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Comment en suis-je arrivée là ? [Solo]

Anastasia Rasperezapis
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Anastasia Rasperezapis
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Mar 5 Juil - 0:43
Encore 118 secondes. Dans 117 secondes, la cloche va sonner. J’écris toujours moins vite, quand je m’en rends compte. C’est parce que je déteste le bruit. J’ai l’impression qu’il va me tuer, à chaque fois.

La maîtresse ne veut pas que je mette des bouchons d’oreille.

Je la déteste.

90 secondes. Les cours, j’aime bien. C’est facile, je comprends, et ça m’occupe la tête. Mais l’école, je déteste. J’ai l’impression d’être sous l’eau. Et tous les autres savent nager, mais pas moi.

Je peux agiter les pieds très fort pour remonter, faire semblant de savoir nager, mais ça tient pas longtemps. Et personne comprend quand je retombe sous l’eau, et je les comprend pas non plus, mais je les entend quand même, même sous l’eau, et ça fait du bruit et je déteste ça le bruit.

70 secondes.

J’aime bien faire mes devoirs à l’avance. Comme ça à la maison je peux être avec Natasha. Ça m’agace, je suis jamais dans la même classe qu’elle à l’école. D’abord ils voulaient pas nous mettre ensemble parce qu’on est jumelles. Maintenant ils veulent pas nous mettre ensemble parce que Natasha fait pas ses devoirs.

La maîtresse ça la gêne quand je fais mes devoirs à l’avance. 62 secondes. Je comprends pas pourquoi ça la gêne. C’est pas logique. Elle nous donne les devoirs pour qu’on apprenne, pas pour qu’on s’ennuie pas à la maison. Donc ça va si je les fait à l’école. Je comprends pas pourquoi elle soupire quand je les lui montre.

J’écoute en même temps que j’écris de toute façon, vu que j’ai pas le droit de mettre mes bouchons.

En vrai je pourrais voir Natasha à l’école. Mais la récré, je déteste. C’est la pire chose au monde. Tout le monde crie. Si je bouge pas on se moque de moi, si je marche en rond dans la cour on se moque de moi, si je joue on se moque de moi. Je comprend pas. On se moque pas de moi quand je marche dans la rue ou quand je bouge pas dans ma maison, pourquoi est-ce que c’est pas pareil à l’école ?

49 secondes. Et puis surtout, quand on se moque de moi, Natasha vient m’aider et parfois elle se bat. Une fois, je me suis faite frapper, et j’ai trouvé ça horrible. Et je comprends pas pourquoi, mais quand Natasha se fait frapper quand elle se bat, c’est encore plus horrible. Ça n’a pas de sens, parce que c’est pas moi qui a mal, mais c’est quand même douloureux. J’espère que je comprendrais comment ça se fait, un jour. Mais en attendant, du coup, je reste en classe pendant la récré. Natasha vient me voir, parfois, mais y’a toujours ses amis qui viennent la chercher et du coup elle part.

Eux aussi, je les déteste.

Tout le monde veut devenir un super-héros, à l’école. 22 secondes. Moi pas. Au début je pensais que c’était parce que mon Alter est nul, mais en fait c’est pas ça. C’est juste que je comprends pas pourquoi les gens trouvent ça génial de se battre tout le temps. Moi ça me fait peur, qu’il y ait des héros partout. Ça veut dire qu’on est jamais vraiment tranquille. Quand je vois des héros je me dis que ça veut dire qu’il y a du danger.

C’est vraiment bizarre. Natasha elle est nulle à l’école, mais quand elle en parle j’ai l’impression qu’elle comprend mieux que moi. Elle sait nager, en fait. Je pense que ça m’énerve un peu. Pourquoi est-ce qu’elle a autant d’amis alors que à la maison elle agit comme un bébé ? Pourquoi elle a envie de courir dans la cour alors que en classe les professeurs vont la disputer ? Pourquoi elle dit toujours qu’elle comprend rien alors qu’en fait elle comprend tout ? Mais bon.

Natasha je l’aime.

10 secondes. Les autres ont déjà commencé à ranger leurs affaires, ou même à commencer à se lever. Je comprends pas pourquoi ils font ça, la cloche n’a pas encore sonné donc on est encore en classe. J’ai envie de leur dire, ou de sortir moi-même leurs affaires de leurs sacs. Mais j’avais fait ça dans mon ancienne classe en CE1, et après c’était horrible, ils rangeaient mes affaires avant la sonnerie pour m’embêter. Donc je ne fais rien.

DRIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIING !

Je plaque mes mains sur mes oreilles et je ferme les yeux en attendant que ça passe. Je sais que derrière, il y en a qui se moquent de moi en m’imitant. Mais ça, j’ai pas le choix. Si je le fais pas, je sais vraiment que je vais mourir.

"Tenez maîtresse."

Elle soupire, comme à chaque fois que je lui tends mes devoirs déjà finis.

"Tu sais, Rasperezapis, ça ne m’impressionne pas quand tu fais ça."

Je penche la tête sur le côté. Je la déteste quand elle dit des trucs que je ne comprends pas. Je m’en fiche de l’impressionner, je veux juste pouvoir être avec Natasha à la maison. Il n’y a rien d'impressionnant de toute façon, ils sont nuls ses exercices. Papa et maman disent que j’ai pas les mêmes exercices que les autres, que les miens c’est les mêmes que ceux des CM2. Mais je pense qu’ils disent ça pour me faire marcher.

"Mais j’ai fini donc je les donne."

Elle soupire encore. Entre ça et la cloche, j’ai vraiment très envie de pleurer. Je comprends même pas pourquoi j’ai envie de pleurer, et je pense que ça me donne encore plus envie de pleurer.

"Bien, bien. Allez, à demain."

"À demain maîtresse."

Je sors de la salle, et Natasha est déjà dans le couloir. Elle a pas le droit d’être là normalement, elle devrait sortir avec le reste de sa classe, pas avec la mienne. Mais j’ai remarqué que les professeurs disent rien quand elle vient me chercher. On me dit tout le temps que je suis forte, mais on m’explique jamais les règles comme ça. Heureusement Natasha les connaît alors ça va.

Je la prends par la main.


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Anastasia Rasperezapis
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Anastasia Rasperezapis
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Mar 5 Juil - 0:46
Ça y est, on décolle. C’est la première fois que je prends l’avion de ma vie. Direction Paris. Le bruit du moteur me donnerait probablement envie de hurler en temps normal, mais là, il me fait l’effet d’une douce mélodie, qui annonce un nouveau départ.

Je quitte enfin ce pays maudit. Ses héros et ses vilains à tous les coins de rue, qui se mettent sur la tête pour un oui, pour un non. Ses criminels qui nous tripotent dans le métro, quand les héros sont trop occupés à patrouiller le sommet des toits (?) pour les arrêter. Ses flics tellement dépassés que ça en devient ridicule. Ses rues noires de monde, polluées aussi fort par le bruit que par les gaz des voitures. Et adieu le niveau scolaire ridicule pour tout ce qui n’est pas de l’héroïsme ou de l’art. J’en viendrais presque à fredonner, mais je ne connais aucune chanson.

Bien sûr, ça me fait un peu mal de quitter Natasha. Elle n’a pas l’air d’être au sommet de sa forme, en ce moment. Elle a beaucoup pleuré à l’aéroport. Elle a toujours été du genre pleurnicharde, en privé. Papa et maman ont fait moins d’effusions. Ils ne vont pas vraiment me manquer, eux. Je ne sais pas trop pourquoi, j’imagine que beaucoup d’autres angoissent à l’idée de se séparer de leurs parents, même temporairement. Moi, j’avoue que ça me va.

Il ne faut pas que je pense trop au Japon. Ce pays me fiche le bourdon. Rien qu’y penser, ça me donne envie de me jeter de l’avion, là. Enfin, dans ce fichu pays, si je faisais ça, sans doute qu’un héros viendrait me réceptionner à l'atterrissage, et me priverait de la satisfaction insonorisée de la mort. À bien y réfléchir, dans un avion en partance du Japon, il devait même y avoir un ou deux héros à bord qui m’empêcheraient de me jeter du véhicule.

Je pense que tout le monde devrait avoir le droit de prendre sa vie en main. De se sauver soi-même, ou de se tuer soi-même. Sans qu’on n’ait besoin de se justifier. C’est ça, aussi, le souci des lois sur l’autodéfense. On n’a, techniquement, pas le droit de mettre du poivre dans les yeux du dégénéré qui se touche la nouille en nous regardant fixement dans les transports, puisque après tout, il ne nous a pas touché. Alors on attend les héros pour nous sauver, on attend les flics pour notre dépôt de plainte et on attend la permission de la maîtresse pour lui rendre nos devoirs.

C’est encore imprécis, tout ça, dans ma tête. Mais je pense qu’il y a matière à creuser, et à trouver quelque chose d’intéressant. J’espère que voir la France me donnera une autre perspective sur les choses au Japon. Mais maintenant, tout de suite, je n’ai plus du tout envie d’y penser.

Je regarde le pendentif que m’a donné Natasha, et je souris un peu. Je le serre dans mon poing avant de me laisser emporter par le sommeil. À mon réveil, je serais loin de chez-moi, mais je n’oublierais pas mes origines.


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Anastasia Rasperezapis
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Anastasia Rasperezapis
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Mar 5 Juil - 0:46
"Et c’est ça, tu vois, que Montaigne voulait dire. “Parce que c’était lui, parce que c’était moi”. Tu ne trouves pas ça incroyablement élégant, comme façon de dire les choses ? Beaucoup plus classieux que les discours interminables sur l’amitié qu’on nous sert dans la fiction."

"Je suis désolée, je ne suis pas extrêmement douée avec tout ce qui est sous-entendu, insinuations et tout ce qui suit, alors je vais devoir te le demander clairement."

Je remontais mes lunettes sur mon nez. Je les portais depuis quelque temps, pour éviter de fatiguer mes yeux. Je n’aime pas du tout ça, ça alourdit mon visage.

"...Est-ce que tu es en train d’essayer de me draguer ?"

Il explosa de rire. C’était un rire angoissant, qui m’évoquait le bruit de millions de clous qu’on ferait glisser contre une plaque de verre.

"Mh ? C’est si inconcevable que ça que quelqu’un me trouve à son goût ?"

J’avais acquis un semblant de répartie, à force. Enfin, le bruit des clous contre le verre s’arrêta, et il fit mine d’essuyer une larme de rire du coin de son œil sec.

"Non, non, pas le moins du monde, tu es charmante. Mais j’ai pour principe de ne pas courtiser les personnes ayant déjà trouvé chaussure à leur pied."

Mes sourcils se froncèrent. De quoi parlait-il ? Devant mon incompréhension, il pointa du doigt le pendentif autour de mon cou. Ah. Forcément. Je pris en main le bijou et le glissai à l’abri des regards, entre mon pull et mon t-shirt.

"C’est un cadeau d’un membre de ma famille."

De qui d’ailleurs ? Papa ? Maman ? Natalya, probablement.

"Adorable, ta famille vit ici ?"

"Au Japon."

Je crois qu’ils y sont encore ? Oui, ça fait sens.

"Le JAPON ! Tu es donc japonaise ! J’avais misé sur la Russie, à cause de ton accent, mais je suppose que les deux pays sont encore plus proches que ce que j’imaginais."

Il désigna de son long nez pointu les documents étalés devant moi.

"Mais si tu es japonaise, je ne comprends pas pourquoi tu es venue ici pour mener des études d’ingénierie super-héroïque. Pourquoi quitter la Mecque de l’héroïsme pour t’installer dans un tel coin ? Les États-Unis, encore, j’aurais compris… Oh, ne me dis rien ! Tu es poursuivie, c’est ça ? Par les yakuzas ?"

"Par le bruit. Et il m’a rattrapée, il semblerait."

À nouveau, les clous vinrent s’écraser sur la vitre.

"Hahaha ! Tu as fui le bruit en venant à PARIS ? Mais c’est incroyable, c’est comme l’histoire de ce marchand qui échappe à la mort qui l’attend à Damas, et se réfugie à Alep."

Il tira une chaise vers lui et s’assit à ma table. À cet instant, j'ai compris quelque chose. Si je lui demandais, ouvertement et sincèrement, de partir, il le ferait, et ne me rendrais plus jamais visite.

Mais… C’était la première fois que quelqu’un ici s’approchait de moi avec des intentions que j’identifiais comme étant purement amicales. J’étais déjà ici depuis plusieurs années, et je n’avais pas un seul ami. Si je voulais survivre à toutes ces années d’études qui m’attendaient, peut-être valait-il mieux lui laisser une chance. Sinon, je ne pourrais jamais vraiment mettre le Japon derrière moi.

"Anastasia Gennadovna Rasperezapis."

"Enchanté, Anastasia. Moi c’est ■■■ ■■■■■■■. Mais tout le monde m’appelle Leduc."


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Anastasia Rasperezapis
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Anastasia Rasperezapis
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Mer 6 Juil - 22:08
Ça s’apparentait à une expérience hors-corps. J’avais le sentiment de me regarder agir, comme depuis une caméra placée à un mètre de ma nuque.

Soyons rationnelle. C’était mon domaine, la rationalité. Il y avait de très fortes chances pour que mon agresseur soit mort. Ce qui était un problème pour deux raisons. Tout d’abord, j’allais me retrouver dans toute une série de problèmes judiciaires. Ensuite, ça voulait dire que l’objet de ma thèse était mal calibré.

Qu’est-ce que ça voulait dire ? Est-ce que c’était simplement une question de quantité de carburant ? Non, j’avais mis la même quantité que pendant les essais. Voilà, j’avais réservé un vol de dernière minute pour Naples sous le nom d’Amélie Chevalier. Décollage dans une demi-heure.

"Taxi !"

Est-ce que l’Alter de ce type augmentait l’intensité des flammes environnantes ? Non, c’était idiot, il générait clairement de l’énergie avec ses mains. Ou il intensifiait tous les types d’énergie ? Arrête Nastia, tu rejettes la faute sur des improbabilités statistiques absolues. Personne ne m’avait vue, sinon j’aurais été arrêtée il y a quelque temps déjà. Mais qu’il soit mort ou qu’il survive par miracle, une enquête allait être lancée.

"Je paye en liquide, gardez la monnaie."

Il était obligé de prendre l’argent tout en touchant ma main ? Je détestais ça, qu’on me touche. Et voilà que ça m’empêchait de penser droit. Est-ce que j’avais appuyé bien plus fort que ce que je ne croyais ? Mon capteur haptique était-il plus sensible que ce que j’aurais pu croire ? C’était ça, le souci de tester ses propres inventions destinées à des super-héros quand on était incapable de soulever cinq kilos.

Encore 10 minutes avant l’embarquement. Juste assez de temps pour réserver un bateau depuis Naples pour… Hmmm… La Grèce. À cette période de l’année, il n’y avait pas encore beaucoup de touristes dans les villes du bord de mer. Allons donc à Athènes, sous le nom de... Rita Olsen, dirons-nous. Mais tout de même. Cette puissance de feu excessive, ça avait de quoi me rendre dingue. Est-ce que les essais successifs avaient endommagé l’embout de l’arme ? J’aurais dû être plus prudente et recréer un prototype de zéro.

Mon portable vibra. Je le glissais hors de ma poche.

Le jury t'attends.
14:40


14:41
Je pars. Supprime cette discussion et mon contact, je n'ai jamais existé.


Comme vous voudrez.
14:41


Un jour, je lui revaudrais ça. En attendant, je le quittais pour toujours.

En deux clics, je retirais la carte SIM de mon téléphone et la brisais entre mes doigts. J’utiliserai le wi-fi des aéroports pour mes prochains déplacements. De toute façon, mes tickets pour Naples et Athènes étaient déjà sur mon portable.

Et si c’était un tour de mon esprit apeuré et que les flammes n’étaient, en réalité, pas si massives que ça ? Non, bien sûr que non, ça c’était n’importe quoi. Je n’avais pas mené le stress test assez loin lors des phases de prototypage, voilà tout. 50 tirs d’essai, ce n’était pas assez, la prochaine fois j’en ferais le double.

L'avion décolla, laissant derrière moi la France, Leduc, mon master, et tant d'autres choses auxquelles je ne pensais déjà plus du tout.


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Anastasia Rasperezapis
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Anastasia Rasperezapis
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Lun 27 Fév - 14:55
Je suis en plein cauchemar. C’est ça, je suis en train de dormir après avoir englouti un kilo de somnifères et la mort viendra bientôt me délivrer. Scientifiquement parlant, il n’y a aucune chance pour que l’après-vie existe. Mais là, j’espère que les bouddhistes ont raison, et que j’aurais l’immense privilège de me réincarner en phytoplancton. Là, j’ose à peine croire que je suis vivante, de toute façon.  Ça ne peut pas être la réalité. Ça ne peut pas…

"Dê-me um saco plástico."

Et les formules de politesse, c’est pour les chiens, peut-être ? Tu me demandes de te passer un sac plastique, sauf que c’est pas toi qui doit dérouler le distributeur rouillé, et tirer d’un coup sec, en t’y reprenant à trois fois pour en extirper un sac probablement pré-déchiré au vu de la qualité moyenne de l’engin. C’est pas toi qui va devoir changer les rouleaux après, pas toi qui est obligé d’ouvrir le sac avant de le donner au client sous peine d’avoir l’air "trop froide", "d’un robot" ou "d’une connasse". Et c’est pas toi qui doit te forcer à sourire tout le long, hein.

Enfin, je dis ça, mais moi non plus, je ne souris pas. De toute façon les gens ne me regardent pas. Je crois. Je ne sais pas. Je n’ose pas regarder quiconque dans les yeux.

"Certo."

Je lui glisse, son maudit sac plastique, et j’espère qu’il s’étouffera avec. Ou mieux, qu’il se rompe sur le chemin et que ses tomates-cerises s’écrasent sur le trottoir.

Il n’y a plus personne dans la supérette. Il y a match, aujourd’hui. L’affluence est près du stade, pas dans nos faubourgs minables. Je n’ai pas choisi ce jour au hasard pour quitter le Brésil. Moins de monde dans les moyens de transport qui quittent le pays, tout le monde s’entasse dans ceux qui y vont. Dans deux heures, j’aurais fini mon dernier quart ici. Mon boss m’a demandé de réparer un tuyau, dans l’arrière-boutique, avant la fin de la journée. Ce n’était pas stratégiquement pertinent de ma part, d’avoir montré que j’étais douée de mes dix doigts. On me prenait un peu trop pour un plombier travaillant à l’œil, ici. Mais j’ai du mal à faire semblant d’être mauvaise avec la mécanique.

J’effectue une combinaison de touches rapide sur l’ordinateur de la caisse, et la radio du magasin s’arrête. Je ferme les yeux pour profiter un peu de ce silence parfait. Il ne durera pas : mon programme est fait pour relancer le vacarme la prochaine fois que le détecteur de mouvement des portes automatiques s’activera. C’était la meilleure parade que j’avais trouvée. Lorsque mon patron avait réalisé que je coupais la musique pendant mon temps de travail, je m’étais prise un savon, comme une gamine, c’était détestable. Cet ignare ne comprend pas qu’une portion conséquente de sa clientèle potentielle était comme moi, et préférait faire ses courses en silence. Parfois, être accueillant, c’était ça, aussi. C’était se taire.

Je quitte la caisse et me glisse à travers l’arrière-boutique. Assise par terre, clé à molette en main, je me mets au travail.

Là, là, voilà, j’étais bien. Une pièce étroite, des outils en métal, quelque chose à réparer, un silence presque total…

Depuis quand est-ce que j’arrive à me satisfaire d’autant de médiocrité, au juste ?

J’ai un cerveau de la taille de Jupiter, bon sang, je ne suis pas faite pour survivre à coups de petits boulots ! Je suis faite pour travailler pour le bien de l’Humanité, pas gratuitement pour satisfaire un rustre trop pingre pour se payer un plombier ! J’aime le vrai silence, celui obtenu avec des bouchons d’oreille dans un atelier propre et insonorisé, pas… Pas ça, pas cette petite salle avec cette insupportable radio et…

La radio. Les enceintes s’étaient relancées. Il y a du monde dans la supérette. Je pousse un soupir profond et je dépose, à regret, mes outils.

"Estou indo."

Vu la musique, ils ne m’ont probablement pas entendu. Je me dirige vers la porte et… Et ça, ce n’est pas le bruit de clients qui font leurs courses. C’est le bruit de vandales qui dévalisent le magasin. Portes réfrigérantes ouvertes en grand, vacarme des produits jetés au sol et dans des sacs… Et ce nouveau bruit, c’est mes jambes qui tremblent et mon cœur qui bat à toute allure. Je déteste entendre mon cœur battre, ça me fait inévitablement penser au processus physique derrière les battements et… Franchement, ça me dégoûte un peu.

Je m’accroupis, me faisant la plus petite possible. J’entrouvre la porte du petit débarras qui me sert de cachette. J’arrive à peine à voir ce qui se passe dehors, mais je peux mieux entendre le chaos qu’ils causent.

Et une fois de plus, j’attends comme une incapable, terrée dans mon coin, tremblante de peur et de frustration. Sans arme, sans force, sans alliés. Les lois sur la défense légitime étaient moins strictes ici qu’au Japon, ou même qu’en France… Mais restait que je ne pouvais pas utiliser mes créations pour me protéger, même si j’en avais une sous la main. Et si j’avais un Alter de combat, je pourrais me gratter avec que ça serait la même chose. Toujours, partout, je devais attendre d’être sauvée par un héros. J’avais accumulé au moins trois anecdotes de ce style par pays, à force de barouder.

Même au Japon, il n’y avait pas des super-héros partout. Même All Might ne pouvait pas totalement vaincre le crime. Si le plus grand, le plus brillant, le plus exemplaire, le plus populaire de tous les élus du système ne pouvait pas parvenir à rassurer les citoyens comme moi… C’était qu’il était temps de tester un autre système. Et…

"Cara, não há ninguém aqui."

Mais si, bande de buses, il y a quelqu’un ici. Je ne peux rien faire, mais je suis là, alors dépêchez-vous de braquer ma supérette. J’ai bientôt fini mon temps de travail, de toute façon. Profitez, personne n’est là pour vous arrêter, pour vous dissuader de quoi que ce soit, ni même pour vous regarder de travers.

"Merda, o que fazemos, então?"

Et bien vous continuez de commettre des crimes, c’est quoi votre problème ?

"Ei! Lady-Paz!"

Lady-Paz ? C’est… Cette héroïne locale, qui faisait de son mieux pour arriver dans le top 500. Les gens l’aimaient bien. Je passe la tête, entièrement, à travers l’ouverture de la porte. Puis, doucement, je me glisse à l’extérieur, puis derrière un rayonnage. De là, en utilisant un miroir mural, je pouvais observer en toute tranquillité la scène qui se jouait, aux portes du magasin.

Quatre laquais se tenaient là, l’air confus et frustré, des sacs à demi-remplis de marchandise volée à la main. Devant eux venait d’arriver Lady-Paz, toute costumée. Elle était en train de les houspiller, trop rapidement et avec trop de jargon pour que mon portugais suive la cadence. Grâce au contexte, je pouvais comprendre les grandes lignes, toutefois.

Ces malfaisants ridicules s’étaient organisés pour mettre en scène une attaque de la supérette, le tout pour être capturés héroïquement par Lady-Paz, qui se serait arrangée pour qu’ils échappent à la justice, mais pour que sa popularité monte malgré ça. Mais en l’absence de public (cet endroit n’avait pas le budget pour des caméras de sécurité), le plan tombait entièrement à l’eau.

Alors c’était ça. L’aboutissement logique du système héroïque. Les super eux-mêmes se mettaient au crime, pour gagner plus de points imaginaires.

Si les civils étaient autorisés à répliquer avec leurs Alters, ce genre de plans minables n’aurait jamais germé dans l’esprit de ces simplets. Si les sans-Alters avaient des armes… Encore moins. C’était ça, le souci. Cette super-société faisait juste de nous des spectateurs du monde. Alors que tout le monde méritait d’en être acteur ! On pouvait soulever des roches par la pensée, et pourtant le travail manuel pénible n’avait pas encore disparu ! Générer de la matière à l’infini, et la pauvreté et la faim existaient encore !

Et moi, dotée d’un esprit génial, et d’un pouvoir qui me permettait de rendre caduque la simple idée qu’une feuille ait à être réimprimée ou gâchée, j’étais en train de me cacher d’une représentante de l’ordre adulée du peuple.

Je jette un regard à ma montre. C’est la fin de ma journée. Il est temps de prendre le train. Et de réfléchir à la prochaine étape de ce petit tour du monde. Une vision concrète d'un monde meilleur prend, de plus en plus, forme dans mon esprit…


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Anastasia Rasperezapis
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Mar 14 Mar - 2:02
"Mmmmh… C’est de la qualité."

"Bien sûr que c’est de la qualité, ça vient de chez moi."

"Mouais."

J’étais moins tétanisée que ce que j’aurais cru. C’était l’œuvre du masque. Du masque et des heures, infinies, de travail sur La Forge. Je la connaissais par cœur, désormais. Toutes les réponses de ces brutes écervelées sont parfaitement plaçables sur l’arbre de conversations que j’ai dessiné pendant des mois. Il me suffisait de donner la bonne réplique, celle qui correspondait au caractère d’Okuni Mikage, La Forge en personne, et tout se déroulait comme prévu !

Enfin, presque. J’avançais, pour l’heure, bien plus lentement que prévu. J’aurais pensé me propulser plus vite au sommet, mais force était de constater que le Japon n’avait pas changé depuis ma dernière visite, quand j’avais donné de quoi entendre à cette petite. Les criminels n’osaient rien, et malgré tout les héros ne parvenaient pas à totalement éradiquer les dernières racines du mal. En somme, c’était le pire de tous les mondes. En attendant, donc, je faisais des faux papiers.

Je n’aimais pas penser cela, mais c’était le domaine dans lequel j’étais la meilleure. Oh, j’étais une génie de l’ingénierie, la Michel-Ange de la conception d’équipements, à n'en pas douter. Mais voilà, pour ce qui était de la falsification, ça dépassait le génie pour atteindre le divin. C’était comme ça. Peut-être que quelqu’un me dépassera un jour en termes de maîtrise mécanique. Mais j’étais la meilleure faussaire possible, point. C’était dans mon sang, littéralement. En attendant de pouvoir pleinement frauder les assurances et les banques avec mon super-pouvoir, je devais accumuler de l’argent de poche. Et donc, vendre des faux papiers parfaits.

"C’est ma devise, après tout. La qualité super-héroïque, à votre service ! 💙"

Je l’avais travaillée, celle-là, avec la pose et le clin d’œil en prime, mais le truand ne sembla pas plus ému que ça. Tant pis. Je me raclais la gorge et reprit mon plan de vente.

"D’ailleurs, si vous avez besoin d’équipement sur-mesure pour aller avec vos Alters…"

"J’ai déjà dit qu’on était pas intéressés. Tiens."

Je me retins de lui envoyer un "J’imagine, vu le teint de votre langue, que vous préférez les béquilles biologiques à celles mécaniques" qu’il n’aurait de toute façon pas compris. Il me jeta une liasse de billets tout en se retournant. Malgré l’impolitesse du geste, je fus bien content qu’il me tourne le dos. Ainsi, il ne me vit pas pathétiquement échouer à attraper l’argent au vol, et me pencher pour le ramasser à même le sol.

"Pensez à l’offre de parrainage malgré tout…"

Il était déjà parti. Tant pis. Je rangeais la liasse dans ma valise et je me levais pour aller fermer à double tour la porte derrière lui. Aussitôt, un soupir s’échappa de ma carcasse, et je me laissais glisser au sol. Ou du moins j’essayais. Ma combinaison s’activa automatiquement, détectant une chute, et me redressa à grands coups d’impulsions électriques dans les nerfs.

"Чёрт…"

En deux manipulations sur l’interface à mon poignet, je désactivais les fonctions secondaires de ma tenue, laissais tomber mon masque sur un coussin, et allais m’installer devant mon ordinateur. Cette planque miteuse, sur le toit d’un cabaret… J’avais hâte de la quitter. De pouvoir offrir quelque chose de mieux à mes clients. Non pas qu’ils le méritaient. Mais ça n’était pas sérieux, tout ça.

Faux papiers, spam, faux papiers, spams, faux papiers… Je faisais défiler la quantité infinie de mails que j’avais reçu depuis ce matin. Machinalement, je m’étais emparée du bijou qui pendait à mon cou. Je ne savais pas pourquoi je le gardais en costume, ni même d’où il venait. J’avais juste le sentiment que je devais le garder. Un mauvais tour de mon cerveau parmi tant d’autres.

Mon doigt cessa de faire tourner la molette de la souris. Je serrais le poing et le brandit vers le ciel.

"HAHA !"

Je l’avais ! Je l’avais ! Ma première commande d’équipement ! On cherchait à me joindre pour mes VRAIS talents ! Ma carte de visite fonctionnait ! J’étais géniale, je l’avais toujours été, et un jour j’allais libérer ce pays ! Ooooooh, voyons voir cela… Lady Moriarty ! Un vrai nom de super-criminel, et pas un petit nom avec ça.

Ça y était. Avec cette commande, La Forge allait finir de chauffer. J’avais un pied dans la porte, que je ne retirerais sous aucun prétexte. Folle de joie, j’embrassais mon pendentif, avec la satisfaction de savoir que, non seulement tout allait me réussir, mais que mon super-pouvoir, que j’avais tant maudit par le passé, m’assurait aujourd’hui d’être intraçable…


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