris. Le tout fit lever brusquement la tête à l'héroïne et... sursauter le chat qui prit la poudre d'escampette.
-Hey wait- Oh...
Eh bien tant pis. Elle haussa les épaules et se dirigea vite vers la provenance du bruit, découvrant deux jeunes filles semblant s'être écroulées l'une sur l'autre. Constatant que les imperfections au mur, l'héroïne partit du principe que les deux lycéennes s'essayaient au parkour... et que ça ne s'était pas très bien passé. Elle fit apparaître ses pattes de guépard et se laissa tomber en bas.
-Bah alors les minettes ?
Prenant les adolescentes par le dessous des aisselles pour les aider à se relever, elle continua avec un sourire.
-Faites gaffe, si vous avez pas d'expérience, le parkour, vaut mieux commencer sur des skateparks pour s'entraîner ! Les toits c'est tentant mais c'est dangereux ! elle leur fit un signe de la main avant de conclure. Appelez une ambulance si jamais vous vous blessez !
Puis, prenant appui sur la poubelle, elle remonta jusqu'en haut en bondissant de mur en mur.
-Hmmm... Not the usual place to try some parkour...
Elle haussa les épaules, s'étira, puis recommença à marcher de toit en toit tout en surveillant attentivement les rues... Décidément, elle commençait à s'ennuyer ! Pas une seule mission d'envergure pour elle ! A croire que le Japon n'avait pas de sérieux criminels ! Elle se frotta la tête avant de mettre un peu de musique sur son boom box. Après avoir avancé quelques toits supplémentaires, elle plaça l'appareil sur le rebord et s'installa en tailleur à côté, observant tranquillement le quartier en bougeant légèrement la tête au rythme des basses.
Bon, première bonne nouvelle, je suis vivante. Secouée, endolorie de partout, mais vivante. C’est que...pendant un court instant tout a été super vite et… j’ai cru que ce serait pire que ça, une chute du deuxième étage. Mais pire que quoi en fait? Le sol est quand même super… mou. S’ptet pas normal. J’ai dû atterrir sur un sac… Mon cerveau commence à se remettre à jour, ce qui m’amène à une réalisation simple: Les sacs-poubelle ça crie pas quand on leur tombe dessus. Du coup j’ouvre les yeux, et… Ah.
...C’est définitivement pas un sac, mais la miss tenue-cheloue dont le style est encore plus perturbant de près. Non mais qui porte un masque comme ça, en plein milieu de la rue? Une joueuse de hockey en retard à son cours? Une voleuse qui s’apprêtait à commettre un cambriolage? Bizarre… un autre mystère à élucider.
Mais pendant que mon esprit divague, le coussin amortisseur vivant s’est mis à parler, et si j’aurais bien voulu lui répondre, mes lèvres encore sous le choc restent muettes. J’arrive juste pas à trouver les mots. J’ai p’tet laissé un bout de ma tête en haut?...
C’est d’ailleurs là que j'aperçois quelque chose descendre. Pas une deuxième personne qui tombe non, mais bien Boom Beast en personne qui s’approche de nous, probablement alertée par les bruits ! Si mon cerveau était en état de penser et mon corps de fuir, j’aurais sûrement paniqué… parce que c’est quand même la pire situation pour se faire griller en pleine filature par sa propre cible. Mais au final… Elle croyait juste qu’on faisait du parkour. Secouée, j’improvise des excuses: “Ah...euh...ouais, c’est vrai que c’était pas très prudent…”
Et c’est surement vrai. Mais je grimpe sur les toits quand je veux ! Ses conseils ayant réveillé la partie “rebelle” de mon esprit, dès lors que l’héroïne a le dos tourné, je lui tire la langue. Non mais !
Puis je me tourne vers celle qui a subit ma chute, et après un court instant de silence, explose tout simplement de rire. Un genre de réaction face au choc et au stress sans doute? Quoi qu’il en soit mes nerfs lâchent complètement et je ris à gorge déployée, allant même jusqu’à devoir me tenir le ventre pour pas tomber.
“Oh c’est pas vrai ! T’aurais entendu ton cri !”
Je reprend difficilement le contrôle de ma respiration, puis ajoute:
“Aaah...enfin, j’espère que je t’ai pas trop fait mal? Désolée, j’ai vu ton masque et ça m’a perturbée. Faut pas mettre ce genre de tenue en pleine rue ! Tu vas à un genre de bal costumé?”
Tout en lui parlant, je vais au bout de la ruelle et passe juste ma tête pour surveiller les toits. Prise par l’euphorie du moment, mes pensées sortent à voix haute:
“Bon, elle est pas partie trop loin… Ça devrait être gérable de la rattraper, mais faut vraiment que je fasse gaffe avec les sauts comme ça. Si elle me trouve encore tombée du toit sur lequel elle se tient ça va commencer à se voir…”
Elle m’a touchée… Elle m’a touchée !! Une seconde, puis deux, puis trois, il fallait un moment pour que la groupie en moi se taise. Bon, c’aurait peut-être été plus classe si elle nous avait attrapé comme ça avant que je ne me fasse écraser mais je savais que je pourrais chérir pour toujours cet instant passé sous l’aisselle de Boom Beast. Et même si je n’avais pas l’assurance nécessaire pour lui répondre, ou même comprendre vaguement de quoi elle parlait, c’était… comme un rêve. En un peu plus chaotique. Ses oreilles étaient encore plus adorables de près.
Ce n’est qu’en entendant celle qui m’avait écrasée se fendre la poire que je revenais à la réalité. Mon cri ? Ah… Oui, à bien y penser. Pourtant la gêne passa vite quand je réalisais que finalement, je n’étais pas la pire en la matière, je riais donc à mon tour, la pointant du doigt.
« Et toi alors ?! Ca ressemblait à quoi déjà ?! Waaaaah. »
Je plaçais mon meilleur jeux d’actrice dans cette imitation, cartonant un peu le rendu final, lui donnant l’allure d’un husky forcé à prendre son bain. C’est après avoir entendu ma propre imitation que je riais de plus belle. Ce genre de choses étaient contagieuses.
Je me baissais, ramassant le masque et la casquette, reposant celle-ci sur ma tête tandis que l’autre finissait inévitablement dans ma poche arrière. Je risquais de le perdre aussi à ce rythme. Le masque en question me paraissait être une bonne idée puisque c’était plutôt courant d’en voir dans les films mais j’étais peut-être la seule à penser comme ça ? Quand à la raison pour laquelle je le portais.
« Bah non, c’est pour… »
Je m’arrêtais dans mon élan. Elle avait beau être sympas, je n’allais quand même pas lui dévoiler que j’étais en train de suivre Boom Beast depuis tout à l’heure ? Non, elle me prendrait probablement pour une folle et… Non, quand même pas…
Dans un élan d’excitation, je me rapprochais soudainement, perchant ma tête au-dessus de son épaule pour voir la direction dans la quelle elle épiait. A ce stade je n’acceptais certainement pas non pour une réponse, m’éveillant déjà.
« Toi aussi tu la suit ?! »
Comme un murmure crié, une voix légèrement cassé. Mais si j’étais folle de joie de trouver une collègue dans de telles circonstances, je ne pouvais quand même pas dévoiler nos motivations à notre cible. Cette situation était excitante !
