[Jour 2] Sur le grand pont (RP global)

Retour sur le grand-pont

"...100."

Je me relevais et essuyais la sueur sur mon front et mon torse nu. Mes vingt minutes d’exercice matinal étaient terminées, il me restait juste assez de temps pour prendre une douche avant que le petit-déjeuner ne commence à être servi. C’était un peu agaçant de se réveiller à 6h du matin qu’importe le contexte, programmé par mon ancien métier. Mais je n’avais pas abusé sur la boisson, et j’avais même été raisonnable sur mon heure de coucher : 1h30 du matin, j’avais poussé le bouchon bien moins loin que les autres convives lors de cette soirée initiale. D’autant plus que je n’avais pas bu une goutte d’alcool.

Après une douche rapide, je fis parmi les premiers à profiter du petit-déjeuner. Il n’y avait pas foule, à cette heure-ci, d’autant plus que beaucoup devaient récupérer de leur soirée d’hier. Une fois mon repas englouti, je m’offris une rapide promenade digestive sur le grand-pont avant de revenir à l’intérieur en quête de divertissement. Là-bas, je croisais White Muse et… C’est encore une autre histoire.

Vers 10h, après l'inénarrable confrontation dramatique avec l’héroïne, je refis surface. J’avais définitivement besoin de reprendre l’air après… Quoi que ce fut. Oh, ce n’était pas désagréable, objectivement, juste très étrange.

Je portais toujours mes éternels gants violets. Le modèle un peu plus léger que je privilégiais au quotidien à l’inverse de celui, plus épais, de la veille. J’avais enfilé un débardeur noir par-dessous une chemise colorée à manches courtes, que je portais ouverte (je préférais cacher mes cicatrices et brûlures, et pouvais donc exposer bras et jambes, mais pas mon torse). Un short brun et des sandales complétaient ma panoplie de vacancier. Sans oublier une paire de lunettes de soleil.

Juste à temps, j’entendais dire que la simulation et la piscine étaient ouvertes. La simulation, très peu pour moi. J’avais fait ma dose de sport, et mieux valait éviter de faire le malin et montrer que Reina le gentil planificateur funéraire était également un super combattant hyper-entraîné, d’autant plus que ce genre de petit théâtre virtuel incluait probablement sa dose de flammes et de stress, bref, l’antithèse de ce que je cherchais ici. La piscine me faisait de l’œil, par contre. Niveau détente du corps et de l’esprit, il n’y avait pas mieux. Après m’être procuré une canette de thé glacé, je fis donc route vers les lieux, qui commençaient à se remplir petit à petit.

Mon regard, caché derrière mes lunettes, se promenait sur les nageurs, nageuses, badauds, nageuses, serveurs et encore les nageuses quand j’aperçus soudain… Miss Hanazawa, encore. Bon, je n’allais pas me décarcasser pour la saluer, quoique j’aurais adoré la pousser “accidentellement” dans l’eau (je décidais d’ailleurs que mon séjour ne serait pas réussi si je ne réussissais pas à faire ça dans les jours à venir). Après tout, nous nous étions déjà vus hier. Enfin, je lui avais dit bonjour. Et elle n’avait pas répondu. Et…

Minute, est-ce qu’elle m’avait snobé involontairement, hier ? Avec la foule, le bruit, son Alter aurait...Ça n’allait pas du tout. J’acceptais d’être ignoré, pas oublié.

Mais bon.

J’avais la flemme, elle était un peu loin.

Je me contentais donc d’attendre qu’elle regarde par hasard dans ma direction pour relever mes lunettes de soleil sur mon front et lui adresser un sourire et un geste de la main. Puis je baissais mes lunettes de nouveau et revint à mon thé glacé et mes... Autres activités.

Merci patron, quel plaisir de travailler pour vous

J’avais posé le regard sur une charmante femme en robe, mais bien vite ma vision fut occupée par une petite binoclarde à l’air bien plus contrit que ce qu’elle voulait faire croire. Je pensais qu’elle s’arrêterait au salut rendu de loin, mais c’était oublier le fait qu’elle me prenait, au même titre que le reste de la population mondiale, pour un immense abruti.

Enfin bon. Je la comprenais, en soi. Et si mes pensées se faisaient un peu irascibles, c’était probablement parce que j’avais perdu de vue la jolie dame. Je rendis à Lady Moriarty son sourire en remontant mes lunettes de soleil sur mon front.

"Madame Hanazawa, un plaisir de vous voir ici !"

J’avais l’expérience des missions sous couverture et je commençais à connaître l’esprit tordu de Ryou.

"J’imagine que vous êtes invitée d’honneur ? J’ai eu la chance d’être tiré au sort, haha, vous pensez bien qu’un modeste commanditaire d’encens comme moi ne pourrait pas se payer une place sur un tel navire. Vous arrivez à vous détendre ? Personnellement, je passe un merveilleux moment, je suis venu ici pour penser un peu à autre chose qu'au travail… Mais bon, si vous me passez l’expression, les gens ne vont pas s’arrêter de mourir, si besoin est je suis toujours prêt à signer des contrats, hahaha."

Compris, Ryou ? J’ai été tiré au sort, je n’ai pas d’objectif sur ce navire au-delà de la farniente, mais si tu as besoin d’un gros bras, tu peux me faire signe. Et au passage, paie-moi plus (ce dernier sous-entendu était surtout là pour l’agacer, ma paie était plus que confortable).

"Mais assez parlé de moi… Vous, vous arrivez à vous détendre ? Ça ne doit pas être facile, maintenant que le bal est passé, vous êtes une véritable vedette après tout."

Je lui renvoyais la balle (même si j’avais eu ma dose après… Cette partie de ping-pong ô combien particulière). J’imaginais bien pourquoi elle était là, officiellement. Mais est-ce que le Dragon de la Ménagerie avait une idée en tête ?

Pour être honnête. J’aimerais bien que ce ne soit pas le cas. Déjà parce que je n’avais pas envie de faire quoi que ce soit. Ensuite parce que si elle avait un plan quelconque, alors je risquerais d’interférer avec en la balançant à la flotte, et j’avais, mais alors vraiment très envie de la balancer à la flotte. Et, enfin, parce que tout en parlant, j’avais repéré de nouveau la jolie fille du coin de l’œil.

Des vacances, enfin

Parfait. Pas de boulot en perspective, elle était juste là pour flâner et se pavaner, je pourrais la jeter à l’eau sans le moindre remord. Enfin, j’aurais de légers remords quand même. Elle m’avait tendu la main quand j’en avais besoin, avait dépensé des sommes délirantes pour me soigner et changer mon visage. Elle aurait pu se débarrasser de moi à jamais, mais m’avait fait confiance, à un moment où la police elle-même m’avait tourné le dos. Et aujourd’hui encore, malgré son air grognon et sa réticence, elle me confiait la direction d’opérations importantes et me laissait agir sur le terrain avec une liberté absolue.

Était-ce vraiment bien malin de vouloir lui jouer une blague puérile ? De compromettre une relation neutre qui pourrait devenir chaotique ? Mordre la main qui me nourrit, même sans malice ? Est-ce que ça en valait vraiment le coup ?

Oui.

Oui, carrément, et ce serait vraiment marrant. En fait, je devais juste faire en sorte qu’elle ne sache pas que cela vienne de moi. Et puis, elle qui avait toujours chaud, ça lui ferait peut-être du bien, qui sait.

"Je n’y manquerais pas, madame Hanazawa ! Profitez bien de la piscine."

Je me séparais de la patronne pour aller méditer à mon plan "Extinction des feux” plus loin. Au bord de la piscine, là, un transat sur lequel je m’installais confortablement et… Et le retour de la jolie dame, en maillot cette fois, me fit complètement oublier Ryou.

Aaaaaaaah. C’était le pied. L’air marin, les filles, l’absence de travail, la bonne bouffe… Lové sur la chaise longue, je me laissais porter par l’ambiance, et bientôt, en dépit de l’environnement quelque peu bruyant et agité, je laissais tout disparaître autour de moi. La piscine, la belle dame, Ryou, le vent marin, le ping-pong, Rabbit, le combat, la police, les héros... Tout s'évapora, et je sombrais dans un sommeil léger.