Pluie d'é-toiles (PV Hanna)

Elles étaient donc sur la même longueur d’onde. Au lieu de protester ou demander une explication, Hanna se redressa et commença à se préparer, donnant son approbation tacite. Les adolescentes finirent donc leurs préparations ensemble, chacune s’enroulant dans une couverture isotherme avant même d’affronter le froid. Ann n’avait pas de toile pour maintenir la sienne en place, elle se contenta donc de faire un nœud au niveau de son col et d’espérer que ce serait assez. C’était sa dernière préparation, et quand elle fut achevée, elle se tourna vers sa camarade pour hocher la tête.

“Bonne chance à vous deux !”

L’enseignante s’écarta et leur indiqua la porte à emprunter. Deux lourds battants d’acier riveté, sans doute traités ou renforcés avec d’autres matériaux pour mieux encaisser les différences de température. Ann s’avança d’un pas déterminé, et la porte réagi à leur approche en s’ouvrant sur une pièce large, haute de plafond, et plongée dans l’obscurité totale. L’intérieur du sas était déjà plus frais que l’extérieur, mais il restait parfaitement supportable. Les ténèbres étaient plus intimidantes que la température. Ann se dit que, si c’était ce qui les attendait, alors cet exercice ne serait pas si mal ; mais elle en doutait. En plus, le temps que les lourds battants du sas se referment sur elles, l’adolescente ne pouvait même pas lire le manuel et prendre de l’avance. Il n’y avait rien d’autre à faire qu’attendre.

Puis la porte dans leur dos acheva de se fermer, et celle devant commença à s’ouvrir. Aussitôt, un courant d’air glacial s’infiltra dans le sas, entre leurs jambes, et remonta le long de leurs dos en se glissant sous les couvertures. Ann frissonna si fort, complètement prise par surprise, qu’elle faillit lâcher les instructions. Pour ne rien arranger, la neige accumulée contre les battants ralentissait l’ouverture et commençait à tomber à leurs pieds. Ann rentra la tête entre ses épaules, enfouit le bas de son visage dans un repli de la couverture, et serra les bras contre son torse. Tous les muscles de son corps tremblaient face au choc thermique, et en cet instant, toutes ses belles connaissances théoriques ne lui permettaient pas de savoir si elle allait s’habituer avant la fin de l’exercice.

Enfin, la porte acheva de s’ouvrir. Le vent s’engouffrait désormais dans la pièce, si fort et assourdissant que l’étudiante préféra courir et sortir au plus vite. Plus question de perdre une seconde. Elle s’immobilisa et chercha Hanna du regard.

“Alors…”

Le vacarme l’obligeait à élever la voix ; mais ce n’était pas aussi grave qu’elle le craignait avant d’entrer. Le vent, près de l’entrée, était plus calme qu’ailleurs. Ann balaya le décor du regard. Comme promis, la neige dans l’air bloquait la visibilité. Quelques affleurement rocheux disparaissaient dans ce voil blanc infini. Le début d’une pente était visible sur leur gauche, avec quelques marches de pierre irrégulières couvertes de poudreuse. Et dans l’air, les flocons tournaient et dansaient avant de venir se poser sur les deux intruses à sang chaud. Ann frissonna encore une fois, puis attaqua enfin la lecture du guide.

“La première étape, c’est de localiser les victimes ! Sans outil adéquat, genre vision thermique, on ne peut pas les repérer ! Mais comme elles ont appelé, on a une description de là où elles sont ! La première…”

Crier pour se faire entendre l’obligeait à prendre de grandes inspirations d’air glacial, qui venait lui attaquer les poumons comme un rasoir, mais elles n’avaient pas le temps de traîner.

“... Est dans une crevasse, au sud de l’entrée, en contrebas de la pente ! A côté d’un petit lot d’arbres ! Il faut qu’on cherche ça !”

“Allez !”

Elle fit un grand geste vers le bas de la pente, s'assura que Hanna arrivait à bouger, puis elle se mit à marcher à son tour. Pas trop vite, un pas à la fois, pour ne pas risquer de tomber. Et pour laisser sa camarade à sang froid passer devant, ce serait plus simple pour la surveiller. A chaque pas, elle essayait d'agripper quelque chose sous la neige avec les ancres de ses pieds, mais sans succès. Elle ne trouvait que des cristaux de glace fins qui s’effondraient immédiatement sous son poids.

Et pour ne rien arranger, elle devait prendre de l’avance sur les instructions. Elles ne pouvaient pas traîner, et elle qui n’avait rien à “faire” avait intérêt à être au taquet sur les instructions. Elle avait donc le regard plongé dans sa lecture, interrompue quand elle se forçait à lever le nez et vérifier que Hanna ne l’avait pas distancée, ou qu’elle ne s’était pas effondrée. Pour l’instant, pas trop de risque concernant le premier. L'araignée géante avait du mal avec le sol instable, plus encore que les jambes humaines d’Interstellar, et elle progressait lentement.

Faire attention en déterrant les victimes à ne pas causer d’affaissement… Ne pas réchauffer trop vite pour éviter les chocs thermiques… Ne surtout pas couper la circulation sanguine pour éviter les nécroses… Normalement, ce genre de victimes s’évacuaient par hélicoptère, mais elles n’en avaient pas pour l’exercice, il faudrait les porter à la main. Ce qui le rendait encore plus compliqué…

“Héé !”

Ann failli lâcher les notes quand le sol s’effondra sous ses pieds. Elle sentit son poids partir vers la gauche, ses épaules basculer, puis toute sa vue se mit à pencher. Sa tête bascula de côté pour révéler un gouffre là où elle s’apprêtait à tomber. Sans neige flottante pour masquer ses profondeurs sombres. En un instant, la panique et les réflexes prirent le dessus. Elle arrêta complètement de réfléchir. Son bras droit se dressa, son poing se serra sur les feuilles, et son ancre se referma sur l’objet solide le plus proche. Aussitôt, sa chute s’arrêta. Son pied gauche était en appui sur une surface solide, sa main gauche tenait un tronc à quelques mètres de là, et le reste de son corps était coincé entre les deux. Elle ne savait pas encore comment elle allait remonter, mais au moins pour l’instant elle ne descendait plus.

Puis, après quelques secondes à inhaler frénétiquement de l’air glacial tandis que son cœur menaçait d’exploser, elle réalisa ce qu’elle avait vu. Et, avec sa main libre, elle fit de grands signes à sa camarade.

“Bakeryu ! J’ai trouvé les arbres ! Et la crevasse ! La première victime ne doit pas être loin !”

Plus qu’à la trouver ! Ce que l’étudiante arachnéenne serait en charge de faire, le temps que Ann trouve comment se sortir de sa situation.

La neige qui se mêlait au vent brouillait les silhouettes et les formes. D’ici, Ann distinguait à peine sa camarade et ne pouvait espérer voir des gestes ou réactions quelconque. Elle devait se fier à la voix d’Hanna, elle-même couverte et atténuée par la tempête artificielle, pour vérifier qu’elle avait entendue. En gros, aucun moyen de savoir. Peut-être que l’araignée n’avait rien entendu et venait à son secours. Peut-être qu’elle n’avait rien compris à ses signes, qui n’était de toute façon pas très clairs, et cherchait au mauvais endroit. Peut-être qu’elle n’avait rien dit et rien remarqué, que ce n’était qu’un mirage causé par le froid et le stress, et qu’elle allait se perdre seule dans le froid avant de succomber à l’hypothermie.

Ou peut-être que tout irait bien, mais ça, Interstellar n’y croyait pas trop. Elle devait bouger et vite pour éviter une catastrophe. Sauf que sa position ne le permettait pas vraiment… Elle arrivait à réfléchir posément, au moins. Sans doute grâce au froid qui lui brûlait les joues et les poumons, mais évitait à son sang de trop chauffer. Elle s’offrit même le confort d’une profonde inspiration, les yeux fermés. Puis toussa alors que sa gorge était attaquée par le froid.

D’abord, quelle était sa situation, exactement. Son pied droit tenait encore sur un bout de quelque chose de solide, mais avec la neige, aucun moyen de savoir combien de temps ça résisterait. Sa main gauche, elle, flottait dans le vide grâce à son ancre, qui avait saisi le tronc d’un arbre voisin. Ça au moins, c’était fiable. Elle commença donc par renforcer sa position et attacher l’ancre de son autre main au bois. Avec ça, et sa bonne condition physique, elle n’avait plus à craindre de tomber… Mais elle flottait toujours au-dessus de plusieurs mètres de rien.

Elle prit une nouvelle inspiration et raidit ses bras, puis son dos, puis ses jambes. Son pied se souleva alors qu’elle se tenait parfaitement droite, à l’horizontale. Puis, comme une gymnaste qui tricherait avec la gravité, elle commença à s’enrouler sur elle-même. Seules ses mains étaient immobiles, le reste de son corps se replia comme une boule. Puis elle se déroula dans l’autre sens, les pieds vers l’arbre. Ses muscles commençaient à tirer, elle devait supporter son poids dans une position inconfortable malgré le froid qui raidissait ses membres, mais ce n’était pas le moment de lâcher. Finalement, ses pieds s’arrêtèrent à un gros mètre du sapin. C’était le mieux qu’elle pouvait faire sans détacher ses mains. A la place, elle figea ses jambes et reprit ses contorsions en sens inverse.

Finalement, à coup de mouvements douloureux et délibérés, il lui fallut quelques minutes pour reposer un pied sur le sol. D’abord elle posa délicatement le bout de sa botte dans la neige, puis elle appuya pour tester la solidité de la couche de glace. Et quand elle fut certaine de ne rien risquer, elle laissa la tension retomber et poussa un long soupir. Mais ce n’était pas terminé. En traînant comme ça, elle avait complètement perdu sa camarade de vue. Hanna était peut-être en train de sombrer dans le coma à quelques mètres de là. Pas le temps de traîner.

“Bakeryu ! Tu es où ?”

Et parce qu’elle n’espérait pas de réponse, elle attacha de nouveau ses pieds à l’arbre et se mit à monter. Un pas après l’autre, à chaque fois un peu plus haut, elle s’éleva dans la tempête. Les bourrasques de poudreuse limitaient grandement la visibilité, mais prendre de la hauteur lui permit tout de même d’entendre la voix de l’autre étudiante. C’était un murmure lointain, très atténué, mais quand même reconnaissable. Alors, en plissant les yeux et en se concentrant, Ann réussit à voir une trace noir qui devait être sa camarade. Elle lui adressa un ample mouvement de bras, sans doute impossible à voir - le costume d’Interstellar se fondait vraiment dans le paysage - puis sauta de toutes ses forces dans sa direction. La distance à couvrir était grande, et il y avait la crevasse entre les deux adolescentes, mais Ann utilisa ses ancres pour se propulser encore plus fort et surgir à travers le voile blanc, droit devant la mutante.

“Me voil~~ Ah !”

Bien sûr, avec sa vitesse et la hauteur de la chute, elle s’enfonça dans la couche de neige jusqu’à la taille. Ce qui la mit juste en face de la fausse victime, sous le ventre de Hanna.

“Oh, tu l’as trouvé, super ! Il faut l’emmener dans une cabane, c’est par là.”

Elle tendit le bras, son poing encore fermement serré autour des instructions, dans la direction approximative du refuge.

“Mais d’abord, tu peux m’aider à remonter ? Je suis un peu coincée.”

Pas la meilleure binôme, c’était le cas de le dire, pensa Ann alors qu’elle se laissait hisser hors de la neige. La mutation de Hanna était sans doute très utile dans beaucoup de situations, mais ici c’était un immense poids mort. Mais en vouloir à sa camarade pour ça serait injuste. L’étudiante aux cheveux blancs ne s’était pas montrée beaucoup plus utile… Son Alter était plus générique, mais elle manquait surtout des compétences nécessaires pour du sauvetage. Les premiers soins, ça oui, elle gérait. Mais trouver les mannequins et les déplacer, avancer malgré la tempête et la neige… Ann prenait ces études d’héroïsme un peu par-dessus la jambe. Elle étudiait plus que tout le monde mais c’était par habitude, et elle trouvait ça presque facile. Le sport aussi, elle avait toujours fait beaucoup d’exercice. Les combats, elle ne gêrait pas du tout mais c’était bien le seul sujet qui l’intéressait et qu’elle voulait apprendre, c’était excitant. C’était la première fois depuis son arrivée à Yueï qu’elle avait l’impression de bloquer sur quelque chose. Qu’elle avait encore des progrès à faire.

“T’inquiètes. Allons à la cabane, et on verra sur place. Si c’est l’endroit où on doit déposer les fausses victimes, ça doit bien être chauffé.”

C’était frustrant. Et pourtant, ce n’était pas son genre d’être frustrée comme ça. Elle avait toujours été studieuse, sérieuse, déterminée et appliquée. Du genre à surmonter les obstacles et à se donner à fond, jusqu’à ce que ça devienne une seconde nature. Mais là, elle ne savait pas si elle voulait vraiment se donner plus à fond. Et de toute façon, c’était pas le moment de penser à ça. Elle se hissa sur le dos de Hanna, se demanda si elle n’allait pas briser sa camarade en deux avec son poids - comme ça pourrait être le cas avec des félins ou canins, dont la colonne vertébrale n’était pas du tout capable de supporter ce genre de fardeau - puis se dit que l’adolescente arachnéenne n’aurait pas proposé sinon. Alors elle s’accrocha à ses épaules, se plaqua contre elle en espérant partager un peu de chaleur corporelle, et consulta une dernière fois les instructions.

“Je ne sais pas combien on est supposées en ramener, mais avec un, on ne sera déjà pas la moins bonne équipe.”

Une maigre consolation, mais elles devraient s’en contenter. Et la prochaine fois, elles pourraient faire mieux. Elles devraient faire mieux. Ann rentra la tête entre ses épaules et serra la mâchoire. Beaucoup trop frustrant, elle ne savait plus gérer ce genre de sentiments. Même penser à autre chose ne marchait pas, malgré ses efforts pour se concentrer sur l’instant présent. Même alors qu’elle levait le bras, et pointait de façon aussi visible que possible, vers une silhouette noire dans la tempête.

“Là, ça doit être ça ! On y est presque !”

Ce serait une bonne étape, pour un peu de repos et de réconfort, mais pas la fin. Après avoir déposé le mannequin, il faudrait encore qu’elles ressortent du simulateur.

Il fallut encore une longue minute, au moins, pour que les étudiantes atteignent la cabane. Et, malgré tous les espoirs d’Ann, celle-ci n’était pas chauffée. Il y avait une cheminée, des bûches, de quoi s’asseoir, mais l’intérieur était presque aussi froid que l’extérieur. Heureusement, Bakeryu était plus réactive qu’elle. Ou plus désespérée. En tout cas, alors que l’étudiante à lunettes s’appuyait contre le mur à côté de la porte fermée et se contentait de croiser les bras contre son ventre, sous la cape isotherme, la mutante arachnéenne s’affairait déjà à allumer le feu. Ann se sentait vraiment inutile. Alors elle se força à faire la seule chose dont elle était vraiment capable sur le moment, à savoir explorer les instructions.

“T’en fais pas, prends ton temps.”

Techniquement, s’il fallait mimer du secourisme, elle savait quoi faire. En cas d’hypothermie, il fallait réchauffer lentement pour éviter les chocs thermiques et nécroses, mettre en position pour faciliter la circulation sanguine… Mais peut-être que, pour les mannequins et pour l’exercice, il y avait des consignes spécifiques. Le temps que Hanna ait fini avec le feu et s’approche, ses pattes encore très raides - difficile de lui en vouloir - elle avait trouvé la section sur ce qu’il fallait faire avec les victimes une fois à l’abri. Et dès la première ligne, elle fut convaincue que non, rien de spécial, il fallait bien faire les vrais premiers soins. Quelle perte de temps, elle aurait dû s’y mettre tout de suite.

Le temps qu’elle trouve cependant, Bakeryu s’était approchée et commençait à s’occuper du mannequin. Ann se contenta de lui dire quoi faire, quand sa camarade ne s’en sortait pas déjà toute seule. Juste pour avoir l’impression de servir. Puis, alors que Hanna se débrouillait et appliquait machinalement les instructions, l’étudiante aux cheveux blancs se décida à changer de sujet.

“Dis…”

Son visage affiche d’abord une moue un peu gênée. Puis une grimace renfrognée. Puis un air dépité. Et enfin, alors que sa lutte interne touchait à son terme, un regard déterminé. La décision finale ne lui reviendrait pas, mais elle devait au moins proposer.

“J’ai repéré le chemin vers la sortie du simulateur, avec le plan. On peut y être rapidement, c’est pas très loin. Donc si tu veux sortir, pas de problème. Mais…”

Elle déplia le papier et posa le doigt sur une des pages d’instructions. Peu de chances que Hanna puisse lire ou comprendre ce qu’elle lui montrait, installées comme elles étaient. Mais elle pouvait au moins discerner qu’une moitié de la page était occupée par un plan.

“... Il y a une autre victime pas loin de la cabane. Plus proche que celle qu’on a déjà ramenée, normalement. Alors je ne veux pas t’imposer quoi que ce soit, mais si on y va…”

Si elles y allaient, ce serait l’occasion de prouver qu’elles n’étaient pas si nulles, malgré les éléments qui se liguaient contre elles. Non, qu’elle n’était pas si nulle, au singulier. C’était une frustration extrêmement égoïste qui poussait Ann à faire cette proposition. Elle voulait la preuve qu’elle pouvait surmonter ces galères aussi, qu’elle pouvait bien sauver des gens aussi bien que les autres élèves. Même des gens factices.

“... Tu pourrais t’occuper du plan, et moi du sauvetage. Comme ça, tu n’auras pas à trop t’enfoncer dans la neige. Et tiens.”

Elle décrocha également la cape qui reposait jusque-là sur ses épaules, et la tendit à sa camarade.

“Tu as plus de volume à couvrir. Et si on est assez efficaces, je pourrais tenir sans.”

Ann hésita un instant. La réaction très honnête et presque gênée de sa partenaire était très loin de ses propres idées très cyniques. Ce n’était pas le moment d’être aussi négative, et de ne penser qu’à elle. Elle fit le tour d’Hanna après lui avoir posé la cape sur les épaules, et vint placer son poing devant elle pour un fist-bump.

“Bien sûr qu’on reste ensemble. Et si j’ai besoin de m’ancrer sur toi je te préviendrais, que tu ne sois pas surprise. Regarde.”

Elle tendit ensuite le document à sa partenaire et lui indiqua les pages importantes. Les règles de l’exercice, les étapes pour les premiers soins, l’emplacement de la cabane, de la sortie, et de la victime qu’elles allaient sauver sur le chemin. Techniquement, Hanna avait sans doute raison. En changeant de rôle comme ça, elle outrepassaient le défi principal de l’exercice, à savoir la difficulté de communiquer. Ann ne dépendait plus des instructions de son guide, elle avait lu ces instructions par elle-même. Et si elle n’avait pas cherché à les apprendre par cœur, ce qui voulait dire qu’elle pouvait oublier des morceaux ou se tromper, elle en avait quand même retenu le plus gros, ainsi qu’une compréhension générale qui l’aiderait pour déchiffrer ce que Hanna lui dirait. C’était de la triche. Mais elles se mettaient en danger dans cet exercice, le froid était bien réel comme le serait une situation de vie ou de mort une fois devenue professionnelle. Et de toute façon…

“Si elle nous fait des reproches, il suffira de dire que les Héros doivent être flexibles sur le terrain. Et de toute façon, l’exercice est plus instructif si on essaie chacune les deux rôles, non ?”

Une fois les explications terminées, elle laissa les notes entre les mains de sa camarade avant de trottiner vers la porte. Une fois dehors, elle ne pourrait plus compter que sur sa chaleur corporelle pour ne pas finir gelée. Il faudrait bouger, sans s’arrêter, quitte à se forcer. Alors, avant même d’ouvrir la porte, elle se força à trottiner sur place et à lever les genoux pour bien faire battre son cœur et pomper son sang.

“On y va quand tu veux !”