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L'Antre de Bakasura [Non-Canon]

Ryuji Ichihyo
Age : 24
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Feuille de personnage
Titre: Bagheshur
Expérience: 30/500
Alter: Megantereon
Rang D+





Ryuji Ichihyo
Rang D+
Mar 25 Oct - 19:37
Parc national de Ranthambore. Rajasthan. Inde. 2150.

Trônant fièrement au beau milieu d’un ciel bleu parsemé de quelques nuages, le soleil éclaire l’une des merveilles du sous-continent indien : sa nature sauvage. Un jardin d’Eden qui émerveille les admirateurs venus d’ici ou d’ailleurs, même lorsque l’éléphant et le tigre ne daignent pas encore montrer leur majesté. Semnopithèques malicieux et sambars gracieux attirent l’œil avec leurs bonds et acrobaties quand les meutes de loups indiens ne cherchent pas querelle à des hordes de dholes ou des bandes de hyènes rayées. Ignorant les caprices sanguins de ces carnivores, d’imposants troupeaux de gaurs traversent les plaines dégagées.

Tandis que les grands animaux se pavanent sous la la lumière du roi des astres, les ombres que celui-ci laisse pour compte sont le théâtre d’un autre spectacle. Loin des brâmes, des jappements et des chants, une mélodie particulière et pourtant si commune résonne dans la jungle.

Les brindilles et les branches qui craquent. Les feuilles mortes qui bruissent. Les graviers et la terre que l’on retourne. Ces sons constituent une partition jouée par une civette palmiste traversant la zone boisée aussi vite que ses pattes le lui permettent. Sa course frénétique à la sonorité toute accordée n’est pourtant pas celle que la jungle entend le mieux.

Plusieurs mètres derrière, la même partition sauvage jouée avec plus de maladresse, mais également plus de bruit. Et pour cause : c’est un bien étrange prédateur qui poursuit la civette.

Âgé de presque cinq ans, le petit d’homme que l’on connaîtra plus tard sous le nom de Ryuji Ichihyo a raté son embuscade – embuscade qu’il tente de compenser à la course.

« Reviens !!!! Crie le sauvageon dans le langage des tigres. »

Malgré l’écart qui se creuse mètre après mètre en faveur du viverridé, Ryuji n’en démord pas et continue d’enchaîner les bonds en posture quadrupède. Si l’habileté à la chasse terrestre n’est pas encore son point fort, chaque impulsion de sa part laisse apparaître son immense détermination à savourer un mets plus consistant et moins chocolaté que le kopi luwak dont seule sa cible a le secret.

S’enfonçant davantage dans la forêt tropicale, se fondant peu à peu avec les épaisses ombres de la végétation, la civette palmiste flaire soudain une odeur émanant de ce qui semble être un gouffre feuillu et dense. Une odeur qui fait palpiter ses petits muscles et qui lui fait hérisser sa fourrure. La civette aurait-elle retrouvé l’odeur de son repaire, là où Ryuji ne saurait la retrouver ? Cette signature olfactive, la civette comprend bien ce qu’elle implique : tout sauf le retour chez soi. Sinon, elle n’aurait pas brusquement changé de direction et escaladé le premier arbre venu pour disparaître parmi le feuillage tropical de cette partie du parc.

Ryuji s’arrête progressivement, alors que ses yeux s’illuminent peu à peu à l’ombre des arbres. Le jeune sauvageon aurait volontiers poursuivi sa proie dans les arbres, si l’odeur émanant de la mystérieuse pénombre ne l’avait pas figé sur place de par sa teneur puissante. Et c’est bien la seule chose que le petit d’homme discerne avec clarté.

En effet, tout ce qui se trouve au-delà de cette lisière entre l’ombre et les ténèbres les plus noires de la jungle ne prend même pas de consistance claire aux yeux de Ryuji. Aucun oiseau n’y chante, aucun singe n’y hurle. Même la sainte lueur du soleil, qu’elle soit directe ou résiduelle, semble avoir abandonné et renié cet étrange royaume dont l’enfant sauvage ne discerne que les prémices de l’entrée, mais aussi et surtout cette odeur viciée et pestilentielle qui fait le bonheur des charognards et d’une certaine caste de prédateurs.

Cette effluve, sinistre à bien des égards, a pourtant une composante bien spécifique qui la distingue de toutes les chairs que Ryuji a pu déguster aux côtés de sa mère. Une spécificité qui l’enjoint à rester où il est, voire à s’éloigner. Ce qu’il sent ne lui est fondamentalement pas inconnu, mais les vapeurs de la mort n’aident aucunement son fragile odorat à identifier ce qu’il pense connaître.

Accablé par l’odeur cadavérique étrange, Ryuji recule et se met une main devant le nez. Mais pour autant, il ne bouge pas. Le petit d’homme est tiraillé entre deux émotions : l’hésitation à cause de ce qu’il ne voit pas, mais également une forte curiosité. Le conflit entre ces deux impulsions, celle qui lui enjoint de renoncer et l’autre qui le pousse à avancer, ne font au final qu’immobiliser le petit megantereon.

Une inertie qui stimule un appétit des plus sinistres.

Conjuguée à la vue de sa peau vierge de toute fourrure féline, l’indécision de Ryuji suscite la voracité d’une paire d’yeux le scrutant depuis des fourrés du sinistre domaine des ombres. Des yeux que Ryuji ne voit pas, et qui sont pourtant bien là à guetter le moment opportun pour bondir sur le malheureux bambin. L’odeur de chair décomposée est si forte que l’humain mutant ne discerne pas celle de l’ombre qui le fixe.

Aussi invisible et dissimulée soit elle, cette ombre signale malgré tout sa présence en faisant bruisser les feuilles de son simple pas. Un remous de buisson, c’est ce qui titille les oreilles du sauvageon qui est alors paralysé sur place. La créature invisible a fait un peu trop de bruit, erreur d'ordinaire décisive pour un chasseur.

Mais quelle importance face à une proie aussi immobile qu’un roc ?

Un seul bond… Un seul geste, et-

« Étoile Blanche !!!! hurle une voix que Ryuji ne connaît que trop bien. »

Ryuji se retourne alors : une imposante silhouette aux yeux dorés l’approche. À sa simple vue, le petit d’homme se met à bondir… Vers elle. Car en effet, ce que Ryuji a interprété comme une voix familière est en réalité, et aux oreilles de bien d’autres créatures de la jungle, le rugissement d’une tigresse qui appelle son petit.

« Maman !! Je- Commence le petit garçon que la tigresse nomme Étoile Blanche. »

Cependant, le regard insistant de Sooryaast – ainsi l’ont baptisé les rangers du parc – qui l’examine sous toutes ses coutures interrompt ses vocalisations félines.

La tigresse frotte ensuite son museau contre le visage de son fils, lequel émet une sorte de ronronnement affectueux et étouffé au contact chaleureux de sa mère. Voir que son fils est sain et sauf dans cette zone dense de la jungle la comble plus que d'habitude.

« Tu n’as rien… Quel soulagement ! Lâche Sooryaast, rassurée. »

Après quelques cajoleries, la tigresse décolle sa tête de celle de son enfant adoptif, avant de regarder vers l’orée des ténèbres. Ryuji, lui, regarde aussi vers l’entrée du domaine noir.

« Maman… Qu’est-ce que c’est ? Demande le petit d’homme avec une certaine innocence. »

Humant l’air, Sooryaast retrousse légèrement ses babines en reconnaissant l’odeur funeste qui en émane. Plissant ses yeux dorés, la tigresse du Bengale grogne férocement. Mais ses grondements et ses avertissements résonnent dans le vide.

L’être qui observait Ryuji était retourné à la profonde obscurité dès lors que Sooryaast s’était montré.

Ne comprenant pas l’agressivité soudaine de sa mère, Ryuji se blottit contre sa patte et se dresse en lui attrapant doucement la fourrure.

« M... Maman ? Demande le petit d’homme d'un faible miaulement. »

« Rentrons. Immédiatement. Ordonne Sooryaast d’un grondement ferme. »

Fatigué par sa chasse, Ryuji escalade le corps de sa mère pour finalement s’allonger sur son dos. Sans plus de délais, la tigresse repart d’où elle vient, vers la lisière ensoleillée des bois tropicaux.

____________________________


Tanière de Sooryaast, crépuscule.

Blotti contre le flanc de sa mère tigresse, dont les rayures légèrement plus arquées que ses congénères suffisent à la démarquer, Ryuji regarde le plafond rocheux de la tanière où il a dormi et grandi durant bientôt quatre ans.

« Maman… Il y avait quoi là-bas ? Demande le petit d’homme. »

Sooryaast sursaute discrètement avant de soupirer un instant. L’odeur particulièrement inquiétante qu’elle a discerné à l'orée des ténèbres y est pour quelque chose.

« Rien que tu n’aies besoin de savoir.  Ne t’approches plus de cet endroit. Rétorque la tigresse. »

« Mais, je… Je croyais qu'un tigre qui mange de la viande peut faire tout ce qu’il veut ! Proteste Ryuji, dont l’assurance a commencé à naître avec son apprentissage de la chasse. »

« Étoile Blanche… La jungle est vaste. Elle regorge de merveilles à voir et à découvrir… Mais elle abrite aussi des choses que même un tigre ne doit pas voir. Ne t’aventure plus jamais là bas, est-ce que c’est compris ? Ordonne et demande la mère de Ryuji avec une inquiétude de plus en plus palpable. »

Le ton de Sooryaast interpelle le petit fauve. Que diable abrite donc ce gouffre de noirceur pour inquiéter la plus féroce des tigresses du Rajasthan ?

Cela l'incite à la fois à lui obéir… Et lui donne une furieuse envie de découvrir quel secret se cache derrière les ombres de la jungle.

« … D’accord, maman. Répond Ryuji avant de bailler et de se rouler en boule contre sa mère. B… Bonne nuit... »

Plissant tendrement les yeux, Sooryaast frotte son museau contre son enfant.

« Dors bien, Étoile Blanche. »

La tigresse baille à son tour, dévoilant tous ses crocs et s’endort avec sérénité.

Cette chasseresse accomplie est issue d’une génération de tigres placée sous le signe de l’épanouisssement. Depuis que les Alters sont devenu légion, ils ont à jamais changé le visage de la lutte contre le braconnage. Rangers et héros professionnels indiens luttent main dans la main pour repousser les braconniers pourvus d’Alters, et leurs efforts combinés ont permis aux tigres du Bengale de repeupler peu à peu les jungles du Rajasthan. Voilà quelques décénnies que leur nombre n'a pas sombré sous la centaine d’individus dans le parc de Ranthambore.

C’est aux nouvelles générations d’humains que le plus grand félin d’Asie doit la multiplication constante de ses spécimens en cette seconde moitié de 22ème siècle. Et comme pour les remercier pour leurs efforts, une des tigresses issues de cette « génération miracle » a sauvé et élevé un orphelin détenteur de pouvoirs. Un orphelin dont la sécurité est sa plus grande priorité dans cette jungle dangereuse où le péril rôde à chaque recoin d’ombre.

Et cette priorité, l’odeur des ténèbres ne le lui a que trop bien rappelé...


Dernière édition par Ryuji Ichihyo le Mar 8 Nov - 19:25, édité 4 fois
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Ryuji Ichihyo
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Ryuji Ichihyo
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Jeu 27 Oct - 21:24
Plus tard, en pleine nuit.

Sans un bruit, Ryuji ouvre brusquement les yeux. Blotti contre sa protectrice tigrée qui dort profondément, le sauvageon observe les parois de la tanière sombre qui l’entoure. Si il a dans un premier temps du mal à discerner les reliefs de son refuge, il ne faut pas beaucoup de temps au tapetum lucidum du petit d’homme mutant pour s’éveiller et lui dévoiler ce que la nuit cache à l’homme ordinaire.

Ryuji se redresse doucement et se décolle du flanc de Sooryaast, laissant l’air quelques peu rafraîchi de la nuit souffler sur sa peau humaine. S’éloignant de la tigresse en effectuant quelques pas, l’enfant sauvage aperçoit le terrain dégagé et la mare où sa mère tigresse et lui viennent souvent se baigner pour fuir la chaleur diurne. Cette fenêtre sur le monde nocturne ne le surprend pas tant que cela : s' il ne s’était jamais aventuré seul hors de la tanière durant la nuit, Sooryaast l’avait déjà accompagné pour lui apprendre à chasser la faune vivant au gré de la lune et non du soleil.

Le petit d’homme jette un œil à sa mère endormie, ne suspectant rien. Ryuji a retenu bien des leçons, et celle de la discrétion féline en fait partie. Aucun son qu’il émet n’alerte l’ouïe fine de la tigresse.

« Pourquoi un tigre n’aurait pas le droit de voir toute la jungle ? Pense Ryuji. »

À la suite de cette curiosité, Ryuji fait ses premiers pas hors de la tanière sans la présence protectrice de Sooryaast. Des premiers pas qu’il effectue au gré de la brise nocturne, jusqu’à la mare qu’il affectionne tant.

Parvenu à la berge de la mare, Ryuji baisse la tête et boit de l'eau fraîche à raison de quelques gorgées. Il voit un caracal et un pangolin qui, l’un loin de l’autre, s’abreuvent aussi sur la berge opposée. Si le pangolin part immédiatement, le caracal fixe Ryuji pendant quelques secondes avant de repartir à son tour. Le félidé aux longues oreilles n’a pas faim. Après avoir fini de boire, le jeune homme lève les yeux au ciel. Ce qu’il voit lui fait écarquiller les yeux.

Des étoiles décorent la voûte céleste bleue marine qui surplombe le petit d’homme et la nature qui l’a vu grandir. Si la lumière de chacune paraît insignifiante une fois mise à part, le nombre sans commune mesure de ces objets cosmiques suffit à faire reluire leur magnificence. Une sublime nébuleuse zèbre le ciel, traversant et sublimant les étoiles. Quant à la pleine lune, elle trône là où le soleil présidait il y a quelques heures et bénit la jungle de sa douce lueur apaisante. Ses faisceaux bombardent le jeune megantereon, comme pour récompenser son audace d’être sorti seul.

Ce spectacle émerveille le petit d’homme, qui n’y avait jamais prêté attention lors de ses leçons de chasse. Un spectacle d’autant plus réjouissant qu’il permet à Ryuji de voir et d'identifier son territoire comme s' il se trouvait en plein jour. Ses yeux brillent, animés par des étoiles pareilles à celles qu’il admire. Il baisse ensuite la tête pour voir l’horizon, reconnaissant l’entrée de la jungle, cette même zone dont il n’oubliera jamais l’odeur.

« Il y aura sûrement à manger dans l’ombre ! Lâche le jeune mutant dans la langue royale de la jungle. »

Bondissant avec la vigueur d’un lièvre, Ryuji rejoint la jungle qui l’avait vu échouer à la chasse quand le soleil illuminait encore le parc.

Arpentant les bois denses, Ryuji laisse ses oreilles papillonner pour entendre toute une symphonie résonner : celle de la vie nocturne de la jungle. Plusieurs partitions adroites et habilement mélangées s’entrecroisent, des partitions dont les musiciens ne se cachent pas toujours. Ainsi, regardant dans toutes les directions, Ryuji aperçoit tour à tour les musiciens de cet orchestre naturel. Un écureuil volant se laissant porter par le vent ; des sangliers retournant le sol ; les succions bruyantes d’un ours lippu festoyant sur une termitière ; un python molure rampant à même le sol qu’il retourne avec ses ondulations ; et des hérissons trottant à travers les buissons. Ces animaux dont l’homme ne verrait à la rigueur que le reflet lumineux des yeux, Ryuji en voit jusqu’à la fourrure et les écailles grâce à ses yeux de félin.

Se faisant oublier des animaux nocturnes de la jungle, le jeune prince de Ranthambore s’enfonce dans les bois de plus en plus denses. À chaque pas de plus qu’il fait, les animaux qu’il aperçoit se font de plus en plus rares et fuyant de la direction qu’il suit.

À chaque mètre de plus qu’il parcourt, Ryuji flaire de mieux en mieux l’odeur si étrange et funeste sur laquelle il est venu faire son enquête. Une odeur qui s’intensifie au fur et à mesure que la symphonie de la jungle nocturne s’atténue avec la distance. Si cette effluve de charogne repousserait n’importe quel autre être humain, ce n’est en aucune façon le cas de Ryuji, pour qui cette odeur est avant tout synonyme de repas facile.

Ne perdant pas de vue ni de flair la piste qui motive sa désobéissance envers Sooryaast -il faut dire que ses entraînements à la chasse l'ont rendu de plus en plus confiant-, Ryuji s’arrête devant l’orée du domaine sombre face auquel aucun animal ne se trouve. Grâce à son tapetum lucidum, Ryuji discerne mieux ce qu’il ne parvenait pas à voir plus tôt : une végétation encore plus dense et un chemin qui, si il semble accidenté, a l’air tout à fait praticable par n’importe quel animal un tant soit peu agile dans ses mouvements.

Regardant à droite puis à gauche, Ryuji s’engouffre dans le royaume maudit. Tant pis pour les autres animaux : le repas caché dans les ténèbres sera à lui !

Ryuji avance lentement dans ce lieu où la luminosité, même pour lui, se réduit pas après pas. Il n’y a pas que le soleil ; la lune aussi semble avoir délaissé et renié ce recoin du Rajasthan. Et ils ne sont pas les seuls.

Si ses premiers pas dans le domaine des ombres se sont enchaîné sous les signes respectifs de la prudence et de la curiosité, une nouvelle sensation s’empare peu à peu de lui. Une sensation d’appréhension qui se fait de plus en plus forte alors qu’il s’est conséquemment éloigné de l’entrée.

Lui qui pensait pouvoir se fier à autre chose qu’à l’odeur cadavérique, il se rend compte que c’est la seule balise qui lui reste à suivre. Voir est de moins en moins aisé dans les ténèbres. Quant à ses oreilles, elles ne perçoivent rien d’autre que le léger sifflement du vent qui fait frissonner les feuilles et l’échine du sauvageon. Mais à part ces sons faibles et inquiétants, rien ne parvient à Ryuji. Il pense, ou plutôt il espère au moins entendre les hurlements de singes ou de chouettes effraies. Mais il n’y a rien, pas même le bourdonnement d’un insecte.

Ce domaine n’est pas habité par des animaux ne se dévoilant que la nuit. Il n’est pas habité par des arthropodes discrets non plus.

Cet antre de ténèbres est vraisemblablement vide de toute vie autre que végétale - toute vie résidente, tout du moins. Ryuji est tout seul, seul avec cette odeur de viande bizarre et cette atmosphère qui enjoindrait n’importe quelle autre créature à fuir ce bosquet abandonné même par les bestioles les plus indésirable que Mère Nature ait engendré.

Cette atmosphère, cet air maudit qui lui donne la sensation d’être regardé, Ryuji en sent le poids pénétrer par les pores de sa peau. L’odeur ne quitte toujours pas ses naseaux, mais prend une toute autre consistance dans l’esprit du mutant. Il ne lui faut pas plus que cette atmosphère macabre pour lui donner une idée sur la raison de l’absence de convives carnassiers pourtant invités par l’o-

Crac.

Ryuji étouffe un cri.

Un bruit brise le silence auquel il commençait à peine à s’accommoder, le faisant sursauter brusquement. Il regarde frénétiquement sur les côtés avant de regarder à ses pattes, ou plutôt à ses mains. Il a marché sur quelque chose dont il arrive à distinguer la forme.

« Un… Os ? Murmure-t-il. »

Le petit d’homme écarquille les yeux. Qui dit os dit forcément viande, cette odeur ne l’a pas trompé !

Ryuji reprend alors sa route d’un pas plus pressé. La luminosité commence à revenir dans ces bois étranges; là, à quelques centaines de mètres, Ryuji voit les rayons de la lune transpercer l’épaisse végétation et éclairer ce qui semble être une masse de nature étrange. L’odeur est de plus en plus forte, tant et si bien que Ryuji n’en flaire plus d’autre.

Rien. Pas même celle des deux rubis braqués vers lui depuis les branches des arbres.

Ryuji approche de plus en plus, déterminé à mettre la main sur un trésor de protéines.

Crac. Crac.

D’autres os. Ryuji n’en a jamais vu avec une telle forme, il ignore à qui ils peuvent appartenir. Plus il avance, plus les ossements s’amassent. Il voit même des crânes à la forme singulière -par rapport à la faune de la jungle- qu’il prend garde d’éviter.

Splotch. Splotch.

Il marche dans quelque chose d’assez visqueux. Il porte à sa bouche sa main, maculée d’une substance si sombre qu’il n’en distingue pas la nature. Il la lèche alors, faute d’en discerner l’odeur. Ses yeux s’écarquillent alors qu’un frisson parcours son corps.

Le goût ferreux du sang, bien plus proche du sien que de celui d’autres bêtes… Cela lui cause un bien mauvais pressentiment.

Il ralentit alors qu’il voit avec plus de précision la masse qui émet cette odeur si particulière. C’est là que le petit d’homme est figé, ne fixant que cette masse en ignorant le sang qui souille le sol et toute la végétation alentoure.

C’est un amas de cadavres d’humains, sauvagement tués et partiellement dévorés au milieu des nombreux squelettes jonchant le sol de cet antre démoniaque. Des cadavres que même les mouches et les cafards n’auraient pas souhaité entamer. Les paroles de sa mère et les ordres de celle-ci lui reviennent en tête alors qu’il contemple le massacre de ses congénères que la lune qui montre sans concession… Comme pour le punir de sa curiosité trop forte.

« Ne t’approche jamais de ceux qui ont mangé l’homme. Ce sont les êtres les plus dangereux et violents de la jungle. »

Ryuji ne comprenait pas, il ne mesurait pas la réalité de cet interdit jusqu'à maintenant. Ce tabou que sa mère lui avait enseigné prend corps sous ses yeux.

Il comprend mieux maintenant pourquoi les animaux fuyaient l'entrée de ce lieu maudit, pourquoi aucune bête ne réside dans les ténèbres et pourquoi Sooryaast s'était montrée agressive.

Tout était dû à la chair proscrite des hommes et son odeur si spécifique.

La curiosité disparaît de l'esprit de Ryuji. Il en a bien trop vu. Il est sur les terres d’un démon.

Ryuji recule, tremblant comme une feuille. Une seule pensée le hante : fuir. Retourner auprès de Sooryaast.

Paf.

Ryuji se retourne soudain. C’est avec horreur qu’il voit un avant-bras tombé au sol, baignant dans une étendue sombre et visqueuse. Des gouttes perlent depuis les hauteurs.

Grrrr…

Ryuji lève lentement la tête, après avoir entendu ce grognement félin. Un grognement qu’il ne comprend pas.

Son regard doré balaye l’Enfer tropical de bas en haut. Il s’arrête soudain en raison de ce qu’il voit juste au dessus d’une branche solide.

Deux rubis ronds luisant dans le noir en dessous desquels se dessinent des crocs acérés et maculés.

GrRrOoOoOoOaAaAaAaAaAaAaRrRrRrRrR !!!!!!!!!!!!!!

La bête d'ébene aux yeux écarlates bondit de son perchoir vers sa proie, la gueule béante et toutes griffes dehors.


Dernière édition par Ryuji Ichihyo le Mar 8 Nov - 15:55, édité 1 fois
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Ryuji Ichihyo
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Ryuji Ichihyo
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Sam 5 Nov - 7:19
Attendre le rugissement n’a pas été nécessaire : la simple vue de ces yeux infernaux a enjoint Ryuji à détaler en sens inverse après avoir hurlé de terreur. Ainsi, le monstre le manque de peu et atterrit brutalement sur le sol. Mais dans sa course, le petit d’homme aux cheveux bruns se prend les pattes dans un tas d’os et tombe. À terre, il tourne la tête vers son agresseur, écarquillant les yeux à la vue de son allure.

Le monstre, celui que les rumeurs humaines dénomment Basakura, dévoile sa silhouette à la faveur des faisceaux de lune. Il ressemble fort à un tigre, mais s’en distingue par ses contours plus lisses et arrondis, ainsi que son aspect général plus élancé et moins massif. Cette attaque depuis les arbres, cette apparence générale, cette union parfaite avec les ténèbres, tout cela ne peut être que l’apanage d’une seule bête. Le seul carnivore de la jungle inférieur au tigre, mais supérieur à tous les autres.

Ryuji se redresse et bondit dans les premiers fourrés qu’il arrive à voir, sans attendre que la panthère noire mangeuse d’hommes ne reporte à nouveau son attention vers lui. Le petit d’homme rampe à reculons dans l’obscurité la plus totale, ne se guidant cette fois qu’au son des remous des feuilles, aux sensations de sa peau, mais également aux rugissements et aux grognements plus qu’agressifs du félin démoniaque qui fauche les feuilles avec ses griffes acérées.

Toc.

Ça y est, le petit mutant ne peut plus reculer. Son dos a heurté quelque chose de solide dont il reconnaît la texture. Cette matière contre laquelle il a l’habitude de se gratter, c’est de l’écorce d’arbre. Le petit d’homme lève la tête, discernant la forme des branches, et la baisse aussitôt ; les yeux incandescents de Bakasura le fixent et la bête retrousse ses babines, dévoilant de nouveau ses crocs cauchemardesques d’une manière plus effrayante que l’on pourrait l’imaginer.

Est-ce que les effluves de sang et de chair en décomposition font halluciner le petit d’homme ? Ou ce fauve monstrueux est-il en train de… Sourire ?

Tandis que le léopard feule et se hisse davantage dans les fourrés, Ryuji se retourne et bondit. Plantant ses griffes dans le tronc d’arbre, il l’escalade avec la vitesse et l’habileté d’un singe.

Bakasura s’arrête à quelques centimètres du tronc. L’arrière du corps enchevêtré dans l’épais buisson, il lève la tête vers sa proie fuyante, une proie dont il ne pourra suivre la trajectoire. Regardant vers le sommet, la panthère grogne haineusement avant de disparaître à nouveau dans les feuillages.

Ryuji, se guidant à la lumière de la lune, trotte jusqu’au bout d’une branche et bondit vers l’arbre suivant, progressant vers son tronc. Il bondit ensuite sur une autre branche orthogonale, donnant sur un autre arbre. Si la course terrestre n’est pas son point fort à son âge actuel, l’agilité l’est en revanche sans nul doute. Les seuls sons qu’il entend sont ceux des feuilles qui bruissent et les branches qui craquent parfois. Nul grognement, nulle lumière rouge visible.

Alors qu’il voit les branches qu’il peut emprunter jusqu’à la canopée, ou tout du moins de ce qu’il peut en entrevoir grâce à la lumière de la lune -hors de question de rebrousser chemin dans les ténèbres, là où il ne verrait pas son environnement et encore moins la panthère-, il est submergé par un seul désir : s’enfuir, retourner auprès de sa mère qui saura le protéger.

Tout un chemin arboricole se dresse devant lui, conjurant son adresse. Quelques bonds de plus, une course folle au sommet des arbres et-

GrRrOoOoOoOaAaAaAaAaAaAr !!!!!!!!!!!!!!!!!

La branche face à Ryuji disparaît au profit d’une masse noire illuminée de deux globes incandescents. Ayant rattrapé sa proie à raison d’une escalade acharnée, Bakasura s’agrippe au bout du perchoir de sa proie hurlante de terreur. Tout en se hissant, le léopard élance ses mâchoires vers son repas.

Shlack.

Les canines tranchantes de la panthère noire éraflent le torse du petit d’homme qui a brusquement reculé jusqu’à basculer en arrière, dans le tronc creux de l’arbre.

Ryuji plante ses griffes dans le bois, freinant sa chute avant même qu’elle ne commence réellement. Agrippé à la paroi opposée à la cavité, il tourne la tête vers celle-ci. En moins de temps qu’il ne faut pour le dire, les yeux rouges et la fourrure noire de Bakasura l’obstruent presque.

Ryuji se plaque contre la paroi, grinçant des crocs à cause de sa blessure au torse, mais évitant quelques coups de griffes de la panthère noire feulant avec hargne. Acculé contre le bois, l'enfant aux dents de sabre regarde par l’entrée : Bakasura a retiré sa patte après ses tentatives infructueuses, et le petit d’homme voit distinctement ses yeux écarlates. Mais Ryuji entend le bois craquer ; le léopard force le passage. Dans quelques instants, il sera là.

Ryuji regarde partout. Plus bas, il y a une autre cavité par laquelle sortir ; et plus haut, là où passent les rayons de la lune, il y a un enchevêtrement de cavités plus fines mais assez larges pour permettre à un enfant de passer. Ryuji se met à escalader vers ces sorties, se hissant à l’aide de ses griffes et de ses bras.

Il atteint bientôt le sommet de cet arbre mort, les barreaux de cette prison de bois sont à portée. Ryuji s’apprête à les saisir pour passer au travers quand il s’immobilise soudain.

Le bruit du bois qui craque a cessé. Aucun grognement ne résonne. Ryuji ne monte plus, il regarde brièvement en bas ; la cavité par laquelle il est entré est complètement dégagée. Bakasura a encore disp-

Crac.

Ryuji, soudainement plongé dans le noir total, lève la tête. Cette fois, seules deux étoiles rouges bien trop proches et des lames meurtrières luisent dans les ténèbres obstruant les rayons lunaires.

« AAAAAAAAAAH !!!!!!!! Hurle le petit d’homme, terrifié. »

Bakasura brise le bois d’un violent coup de griffes. Ryuji, se plaquant à nouveau contre la paroi qu’il escalade, évite de peu l’attaque en hurlant. Sentant la pointe des griffes meurtrières l’effleurer et brasser un air glacial sur sa peau dégarnie, le jeune humain est pris d’un frisson qui parcourt toute sa colonne vertébrale. Sans même attendre un second assaut du léopard, il se laisse glisser contre le bois tout en se cramponnant à ses griffes.

L’enfant sauvage, les pupilles rétrécies et les larmes aux yeux, lève les yeux au ciel. La masse de ténèbres a disparu, dévoilant une large cavité au beau milieu des barreaux de bois. Le cœur de Ryuji tambourine, jusqu’à accaparer toute son ouïe. Il n’entend même plus le son de ses griffes déchirant le bois mort, il ne s’entend même plus bondir à travers la cavité qu’il avait repéré plus bas, se réceptionnant ainsi sur la branche qui la prolonge. Il n’entend que faiblement cette branche, plus fragile que celle au-dessus de lui, craquer sous ses pas. Seule une pensée le préoccupe : s’enfuir.

Rien d’autre ne pénètre son esprit, ni ses or-

RoOoAaAaRrR !!!!!!!!!

Ryuji lève la tête : Bakasura fond vers lui. Le petit d’homme se jette au bout de la branche pour pouvoir ensuite rebondir, mais le léopard atterrit brutalement à la moitié de sa longueur.

CRASH.

La branche cède et se brise sous la puissance du léopard. Ryuji tombe, et Bakasura aussi.

Ryuji heurte violemment le sol, les yeux clos et son corps roule. Il bute contre quelque chose, l’arrêtant dans sa roulade. Endolori et gémissant, le jeune humain entrouvre les yeux. Sa vision d’abord floue ne lui permet de distinguer qu’une masse sombre mise en évidence par les rayons de la lune. Au fur et à mesure que ses paupières s’écartent, l’environnement lui apparaît de plus en plus clair.

Le sauvageon écarquille les yeux quand sa vision redevient nette et il recule brusquement en hurlant.

Cette masse sombre, c’est un des repas inachevés de Bakasura. Un humain adulte, sauvagement lacéré et dévoré, affublé de cornes de taureau. Rares sont les corps humains de ce garde-manger qui, à une époque, pouvaient être qualifiés de purement ordinaires.

Alors que Ryuji recule, il entend un grognement qui l’enjoint à s’arrêter sur place. Il tourne lentement la tête, tétanisé par la terreur.

Bakasura approche dangereusement, mais il prend son temps. Alors qu’il pénètre le périmètre éclairé par la lune, le léopard mangeur d’hommes se lèche les babines. Ryuji tente de s’éloigner, mais la peur, la fatigue et la douleur l’empêchent de bouger. Il ne peut que regarder, impuissant, son bourreau prendre forme et consistance sous ses yeux. La lune lui permet de discerner la fourrure souillée, la musculature et le corps de la panthère noire, cette panthère qui ne lui était jusqu’alors apparue que comme une ombre aux yeux rouges ou une silhouette.

Le fauve démoniaque retrousse ses babines, dévoilant de nouveau ses crocs affûtés comme des lames. Des crocs teintés du sang de nombreux humains ainsi que du peu d’hémoglobine qu’il a soutiré à Ryuji. Ce dernier se recroqueville, enfouissant son visage dans ses bras. Tremblant comme une feuille, il n'ose plus miauler. Des larmes perlent sur son visage, tout comme le sang de ses congénères coule le long des dents et du menton de son bourreau d'ébène.

Toutes griffes dehors, la bête se baisse légèrement, s'apprêtant à bondir sur sa proie. Voilà un mets de plus à ajouter à sa montagne de-

ROOOOOOOAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAARRRR !!!!!!!!!

Un rugissement retentit et déchire les ombres, brisant le silence macabre des lieux. C’est un cri que Ryuji ne connaît que trop bien. Le petit d'homme lève lentement la tête, et ce qu'il voit le surprend.

Bakasura frissonne. Pour la première fois de sa vie passée à traquer, tuer et dévorer de nombreux possesseurs d’Alter, la panthère noire tremble. Quelque chose a vibré à travers lui, jusqu’à ses os.

Le léopard tourne la tête. Deux gemmes dorées luisent dans les ténèbres. Mais à peine a-t-il le temps de les distinguer nettement que l’instant d’après, Sooryaast l’entraîne au sol avec un puissant bond.


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Ryuji Ichihyo
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Ryuji Ichihyo
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Mar 8 Nov - 17:43
Le silence régnant sur le repaire maudit est déchiré par les rugissements des deux fauves. À terre, plaqué par la tigresse, Bakasura la frappe d’un double coup des pattes arrières au menton. Sooryaast grogne et contre-attaque à raison de trois puissantes griffures au corps, arrachant des feulements de douleur au félin obscur. Alors que la reine de Ranthambore s’apprête à lui délivrer un quatrième coup, Bakasura la frappe d’un violent coup de griffes à la joue avant de se redresser et de lui bondir à la gorge. Mais la tigresse aux rayures arquées jette violemment le léopard au sol avant qu’il ne puisse la mordre.

Bakasura roule brusquement sur le côté et, le ventre à terre, fixe Sooryaast avec une sauvagerie sans commune mesure. Plissant ses yeux ardents, la panthère noire hérisse sa courte fourrure tout en feulant et dévoilant ses crocs tachés de sang.

Sooryaast, elle, se dresse entre le léopard et Ryuji, qui se dissimule derrière un rocher. Foudroyant Bakasura de ses yeux dorés, la tigresse du Bengale rugit avec hargne. Ce rugissement est indéchiffrable aux oreilles du léopard qui ne connaît aucun autre langage que le sien. Mais Ryuji, lui, comprend.

« Ne t’approche plus de mon fils, démon !!!!!!! Entend ainsi le petit sauvageon. »

Soudain, Bakasura bondit vers Sooryaast et tente par deux fois de lui lacérer le visage. La mère de Ryuji recule, évitant les assauts. Elle rétorque d’un coup de patte rapide au crâne, faisant légèrement ployer le léopard. Bakasura la frappe au nez avant de reculer. Les deux fauves, se dressant sur leurs pattes arrière, se jettent l’un sur l’autre.

Ryuji, bien caché derrière son rocher, observe ce duel intense opposant la reine de Ranthambore au démon d’ébène ; un duel dans lequel, pour la première fois, Bakasura semble en position d’infériorité physique. Bakasura, visant pourtant la gorge, ne parvient qu’à frapper à quelques reprises le poitrail de la tigresse bien plus imposante que lui. Tandis que pleuvent les coups de la panthère, Sooryaast lacère brutalement ses épaules, atténuant les assauts qu’elle essuie. Le léopard rugit de douleur. D’un puissant coup de patte à la joue, la tigresse envoie l’ombre de la jungle s’écraser contre un arbre proche.

CRASH.

La panthère noire s’écroule en grognant, du sang perlant le long de sa joue et de ses épaules. Après quelques instants, Bakasura lève la tête en haletant. Sooryaast, les quatre pattes au sol, approche de lui en feulant sauvagement. En voyant la tigresse aux rayures arquées marcher vers lui, en voyant ces longs crocs immaculé qu’elle n’a même pas encore utilisé contre lui, le monstre du Rajasthan écarquille les yeux et plaque ses oreilles contre sa tête.

Pour la première fois, le mangeur d’hommes ressent ce que ça fait d’être celui qui va finir entre quatre canines.

La panthère noire terrorisée se relève et bondit en gémissant vers les ombres lointaines, au-delà de son garde-manger. Sooryaast le poursuit sur quelques mètres, mais s’arrête à la frontière séparant à nouveau la lueur lunaire des ténèbres les plus totales. Disparaissant dans le noir, Bakasura ne laisse entendre que des remous de feuilles de plus en plus faibles. La panthère noire s’enfuit sans demander son reste, s’échappant du royaume qu’il a tant corrompu par sa présence sanguinaire.

Sooryaast rugit à pleins poumons. Son cri est un avertissement des plus clairs : Bakasura n’a plus intérêt à revenir dans la jungle. S’il ose mettre à nouveau les pattes dans les environs, la tigresse ne le laissera pas fuir à son bon plaisir.

Lorsque le silence s’abat à nouveau sur l’antre abandonné, Ryuji sort de sa cachette et avance joyeusement vers sa mère.

« Maman ! S’exclame Ryuji avec ses vocalisations félines. »

Sooryaast tourne brusquement sa tête vers lui, et son expression paralyse le sauvageon sur place. Les babines retroussées et les yeux plissés, la tigresse grogne. Si elle est soulagée et extrêmement heureuse de revoir son fils en vie, elle réserve les câlineries et les papouilles pour plus tard. Quelque chose de plus important attend Ryuji.

Ce dernier, comprenant bien vite la situation, entrouvre la bouche et baisse les oreilles puis les yeux, pris de honte par tout ce qu’il a fait. Il relève ensuite le regard vers sa mère.

« Maman, je– Commence l’enfant avec remords. »

« Ça suffit, rentrons. Rétorque sévèrement Sooryaast. »

Sooryaast rebrousse alors chemin d’un pas ferme. Baissant à nouveau la tête, Ryuji la suit. Mère et fils abandonnent ainsi les victimes profanées de Bakasura, les laissant gésir en silence dans domaine déserté.

____________________________________

Près de la tanière.

Ayant regagné la clairière, Sooryaast s’assied non loin de l’étang. Faisant face à l’eau, elle laisse son ombre s’étendre vers les zones obscures de son territoire.

Lorsque Ryuji met la patte dans l’ombre de sa mère, regardant toujours au sol, il écarquille les yeux.

Grrr…

Le petit d’homme dresse soudainement la tête et les oreilles avant de regarder vers l’étang. La tête tournée, Sooryaast le fixe de son œil sévère ; elle ne le laissera pas retourner dormir aussi facilement, il le comprend bien.

Ryuji déglutit et avance vers sa mère d’un pas hésitant, tandis que celle-ci regarde à nouveau vers l’eau. Après plusieurs pas, Ryuji s’arrête et s’assoit à côté de l’imposante tigresse. Les oreilles baissées, le sauvageon lève tristement la tête vers elle.

Sooryaast oriente son regard doré vers son fils adoptif.

« Tu m’as désobéi délibérément. Gronde durement la mère de Ryuji. »

« D… Désolé maman… Bégaye Ryuji, empli de regrets. Je… Je voulais savoir ce qu’il y avait là-bas… Je… Je voulais pas te mettre en colère… Continue-t-il, non sans mal. »

« Ce n’est pas de ma colère dont il est question !! Il s’agit de toi, Étoile Blanche !!!!! Réplique la tigresse, sa férocité se mêlant à de l’inquiétude. Tu as failli te faire tuer !!!! »

Ryuji détourne à nouveau le regard, les yeux humides et le cœur serré.

« Je pensais… Qu’avec tout ce que tu m’avais appris je… Je ne risquais rien… Essaie-t-il de justifier. »

« Savoir chasser ne veut pas dire ignorer les risques ! Lâche la tigresse avant de reprendre. Même les meilleurs chasseurs ne sont pas à l’abri du danger. Dans la jungle, il rôde partout… Et tout le monde en a peur… Tout le monde. »

« M-Même toi ? Demande Ryuji en levant la tête vers sa mère. »

Le petit d’homme écarquille alors les yeux en voyant ceux de Sooryaast. Il l’avait bien souvent vue détendue et affectueuse ; aujourd’hui, il l’avait vue en colère. Mais en cette nuit de pleine lune, il découvre une nouvelle étincelle dans le regard de la tigresse :

Celle de la tristesse.

« Surtout moi. Murmure-t-elle d'une voix brisée. »

La reine de Ranthambore s’allonge face à son fils et le pousse doucement contre son poitrail d’un petit coup de patte. Se blottissant contre la fourrure de Sooryaast, Ryuji regarde, le cœur en lambeaux, sa mère en train de céder à la peine.

« J’ai eu si peur pour toi… J’ai cru que je n’allais pas réussir à te retrouver à temps… Que ce léopard t’arracherait à moi… Je… Je croyais que j’allais te perdre… Sanglote la tigresse, serrant en quelque sorte Ryuji contre elle. »

C’est le cœur particulièrement lourd que Sooryaast se rappelle, à cause de ces sensations, de la fois où ce qu’elle a dit s’était malheureusement réalisé : le jour où elle a perdu ses enfants biologiques, deux tigreaux à l’aube de leur vie... Une vie arrachée par une meute de loups. Sooryaast décima la moitié de ladite meute, sans que ça ne lui ramène ses enfants. En ce jour, la reine avait perdu ses deux petits princes, la chair de sa chair.

Mais en se rappelant ce funeste évènement, la tigresse s’est également remémoré le crépuscule qui lui a succédé ; un coucher de soleil sous lequel elle a trouvé Ryuji, qui était alors un nourrisson tout juste orphelin.

Le cœur de Sooryaast, glacé par la mort de ses tigreaux, a depuis lors été réchauffé par la simple existence de ce petit d’homme, ce bambin d’une espèce toute autre que la sienne. Il avait ravivé la chaleur de son amour maternel, une chaleur qui prend peu à peu le pas sur la colère et la tristesse du moment présent.

« Je suis si heureuse… Si soulagée… D’avoir pu sauver ta vie… Murmure-t-elle avec une émotion non dissimulée, le bonheur de ne pas avoir perdu un troisième enfant. »

Ryuji renifle et pose son front contre le poitrail de sa mère. Laissant ses larmes couler sur la fourrure de la tigresse, il s’en veut immensément de lui avoir désobéi et de lui avoir fait tant de peine.

« Je… Je te demande pardon, maman… Je… Je désobéirai plus jamais !! Sanglote doucement le sauvageon. »

« Je ferais toujours tout pour te protéger, mon fils… Mais promets-moi que tu ne referas rien d’aussi imprudent… Promets-le-moi. Supplie la tigresse. »

« P-promis maman… Je ferais attention... Répond Ryuji. »

La tigresse se relève doucement, et Ryuji lève ses yeux encore humides vers elle. Bien que toujours très triste d’avoir blessé sa mère, le petit d’homme voit son cœur allégé par le regard qu’elle lui adresse. Le temps des remontrances et de la terreur est passé pour cette fois, le regard paisible de Sooryaast le montre bien.

« Viens. On rentre. Dit doucement Sooryaast. »

La tigresse se remet alors en marche vers la tanière, son flanc droit éclairé par les apaisants rayons de la lune. Ryuji la suit, les bras et les jambes tremblant légèrement. De la course-poursuite à cette discussion, l’enfant sauvage a été submergé aussi bien physiquement qu’émotionnellement.

Après quelques pas seulement, il commence à traîner de la patte et baille. Ouvrant grand la bouche et dévoilant ses petites dents de sabre, il laisse échapper un petit miaulement particulièrement similaire à celui d’un lionceau.

Sooryaast dresse les oreilles, tourne la tête vers Ryuji et rebrousse chemin. Une fois arrivée près de son fils, elle s’accroupit comme lors d’une chasse en embuscade. D’un grondement doux, elle attire l’attention du jeune megantereon.

« Allez, mon grand. Monte. Murmure la reine de Ranthambore. »

Les yeux à moitié clos, le sauvageon marche mollement vers sa mère et grimpe faiblement sur son dos, avant de s’y allonger laisser ses lourdes paupières se rejoindre. Sooryaast se redresse doucement, au rythme de la respiration calme de son fils endormi.

D’un pas feutré, elle retourne à sa tanière pour profiter elle aussi d’un repos bien mérité suite à cette nuit agitée. Une nuit qui ne connaîtra plus jamais d’égal, tant la leçon vécue par Ryuji s’est gravée jusqu’aux tréfonds de son jeune esprit.

Une fois revenue à l’intérieur de la tanière, la tigresse s’allonge sur le ventre et pose sa tête sur des pattes croisées et ferme les yeux à son tour.

Viendra un jour où elle ne les rouvrira plus jamais. Elle a aujourd’hui triomphé d’un mangeur d’hommes, mais un autre de ces fauves sans peur ni limites lui ôtera la vie. Et c’est à ce prix que Ryuji quittera définitivement la jungle pour rejoindre le monde auquel il appartient vraiment.

Mais la froideur de la mort frappera dans un futur dont mère et fils n’ont pas conscience. Aujourd’hui, c’est une douce chaleur qui unit et accompagne la tigresse et son enfant adoptif dans le monde des rêves.

Une chaleur qui, même des années plus tard, restera gravée dans l’esprit de Ryuji… Et dans son cœur.
FIN

P. S. :





LEXIQUE :

Dhole : canidé sauvage d’Asie au pelage brun-roux.

Gaur : bovidé de très grande taille originaire d’Asie du Sud-Est.

Kopi luwak : café indonésien dépourvu d'amertume, préparé à partir de graines récoltées dans des excréments de civette palmiste, du fait d'une digestion quasiment absente. Il s'agit du café le plus cher au monde.

Sambar : grand cervidé d’Asie du Sud.

Semnopithèque : genre de petits singes à queue non-préhensile habitant les forêts d’Asie. Parfois appelés "entelles" ou "langurs".

Tapetum lucidum : couche réfléchissante située au fond des yeux de plusieurs espèces animales, dont les félins ; c’est à cela qu’ils doivent leur bonne vision nocturne.


Dernière édition par Ryuji Ichihyo le Mer 9 Nov - 3:26, édité 6 fois
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