Vague à l'âme [PV Nikita]

Vague à l'âme

Ft : Léo Oxton

Je m’étais levé avec le soleil ce Dimanche. Ça faisait plaisir. L'entraînement avec Kaza suivi de celui avec les élèves de deuxième année m’avait complètement achevés et je m’étais retrouvé à devoir sécher quelques heures de cours les jours suivants, histoire de récupérer quoi.

Est-ce que ma bonne humeur matinale était due à l'absence de cours? Naaah, c’est pas un simple jour de trêve qui allait me remonter le moral, c’est juste qu’il semblerait que, pour une fois, je n’avais pas à payer mon insubordination de plusieurs heures de ma vie. Au contraire! J’allais pouvoir pleinement profiter de ce dimanche, yep!

Parce que ce Dimanche, j’allais surfer, et pas tout seul en plus! Un élève de deuxième année m’avait contacté et on s’était mis d’accord pour se rejoindre sur la plage de Dagobah en milieu de matinée.

Mes grands-parents avaient profité de la récente installation de l’agence de mon père à Musutafu pour libérer leur voilier d’une dizaine de jouets aquatiques que j’avais accumulé au long des années. J’avais donc une planche de surf toute cabossée qui m'attendait dans le hangar de mon papa.

Débardeur, short de sport et visière de Shiketsu sur le front, j’avais englouti une crêpe de Tapioca à la pomme avant de quitter ma chambre au pas de course. L’agence Water Buffalo était à une petite demi-heure à vélo de l’école. Une fois sur place, il me fallut encore éviter au moins 200 000 obstacles avant d’atteindre mon objectif. Oui je suis le fils de Boki Nomori, oui je lui ressemble, oui je suis maigre, non je ne mange pas assez, les toilettes? Au fond du couloir sur votre gauche. Tout ça pour finalement arriver face au boss final…


Ca faisait tout juste dix jours que l’on s’était quitté après une semaine à devoir cohabiter sur un bateau (un gros bateau, certes, mais un bateau quand même), et vu le ton sur lequel il m’interrogea, il avait probablement eu vent de mon manque d’implication dans… je sais pas… la vie? Quoi qu’il en soit, après moulte remontrances et un abraço à me briser les cervicales, je pénétrais finalement le hangar tant convoité.

Et là: Surprise! Juste à côté de ma petite planche en fibres se trouvait le fun board en mousse sur lequel j’avais débuté. De quoi assurer un apprentissage sûr et divertissant à mon camarade.

Avec tout ce bordel, je quittai l’agence une heure après y avoir posé le pied. La petite planche collée dans le dos et la grosse sous le bras, j’arrivai à la plage une dizaine de minutes après le rendez-vous, pas terrible, mais le mieux que je pouvais faire. Mon jeune aîné se trouvait déjà sur le sable lorsque j'abandonnai mon vélo sur l’herbe rase. Les planches sur la tête et le sac sur l’épaule, je me dirigeai en direction du garçon… et le dépassai sans un mot.

Est-ce que c’était vraiment “Léo de Shiketsu” le gamin, là?

Je veux dire. Il avait les cheveux verts, okay, il était haut comme trois pommes, okay, mais un léger doute m’avait empêché de le saluer. Déjà, dans mes souvenirs, le Léo de Shiketsu était un peu plus grand que ça. Ensuite, et c’est le point le plus important: La casquette… c’était pas la bonne.

Okay, c’est fait, on avorte la mission! Mais j’étais déjà lancé! Si je me retournais il allait me voir hésiter, c’était la honte! Oh merde, j’étais presque au bords de l’eau là! Bon, on abandonne le sac et … bah ma foi, j’étais juste un surfer normal qui allait surfer tout seul… avec deux planches, ouais, c’était parfaitement normal! Tout allait bien, tout allait bien!

J’étais immergé jusqu’à la taille lorsque je déposai les deux planches sur l’eau qui se retirait en faveur d’une vague prochaine. Celle du dessus était collée à la paume de ma main, mais celle du dessous n’était aucunement rattachée à moi et elle s’en alla sans demander son reste... avant d’être ramenée dans ma direction par un gros bouillon blanc. A ce moment j’avais deux choix. UN : ne pas bouger et me prendre la planche en mousse dans les tibias. DEUX : fuir comme un idiot.

Au final j’aurai eu l’air moins con en essayant de fuir la planche.

Cette dernière avait beaucoup plus d'inertie que ce que je pensais et non contente de m’exploser les tibias, elle me renversa et me passa par-dessus pour empirer ma situation. Je me relevai après un bon lavage des sinus et retournai sur la plage illico presto, saisissant mon agresseur au passage.

Je pouvais pas tomber plus bas que ça, aussi je me décidai finalement à lever la tête vers l’étranger aux cheveux verts avant de lâcher un petit…

Vague à l'âme

Ft : Léo Oxton

Bon, bah... Il semblerait que le gamin était bel et bien Leo Oxton: Mon ainé. Voilà une constatation plutôt soulageante ! Ou pas. On peut pas dire que je venais de réaliser la meilleure entrée en scène possible. Comment j’allais rattraper le coup maintenant? Je devais déjà être une farce à ses yeux!

Je me contentais de lui répondre en faisant un signe de “Okay” de la main, j’avais la gorge trop serrée pour pouvoir articuler un mot.


La planche à roulette, ça, pour le coup, c’était un truc que j’avais jamais essayé.Est ce que ça pouvait aider? Aucune idée. On  allait découvrir ça une fois qu'il aura pris sa première vague. Pour le moment, on allait se concentrer sur la mer, le courant et la planche.


Sur quoi je laissai tomber les planches au sol.


À ces mots je plaçai mes mains sur le centre de ma planche avant de m'y allonger et commencer à bouger les bras.


Oups, je savais pas dire ça en japonais moi !


Je réalisai le mouvement tout en le décrivant.


J’avais pas fait ça depuis un bail et je dois dire que j’avais hâte d’aller à l’eau. Les vagues n’étaient pas grandes, parfaites pour une remise en jambe.


J'indiquais l’autre planche d’un mouvement de tête.

Vague à l'âme

Ft : Léo Oxton

Accroupis, les pieds dans le sable, j’avais posé un œil attentif sur mon élève. Son mouvement de crawl manquait un peu d'entrain, le fait d’être au sol n’aidait pas et l’ado ne semblait pas super super convaincu de l’utilité de cette partie de l’exercice.

Il réalisa une petite pause le temps de poser ses mains sur la planche avant de se lever d’un seul mouvement. En théorie, il n’y avait rien à en redire, mais dans la pratique, je soupçonnais qu’il puisse commettre quelques erreurs une fois sur l’eau.



Une erreur commune était de saisir les bords de la planche au moment de se lever. Dans le feu de l’action, on en oublie parfois la forme et c’est cette situation que je souhaitais essayer de reproduire avec Léo. Il était important qu’il se concentre sur toutes les étapes.

Trois mouvements de bras plus tard et je frappai dans mes mains.


Il s’était relevé, son mouvement était très smooth, nickel.

Bon, et du coup, combien de temps? Huuum, la planche sur laquelle il se trouvait était ma toute première, mes grands-parents l’avaient achetée au Brésil juste après mes huit ans donc…


Mon ton ne trahit pas mon trouble, mais dans ma tête c’était le chaos total. 10 ans?? Déjà? J’avais l’impression que c’était hier!! Je me souvenais très bien d’être le rookie des spots de surf en Polynésie et me cacher derrière le fait que je ne pratiquais le sport que depuis un ou deux ans pour justifier mes capacités. Mes dix ans d’expérience ne me permettaient plus d’excuser mon niveau médiocre et cette constatation me tira un soupir que j’étouffai d’un claquement de main.


Voilà. Baisser les attentes pour éviter le ridicule. C’est ce que j’avais de mieux à faire.

Un coup d'œil vers la mer me fit me rendre compte que la dernière fois que j’étais venu ici c’était avec Kaza, pour l’aider à s'entraîner un peu en vue des examens d'Août. J’avais bien aimé tester ses capacités et l'amener à donner le meilleur d'elle-même.

Peut-être que je pourrais devenir prof en fait. Mais pas prof de Rester le cul sur une chaise, non. Il faudrait que je demande à Mme Ayo comment elle s’est retrouvée à son poste… Je ferai sûrement un bon... Prof de plage...  

Vague à l'âme

Ft : Léo Oxton

Rame rame rame, clap, debout, rame, rame, rame, clap… L’exercice commençait à être un peu répétitif et Léo avait déjà pris le coup de main en plus de s’être échauffé. Il était donc temps de passer à la partie marrante.


La marée était encore relativement basse et les vagues cassaient plutôt loin de la plage, l’écume bouillonnait sur une vingtaine de mètres avant d’atteindre le sable.  

J’accrochai mon leash à ma cheville arrière, me saisit de ma planche et entrepris de donner quelques explications tout en me dirigeant vers la mer.


En quelques pas je me retrouvais à nouveau avec de l’eau jusqu’aux hanches. Je m’allongeais sur ma petite planche et commençai à ramer. L’écume venait tout juste d’atteindre mes chevilles lorsque je réalisai une tentative de drop. Je dirais que j’arrivai à parcourir … 3 mètres… avant de couler ma petite trois ailerons sous mon poids et qu’elle se retrouve propulsée à la façon d’un boulet de canon grâce à la magie d’archimède.

D’un coup sec sur le leash, je la ramenai jusqu’à moi tout en faisant usage de mon alter pour évaporer l’eau qui me goûtait des cheveux.

Vague à l'âme

Ft : Léo Oxton

Et c’est avec vigueur que le petit Oxton s’élance dans ce qui s’annonce comme les débuts d’une grande carrière dans les sports de glisse aquatique!!

J’avais vivement poussé ma planche vers le large tout en observant mon élève se laisser porter dans un équilibre précaire. Il était trop tendu mais pour une première vague c’était excellent. La mousse continuait jusqu’à la plage, lui offrant le temps de sentir ses appuis sur la planche, c’était des conditions idéales pour apprendre et progresser rapidement.

Le surf, comme probablement n’importe quel autre sport, c’est avant tout de la pratique. Plus tu passes de temps à glisser sur ta planche et plus tu progresses! C’est pour ça que les journées sans vagues sont infernales. 3h dans l’eau pour 2 minutes de glisse grand max. On a l’impression d’être nul et de ne pas s’améliorer alors que c’est juste que les opportunités pour apprendre ne se présentent … jamais.


Ah j’étais content. Je fis un signe de la main droite au garçon, le traditionnel salut surfer, pouce et auriculaire dressés, avant de m'allonger sur ma planche et passer la barre de vague.

Je me trouvais à présent juste derrière l’endroit où l’onde rencontrait la montée soudaine du sol marin. C’était bien au-delà du point que j’avais indiqué à mon élève et l’idée n’était pas qu’il me rejoigne, je voulais juste prendre une vague suffisamment puissante pour compenser avec la faible flottabilité de ma petite planche.

J’en laissai passer deux pour me lancer dans la troisième. Un drop rapide et me voilà dans la vague à longer la plage. Un transfert de poids des talons à la pointe des pieds me permettait de diriger ma planche et après quelques zigzags précis, je fini par lui faire remonter la crête de la vague, la projetant dans les airs à quelques centimètres de l’eau avant de retomber dans un grand splash.

Le soleil matinal me chauffait doucement le dos, j’étais dans mon élément pour une fois et ça faisait du bien.

Vague à l'âme

Ft : Léo Oxton

Leo aussi avait l’air de s’amuser. Les opportunités de glisse étaient plutôt nombreuses et il semblait rapidement prendre ses aises sur la planche. Ça faisait plaisir à voir. On aurait presque dit une journée normale. Un peu de surf matinal, puis un petit dej tardif, suivit pr  une activité manuelle, peut-être régler quelques trucs sur mon vélo, après il y aurait un déjeuner léger et une sieste au soleil. Une journée plaisante et efficace quoi.

Le soleil était à présent plus que haut dans le ciel et je pouvais presque entendre les remontrances de ma mamie. “Tu vas avoir un cancer si tu ne te protèges pas!”

Au final c’est le sel qui eu raison de moi. Ma peau était encore sensible des brûlures que je m’étais infligées pendant l'entraînement avec Kaza et les frottements de la planche avaient fini par m'écorcher. Mon torse et mes cuisses étaient parcourus d’une désagréable sensation de picotement, il était peut-être temps de se poser.


J’avais laissé l’écume me porter jusqu’à la plage et en avait profité pour attirer l’attention du deuxième année alors que je passais à côté de lui. C’est avec dextérité que je glissai ma planche sous le bras tout en prenant pied sur le sable fin.

Mon sac contenait deux litres d’eau, un paréo, une serviette et un tupéroir rempli de cake au chocolat fait maison. J’étendis le premier tissu au sol avant de me recouvrir les épaules du second. Je bu la moitié de la première bouteille tout en posant la seconde dans le sable à l’attention de mon camarade.