Pull the Trigger

Lorsque la militaire avait été déployée au pays du soleil levant, elle ne s’attendait pas à mettre un jour les pieds dans cette Mecque de l’héroïsme nippon qu’était Yuei. Voir les lieux depuis l’extérieur ça oui, il aurait été dommage de ne pas au moins venir y jeter un coup d’œil à l’occasion, mais y entrer elle-même, et pour y enseigner en plus, fut-ce à titre d’intervenante temporaire ? Non, elle ne s’attendait définitivement pas à cela.

Et pourtant, c’était bien ce qui était arrivé. Apparemment l’excentrique mais brillant principal du lycée le plus prestigieux du pays voyait dans la présence des contingents étrangers une opportunité éducative à ne pas laisser passer, celle d’exposer ses élèves à une autre perspective tout en leur permettant d’acquérir des compétences peu répandues chez les justiciers locaux. Il avait donc invité les agences extra-nationales à envoyer quelques-uns de leurs employés pour animer des modules optionnels ouverts à tous les étudiants de la filière héroïque, quelle que soit leur année d’étude. En effet, il n’y avait aucune garantie que ces agences opèrent toujours sur le sol japonais l’an prochain, il fallait donc en profiter au maximum tant que c’était encore possible...

Le raisonnement se tenait, mais il ne suffisait pas à expliquer pourquoi c’était l'électrokinésiste qui avait été invitée à représenter l’agence Red Star. Elle avait des soupçons bien sûr, et ceux-ci ne tardèrent pas à se confirmer lorsqu’elle vit la liste des inscrits à l’activité du jour. Comme quoi, l’avertissement de ses supérieurs s’avérait prophétique : il n’y avait pas de coïncidences avec Nezu, ce n’était pas pour rien que sa personnalité lui avait valu une telle réputation. Restait cependant à savoir quel était l’objectif de cette manipulation.

À voir l’expression du professeur Aizawa, lui non plus ne le savait pas avec certitude, mais il devait se douter de quelque chose. Son visage laissait transparaître un mélange de scepticisme, d’agacement et de fatigue chronique, cette dernière étant presque perpétuellement présente chez lui, d’après ceux qui le connaissaient. Quels que soient les doutes qu’il nourrissait envers la présence de la chinoise ou les intentions de son patron, le héros borgne se montra néanmoins parfaitement professionnel en examinant l’équipement qu’elle avait amené avec elle. Pas d’exosquelette aujourd’hui, ce serait absolument excessif pour ce qui était prévu au programme, elle avait donc dû se contenter de sa tenue d’exercice, assortie d’un matériel plus basique.

« C’est bon. » annonça-t-il finalement en lui rendant sa dernière pièce d’équipement, un couteau en plastique avec une tige de métal à l’intérieur de la fausse lame pour qu’elle puisse le manipuler par magnétisme. L’homme émit un soupir en reportant son regard vers l’entrée du terrain d’entraînement – conçu pour imiter un environnement urbain –, par laquelle les élèves ne tarderaient pas à arriver. « Je continue de penser que c’est une mauvaise idée. J’ai vu ce que cette... chose peut faire, cela me paraît inapproprié pour un simple exercice. »

« Naruhata ? » interrogea-t-elle en jetant un œil à la mallette renforcée à ses pieds. Le professeur ferma brièvement son œil unique, soupira à nouveau puis hocha la tête.

« Oui. Je comprend le but de la manœuvre, nous devons faire en sorte que nos élèves soient préparés face à cette recrudescence d’utilisateurs, mais je ne crois pas que ce soit la meilleure façon de faire. Surtout si en plus Nezu en profite pour jouer un de ces tours qui n’amusent que lui. »

Le ton était le même que celui de tous les employés forcés de supporter les caprices de leur patron, mais le justicier à tête de déterré semblait résigné à son sort. Zhihao trouvait qu’il exagérait un peu et entreprit de le rassurer.

« Je ne sais pas pour votre principal mais j’ai déjà été plusieurs fois des deux côtés de l’exercice. C’est une partie du cursus tout à fait normale en Chine, et les accidents sont loin d’être aussi nombreux que vous le pensez, même sans le filet de sécurité que vous représentez. »

« Nous verrons. » répliqua-t-il, laconique et toujours aussi sceptique. Un signal sonore retentit quelques secondes plus tard, indiquant l’ouverture de la porte et l’arrivée des élèves. « Nous allons pouvoir commencer. »

Cela faisait quelques temps que les cours étaient un peu plus calme que d'habitude, les professeurs étant souvent absent pour des réunions à l'académie ou à l'extérieur, résultant évidemment par des bruits de couloir de toutes sortes, une attaque imminente de l'académie, des entraînements particulier, certains parler même de leur inquiétude concernant l'école qui serait en difficultés avec les politiques…

Hanna n'en avait pas grand-choses à faire, ce genre de rumeurs n'avait aucun fondement, certains étudiants aimer simplement s'inventer des histoires, ça ne servait à rien de se faire des films avant d'en être sur…

Finalement, une des rumeurs s'avéra vraie. Vlad king annonça à ses élèves la possibilité de participer à certain cours exceptionnels et multi-classes, animé par des Héros étrangers. Expliquant l'intérêt qu'avait ces sessions afin que les élèves puissent apprendre d'une manière différente de celle Japonaise.

En effet, ça avait du être compliqué a organiser avec les différent contingent étranger. Il y avait probablement des réticents, que ce soit de leur coté ou du coté de Yuei.

Leur professeur principal leur distribua une feuille avec la liste des exercices proposés, insistant bien sûr le fait qu'ils n'étaient pas obligatoires.
Parmi eux, un des cours intéressa particulièrement l'araignée, un qui portait sur le trigger, avec combat contre l'héroïne Lodestone sous l'effet du produit, supervisé par Aizawa sensei.
Madame Meng allait vraiment prendre de ce truc ?… Bon… Elle devait savoir ce qu'elle fait. Tant qu'elle ne se met pas en danger.

C'était suffisamment intéressant pour que, quelques jours plus tard, Hanna se retrouve devant la porte du terrain prévu pour cet exercice, elle était loin d'être seule, de nombreux étudiants avaient également trouvés beaucoup d'intérêt à tout ça.
La jeune étudiante essayait de rester un peu à l'écart du groupe, trop de gens qu'elle ne connaissait pas, Trop pour essayer de surmonter sa timidité…

Comme pour éviter de la gêner davantage, les portes s'ouvrirent doucement, dévoilant Eraser Head et Lodestone proche de l'entrée, ainsi que le décor urbain qui allait être utilisé durant l'exercice.

Les élèves pénétrèrent dans le terrain d'entraînement et prirent place devant les professeurs, prêt à recevoir de plus ample instructions.

Deux douzaine d’élèves franchirent les portes pour venir s’arrêter devant leur professeur et son invitée, soit un peu plus d’une classe complète de filière héroïque, ou le cinquième du nombre total d’apprentis-justiciers à Yuei. Pas mal du tout pour une première fois, même si la majorité de leurs condisciples n’avait pas fait le déplacement. Zhihao était curieuse de connaître les raisons de ceux qui ne s’étaient pas présentés : souhaitaient-ils se concentrer sur le cursus principal plutôt que sur un module optionnel, étaient-ils plus intéressés par un autre desdits modules, voulaient-ils conserver le peu de temps libre que leur laissait un emploi du temps déjà éprouvant ? Autant de motifs parfaitement valables.

Quant à ceux qui avaient peur de se retrouver confrontés à une utilisatrice de Trigger… il faudrait bien qu’ils apprennent à surmonter cette peur un jour, cependant ils n’étaient pas en Chine, ce n’était pas à elle de décider de ce genre de choses. Le problème toutefois, c’était ceux qui au contraire pensaient qu’ils n’avaient pas à s’en faire et que ce cours n’était qu’une perte de temps. La militaire aurait aimé pouvoir les détromper en personne, mais il lui faudrait se contenter de laisser les élèves regroupés face à elle de s’en charger à sa place. Une information de seconde main n’aurait pas autant d’impact qu’une leçon administrée en direct, mais ce serait toujours mieux que rien.

Pendant qu’Aizawa attendait que les lycéens finissent de discuter entre eux, elle examina chacun d’eux d’un œil critique, élaborant d’ores et déjà une série de plans d’attaque et relevant au passage quelques choix vestimentaires douteux que leurs porteurs reconsidéreraient sans doute d’ici la fin de la séance. Son regard s’attarda une fraction de seconde supplémentaire sur la haute silhouette d’Hanna, mais elle ne donna pas d’autre signe de l’avoir reconnue : elle était là en qualité de sergent-instructeur, et cela voulait dire pas de favoritisme.

Finalement, le professeur borgne haussa la voix pour enjoindre ses ouailles au silence : « Bon, s’il ne manque personne, nous allons pouvoir nous y mettre. Pour ceux qui n’auraient pas fait attention aux explications de leur professeur avant de signer le formulaire, je vous rappelle que du fait du vide de pouvoir laissé par All for One ainsi que de l’absence d’All Might, le Japon traverse actuellement une période tendue marquée par une hausse de la criminalité… et par l’apparition de nouvelles formes de criminalité, ou le retour en force de formes que nous pensions disparues. Afin d’y faire face, Yuei doit adapter ses enseignements, et a choisi pour cela de se reposer sur l’expertise de nos homologues étrangers. Pour nous parler des dangers du Trigger, un problème qui prend de plus en plus d’ampleur, nos confrères chinois ont eu l’amabilité de nous envoyer une spécialiste ; je vous laisse donc entre les mains de Lodestone ici présente. »

Son introduction terminée, l’homme à l’écharpe fit deux pas en arrière, laissant l’électrokinésiste seule face aux élèves. Certains d’entre eux la regardaient avec curiosité, notant son choix de tenue fort éloigné de celui de la plupart des héroïnes dont ils avaient l’habitude : un simple pantalon militaire et un haut noir sans manches, laissant voir ses bras marqués par de multiples cicatrices ainsi que son bracelet-injecteur.

« Bonjour. Comme l’a dit Eraser Head, je suis Lodestone, et je suis venue vous proposer un exercice qui fait partie du programme de toutes les écoles héroïques chinoises. » se présenta-t-elle. « Mais avant cela, je vous demanderai de me dire ce que vous savez déjà du Trigger, ce afin que je puisse savoir avec quoi je travaille et rectifier les informations erronées s’il y en a. Le but de la leçon est que vous sachiez ce qu’est la substance, comment elle fonctionne, ce dont elle est capable, et surtout de vous apprendre à la respecter. »

Ce dernier mot provoqua une série de murmures parmi les rangs des adolescents, qu’elle laissa se prolonger quelques secondes avant de reprendre.

« Oui, vous m’avez bien entendue, la respecter. Beaucoup de héros pensent qu’ils n’ont rien à craindre de ceux qui l’emploient, que ce sont des junkies décérébrés, des faibles qui prennent un raccourci au lieu de s’entraîner pour remédier correctement à leur infériorité. Ils ont tort, et c’est souvent la dernière erreur qu’ils font. Je vous renvoie à vos cours d’histoire : les samouraïs d’antan pensaient que les armes à feu étaient des armes de lâches, et où sont-ils aujourd’hui ? Tombés sous les balles. C’est la même chose avec le Trigger ; pour pouvoir combattre ceux qui s’en servent, il faut d’abord arrêter de les sous-estimer. »

Elle forçait un peu le trait mais c’était nécessaire pour qu’ils traitent le sujet avec toute la gravité qu’il méritait. Ils n’étaient pas la cible première de ce petit discours, toutefois : s’ils étaient ici c’était parce qu’ils savaient déjà plus ou moins qu’il était important pour eux d’apprendre. Non, les véritables destinataires étaient ceux parmi les absents qui partageaient la croyance qu’elle venait de dénoncer. Il n’y avait plus qu’à espérer que son public se ferait le relais de ses propos… mais ça, c’était pour plus tard. Pour l’instant, elle avait un cours à dispenser.

« Très bien, maintenant que nous en avons fini avec le préambule, qui veut passer en premier ? Allez-y, dites-moi ce que vous savez. »

L'étudiante avait pris place sagement, attendant que les autres aient finis de discuter, pendant ce temps elle regardait Eraser Head et Lodestone, cette dernière regardait les élèves présents, croisant au passage le regard de Hanna un bref instant, elle semblait être pensive, sûrement étonnée par les étudiants de Yuei, il faut dire que leur discipline était très différente de celle militaire dont l'héroïne chinoise avait l'habitude.

Certes ils pouvaient parraitre un peu dissipés à première vu, mais dès que le professeur Aizawa prit la parole, les silence et le calme furent immédiat.

Hanna sourit légèrement, espérant tout de même donner une bonne image des étudiants de Yuei malgré tout.

L'enseignant fit une courte présentation de Madame Meng, après avoir expliqué le cheminement ayant mené à la création de ces cours exceptionnels et organiser avec les contingents étrangers.

L'héroïne chinoise pris à son tour la parole, expliquant que ce cours faisait partie du programme des écoles héroïque de son pays, ils devaient vraiment être confrontés au problème du trigger plus souvent que les Héros japonnais.

Lodestone voulait savoir ce que les étudiants connaissaient sur le produit et parla également de le respecter et de surtout pas le sous-estimer.

Hanna repensa au combat auquel elle avait put être spectatrice, celui avec la fourmi. L'étudiante avait put voir, après quelques recherches, l'apparence de base de la vilaine, c'était dur à croire qu'il s'agissait de la même personne… Alors, sous-estimé une drogue permettant de modifier à ce point un alter et permettant quand même à son utilisatrice de prendre tout un immeuble en otage… Ouais, il ne fallait vraiment pas le prendre à la légère.

Certains élèves répondirent à sa demande.

Kimiko : C'est une drogue qui modifie les capacités physiques !

Mine : Les possibilités de l'alter surtout.

Daisuke: Il nous semble que le trigger a été créé par un groupe de Yakuza

Mine : Celui du Japon, il y a d'autre forme un peu partout dans le monde.

Hanna : Si je ne me trompe pas, elle se prend par injection, elle affecte également les capacités mentales, mais dans le mauvais sens, plus on en prend, plus on devient fort et moins on peut réfléchir correctement.

Katsumi : Et puis, comme toutes les drogues, elle est addictive et potentiellement dangereuse pour celui qui en prend.

Les volontaires ne manquaient pas, tant mieux. La chinoise aurait tout à fait pu dispenser un cours magistral, mais une méthode plus interactive donnait de bien meilleurs résultats en matière de mémorisation et de compréhension des leçons inculquées. Et si quelques inexactitudes s’étaient glissées dans leurs réponses, celles-ci n’étaient pas des plus graves, et ils avaient déjà saisi l’essentiel. Restait donc à rectifier ce qui devait l’être ainsi qu’à compléter le reste.

« Vous connaissez les grandes lignes, c’est bien. » approuva-t-elle. « Plus précisément, le Trigger n’est pas une molécule unique mais un cocktail chimique complexe, dont nombre de composants ont des usages pharmaceutiques parfaitement légitimes et dont on ignore l’origine exacte ; les spécialistes pensent qu’il a été développé indépendamment à plusieurs endroits de la planète par différents chercheurs poursuivant des buts similaires. Si les éléments de base sont les mêmes pour toutes les formules, ceux qui en fabriquent cherchent perpétuellement à améliorer leur produit, et à ce titre il existe une grande variété de recettes. Je crois savoir qu’Eraser Head a été confronté à l’une de ces variantes il y a quelques années, dans la ville de Naruhata ? »

Elle tourna la tête vers le héros en question, sauf que plutôt que de saisir cette opportunité de conter ses exploits à ses élèves, celui-ci n’émit qu’une brève réponse affirmative, sans développer davantage. Très bien, s’il insistait pour la laisser faire cours toute seule…

« Soit dit en passant, le Trigger est l’un des plus grands miracles de la médecine moderne. Une substance capable d’affecter de manière uniforme la quasi-totalité des détenteurs d’Alters, quand leur physiologie diverge au point que l’on a du mal à croire qu’ils appartiennent tous à la même espèce… quoi que l’on pense de l’utilisation qui en est faite, la prouesse scientifique est indéniable. »

Cette réplique-ci en interloqua plus d’un, mais cela faisait partie du respect dont elle parlait plus tôt ; le même genre de respect dû à une arme ou à un animal dangereux.

« Bref, vous n’êtes pas sans savoir que les gens ne naissent hélas pas égaux en matière de pouvoirs. Prenons l’exemple de la pyrokinésie : une personne peut naître capable de générer une flamme comparable à celle d’un briquet tandis qu’une autre pourrait égaler un lance-flamme. La première personne peut s’entraîner d’arrache-pied pendant des années pour parvenir à ce niveau… et pendant ce temps-là, la seconde n’aurait eu besoin que d’une fraction de ses efforts pour devenir le prochain Endeavor. De la même façon, la plupart des criminels ne bénéficient pas des mêmes avantages que les héros, qui sont essentiellement recrutés parmi la deuxième catégorie de personnes. Leurs Alters sont en moyenne moins puissants, ils ont rarement l’occasion de s’entraîner des années durant sous la supervision de professionnels qualifiés et expérimentés avec du matériel à la pointe de la technologie, ne peuvent compter sur de grandes firmes pour leur fournir costumes et équipements de soutien… Il leur faut donc trouver un autre moyen de combler l’écart, et c’est souvent là que le Trigger entre en jeu. »

La militaire reprit son souffle après avoir désigné successivement Aizawa, le terrain d’entraînement autour d’eux puis les tenues de combat des lycéens afin d’illustrer son propos. Cela pouvait avoir l’air d’une digression, cependant elle pensait cette explication nécessaire afin qu’ils comprennent la mentalité de ceux qui avaient recours à cette drogue. L’être humain se distinguait du reste du règne animal par sa capacité à utiliser des outils sophistiqués afin de surpasser les limites que lui imposaient son corps, après tout, il ne faudrait pas qu’ils l’oublient.

« Comme l’a dit mademoiselle Bakeryu, la substance est généralement administrée par intraveineuse afin d’assurer une diffusion rapide et homogène dans l’organisme ; il est également possible de l’ingérer ou de l’inhaler mais ces méthodes sont déconseillées, car elles ne garantissent pas son assimilation correcte. Vous avez peut-être déjà vu des images de vilains se plantant une seringue dans le cou ; si l’acte est visuellement impressionnant, il s’agit néanmoins de l’équivalent de ces gens qui brandissent leur pistolet sur le côté, « gangsta-style » – ceux d’entre vous qui ont choisi de participer au module sur les armes à feu apprendront vite pourquoi c’est une mauvaise idée. Les utilisateurs intelligents se servent plutôt d’un dispositif comme mon bracelet-injecteur ou une pompe à insuline modifiée. » continua-t-elle en tapotant l’objet en question pour attirer l’attention des élèves.

« Une fois administré, le Trigger peut amplifier l’Alter de différentes façons : en augmentant simplement sa puissance, en faisant disparaître certaines de ses limites – par exemple, un pouvoir normalement activé par contact pourra potentiellement être utilisé à distance – ou en causant l’émergence de facultés additionnelles, parfois au point que la personne se retrouvera effectivement dotée d’un deuxième Alter, ce pourquoi la prudence est de mise car il est difficile de prévoir avec certitude quels seront les résultats d'une injection. Évidemment, tout cela a un prix : cela épuise l’organisme et désinhibe la personne, à divers degrés. Il n’est pas rare que l’utilisateur devienne ainsi plus agressif, impulsif et imprudent. Enfin, la substance est addictive, mais pas autant qu’on pourrait le croire ; c’est principalement la puissance qu’elle procure qui l’est. »

Zhihao s’interrompit pour laisser aux adolescents le temps de digérer son exposé. Cela faisait effectivement beaucoup d’informations à assimiler en peu de temps, mais puisque c’était son travail de les éduquer sur ce sujet, elle comptait le faire dans les règles.

« Dites-moi si je vais trop vite, surtout. » fit-elle, jetant une bouée de sauvetage au cas où certains seraient en train de couler. « Des questions ? »

Hanna écoutait attentivement le discourt détaillé de l'héroïne chinoise, c'était intéressant de l'entendre insister sur la mentalité qui pouvait mener une personne à prendre cette drogue.

L'araignée n'y avait jamais réfléchie, elle s'était renseignée sur les effets qu'il avait et les effets secondaires et dangereux, ceci dit elle n'avait pas trouvé grand-chose, les informations publiques étant restreinte sur le sujet du trigger.

L'étudiante avait honte de se l'avouer, mais c'est vrai qu'elle n'avait jamais envisagé l'idée que quelqu'un veuille renforcer son alter a ce point la, de son point de vue personnel, elle avait eu tellement de mal à accepter le sien, qu'elle avait surtout pensée à comment faire pour le diminuer voir le faire disparaître.

Heureusement, elle ne pensait plus à ça depuis longtemps maintenant.


La plupart des étudiants l'écoutaient également, avec plus ou moins d'intérêt et de concentration.


Madame Lodestone les invita par la suite à la faire ralentir s'il y avait besoin, mais surtout à poser leurs questions s'ils en avaient.


L'araignée réfléchissait à de potentielle question, laissant les autres élèves poser les leurs, portant majoritairement sur l'état mental de ce qui en prenait et s'il y avait des études prouvant des maladies ou autre, ce qui était plutôt limite au niveau respect, mais bon.

Mais ce qui intéressait vraiment Hanna, c'était de savoir les risques que pouvait prendre Madame Meng, ce serait audacieux de la qualifiée d'amie, mais elle l'aimait beaucoup…


Elle leva la main timidement et demanda avec tout autant de timidité.


- Je n'ai pas vraiment réussie à me renseigner sur ce sujet donc je ne sais pas si vous avez le droit de me répondre….Mais, quels sont les risques qu'encourent ceux qui prennent du trigger...J'imagine qu'il y a des risque d'hypertension et de crise cardiaque, ou même des dégâts liés au changement de taille dans certain cas quand on en prend trop, mais… ce n'est que des suppositions de ma part...

Peut-être que son discours n’avait pas fait mouche, au final. La plupart des questions posées se résumaient à « Mais qui pourrait être assez fou pour vouloir s’injecter ce truc ? », ce qui, dans la mesure où l’électrokinésiste avait déjà pris soin de décortiquer la psychologie des criminels ainsi que les raisons qui les poussaient à faire usage de la substance, était assez frustrant. Elle dut donc déployer des trésors de patience et répéter plusieurs fois son propos avant qu’ils comprennent que non, tous ceux qui s’en servaient n’étaient pas des dérangés ou des idiots. Aizawa n’aidait pas, bien loin de là : s’il affichait une façade d’indifférence imperturbable, il ne pouvait en revanche pas tromper son électroperception. Ses contractions musculaires le trahissaient : il se délectait de la contrariété de la militaire et se retenait à grand-peine de rire à ses dépens.

« Dites-vous que certains utilisent aussi le Trigger pour révéler le potentiel caché de leur don : quand ils voient ce qu’ils peuvent faire sous l’action de la substance, cela leur donne une meilleure idée de la direction vers laquelle orienter leur entraînement. D’autres, ceux dont l’Alter les dote d’un facteur de régénération, l’emploient comme un médicament pour guérir plus vite et plus complètement de leurs blessures ; c’est même une approche thérapeutique légale dans certains pays. » ajouta-t-elle afin de renforcer son argumentaire.

Heureusement qu’Hanna était là pour remonter un peu le niveau en émettant une interrogation plus pertinente. Zhihao comptait déjà aborder le sujet des répercussions négatives un peu plus tard, il était bon de voir que l’araignée avait anticipé la suite.

« La question des effets secondaires indésirables est plus complexe qu’il n’y paraît. Cela dépend à la fois de l’Alter de la personne – et donc des fonctions biologiques affectées par la substance, ainsi que du contrecoup particulier du pouvoir si la capacité du corps à le supporter n’est pas également amplifiée –, de sa consommation de drogue et de la qualité de cette drogue. Tenez, faites passer... »

Ouvrant la mallette à ses pieds, la chinoise en extirpa le matériel qu’elle avait préparé pour illustrer sa leçon, à savoir tout un assortiment d’ampoules de Trigger – vides, évidemment – provenant de divers fabricants et les tendit aux élèves du premier rang, qui en donnèrent à leurs camarades jusqu’à ce que chacun d’eux en ait au moins une en main.

« Une consommation occasionnelle modérée n’est pas trop dangereuse pour la santé. Pour une dose unique, une fois le sursaut d’énergie retombé, les symptômes sont les mêmes qu’après un exercice physique et mental intense ; il arrive aussi souvent que, sous l’effet de l’adrénaline, l’utilisateur se blesse sans s’en rendre compte et soit désagréablement surpris ensuite. Il est possible de retarder cela jusqu’à un certain point en prenant une nouvelle dose quand les effets de la première commencent à se dissiper, mais au bout d’un moment le corps finit par épuiser ses réserves d’énergie, et toute la fatigue et la douleur accumulées se font alors sentir d’un coup. Ceux qui en consomment trop souvent, sans laisser le temps à leur organisme de récupérer entièrement, ruinent leur corps à petit feu comme le ferait un sportif qui s’entraîne trop et abuse des stéroïdes, un alcoolique qui se détruit le foie ou un salaryman qui se surmène jusqu’à s’effondrer à son poste de travail. »

À en juger par la mine des lycéens, ils pensaient que c’était déjà bien assez malsain comme ça. Le pire restait pourtant à venir : le corps humain était conçu pour l’endurance plutôt que pour la puissance explosive, c’était pour cela qu’un cent mètres couru à toute vitesse épuisait davantage qu’une marche d’un kilomètre. De la même façon, nombre de substances bénignes ou en tout cas relativement peu dangereuses ne révélaient toute leur toxicité qu’à partir d’une certaine concentration ; « la dose fait le poison », comme le disait Paracelse. Si ce dernier principe n’était pas vrai en toutes circonstances, il fallait néanmoins garder ces deux idées à l’esprit pour l’exposé à venir.

« Si les effets secondaires dont je viens de vous parler sont déplaisants, sachez toutefois que les vrais problèmes commencent lorsqu’on ne se contente plus de prolonger l’action d’une dose en en prenant une autre, mais que l’on s’en administre plusieurs en même temps pour obtenir une force encore plus grande. Si cela permet effectivement de repousser toujours plus loin les limites de l’Alter, cela inflige aussi un stress beaucoup plus important à l’organisme, multiplie les risques de perte de contrôle et de dysfonctionnement du pouvoir. Une double-injection rendra souvent l’utilisateur malade pendant plusieurs heures à plusieurs jours, une triple lui vaudra généralement un séjour à l’hôpital… en plus des autres complications qui peuvent se déclarer, par exemple lorsque les organes d’un hétéromorphe transformé par la drogue ne reviennent pas tous au même rythme à leur taille et à leur forme d’origine. »

Cette image mentale peu ragoûtante donna lieu à bon nombre de grimaces. Compréhensible, elle avait vu ce que ça donnait lorsqu’un cœur encore trop gros était écrasé par une cage thoracique en cours de rétrécissement, ou se retrouvait au contraire trop petit et donc incapable d’alimenter en sang un corps plus grand qu’il ne l’était au naturel. Le résultat n’était généralement pas beau à voir.

« À partir d’un certain niveau, l’Alter ne revient jamais totalement à la normale ; certains ont de la chance et se retrouvent avec une amélioration permanente, mais dans la majorité des cas, cela se révèle plutôt handicapant. Et bien sûr si l’on pousse encore plus loin, le Trigger finit par être mortel : soit la personne est tuée par le déchaînement de son propre pouvoir, soit un organe vital finit par lâcher.  Il y a d’ailleurs des fanatiques qui exploitent délibérément cet effet : lorsqu’ils savent qu’ils n’ont aucune chance de s’en tirer, ils s’injectent une dose létale pour une attaque-suicide dévastatrice. J’ai des vidéos du phénomène, on lui donne toutes sortes de noms plus ou moins poétiques, cependant je doute que votre professeur m’autorisera à vous les montrer. »

« En effet, cela ne fait pas partie du matériel pédagogique accepté à Yuei. » rétorqua le héros borgne, intervenant pour la première fois depuis qu’elle s’était mise à parler. Il revint toutefois très vite à son mutisme ; apparemment, il ne comptait pas s’exprimer à moins qu’elle ne se mette à sortir des clous. D'accord, puisque c'était comme ça...

« Cela m’amène aux ampoules que je vous ai distribuées. Allez-y, examinez-les. Pouvez-vous me dire ce que vous voyez sur l’étiquette ? Et encore une fois, n’hésitez pas si vous avez des questions. »

Bien que ce fut plus compliqué que prévu, les élèves qui doutaient encore de la santé mentale des personnes prenant du trigger, comprenaient peu à peu les raisons pouvant mener ce choix.
Vu la réaction des autres étudiants, la question d'Hanna intéressa un peu plus l'audience qui attendit d'avoir la réponse de Lodestone, qui ne se fit pas prier pour y répondre, sûrement contente d'avoir une question ne portant pas sur la psychologie de ceux cédant à la tentation.

L'araignée écoutait attentivement la réponse de l'héroïne chinoise, qui était très détaillé, c'était plaisant d'avoir toutes ces informations, surtout après avoir galéré pour avoir un dixième de ces renseignements.

A chaque description donnée par son instructrice du jour, l'étudiante ne pouvait pas s'empêcher de se faire une image mentale et imaginer ce que ça pouvait donner. Autant dire que pour le fan d'horreur qu'elle était, ça avait tendance à donner des images peu ragoûtantes.

Hanna récupéra à son tour une des ampoules de trigger et ne put s'empêcher de pouffer doucement de rire en voyant le logo, un scorpion, dur de savoir si les autres élèves l'avaient fais volontairement, ou si c'était le hasard, mais elle trouvait ça plutôt comique que ce soit une créature de la famille des arachnides, elle imaginait bien ce qu'avait pu se dire ses camarades s'ils l'ont remarqués. « C'est pas ton cousin ? » « elle est faite pour toi cette ampoule. ».

L'étudiante pris la parole quand Lodestone demanda une description des ampoules.

- Eh bien… Celle que j'ai eu à le logo d'un scorpion et la mention que c'est une produit boostant les performances sportive… On dirait qu'elle était vendu comme stéroïde, mais il n'y a pas le nom du produit, ni de risque noté.

Elle tournait l'ampoule entre ses doigts, pour la regarder dans tout les angles.

-je pense que c'est une publicité pour que les gens la prenne sans savoir et demande de plus grandes doses peu à peu.

-La mienne a juste une tête de cobra dessus, y a rien d’écrit, sûrement de l’usage immédiat…


- Celle la est toute noire, avec une silhouette de lion en doré, comme si c’était un produit de luxe...

- Celle que nous avons es plus grandes que les votre, c'est pour les gourmand ça.

Zhihao s’attendait à ce que les apprentis-justiciers soient choqués en apprenant que la substance pouvait en l’essence être employée comme un mécanisme d’autodestruction, permettant à l’utilisateur d’emporter son ennemi avec lui dans la tombe quand tout le reste avait échoué. Ils semblaient cependant s’être endurcis peu à peu au fil du discours, et réagirent à cette dernière information comme un héros se devait de le faire, en mesurant toute sa gravité mais en gardant la tête froide. Tant mieux, c’était la meilleure chose à faire.

Le petit exercice auquel elle leur avait demandé de participer ne livra pas la réponse attendue par contre, mais c’était de sa faute : elle ne leur avait pas dit ce qu’ils étaient censés chercher après tout, et ce n’était pas comme si leurs observations n’étaient pas valides. Elle entreprit donc de leur expliquer la signification des détails qu’ils avaient remarqués, en commençant par Hanna.

« Il y a effectivement des dealers qui « piègent » leurs clients de cette façon, mais ils ferment généralement boutique très vite, car non seulement personne n’aime être drogué à son insu mais en plus, ce genre de tromperie aboutit souvent à des accidents. Non, votre ampoule à vous vient d’un producteur thaïlandais, un pays où la consommation de stéroïdes est légale ; il s’agit donc d’une excellente façon de déguiser la marchandise tant que ceux qui l’inspectent ne sont pas trop regardants. Bien entendu, les adeptes de la méthode cherchent plutôt à la faire passer pour d’autres médicaments lorsqu’ils cherchent à écouler leur marchandise dans des pays moins permissifs. »

Elle poursuivit en disséquant les caractéristiques de chaque capsule, l’une après l’autre. Ses élèves d’un jour étaient observateurs, elle l’avait déjà remarqué, toutefois il fallait encore qu’ils travaillent sur les conclusions qu’ils en tiraient.

« Celle sans la moindre inscription vient d’un petit producteur avec un budget limité. Le résultat est bon marché mais de piètre qualité, et a de fortes chances d’envoyer à l’hôpital un consommateur insuffisamment renseigné. Les laboratoires mieux établis préfèrent les clients réguliers et pour cela, il vaut mieux que ces derniers restent en bonne santé ; ils ajoutent donc des avertissements sur l’étiquette. La présence d’un logo signifie aussi que le fabricant est fier de son produit, de l’argent qu’il lui rapporte ainsi que de la protection dont il bénéficie, et veut donc que celui-ci soit reconnu, par opposition aux dilettantes qui préfèrent l’anonymat. »

Et oui, comme quoi, pour les criminels comme pour les héros, tout était une question d’image. Même les scélérats travaillant dans l’ombre n’échappaient pas à cette loi du marché.

« La noire et or est bien un produit de luxe, ou en tout cas de meilleure qualité : c’est un gimmick marketing visant les criminels les plus vaniteux ainsi que les acheteurs fortunés qui s’en servent dans un but récréatif – ceux-là par contre, vous pouvez les juger autant que vous voulez. »

Ah, les mines choquées et dégoûtées faisaient leur grand retour. Il y avait de quoi : la militaire avait vécu pléthore d’événements traumatisants au cours de ses années passées sur les champs de bataille, mais les « activités » auxquelles s’adonnaient certains riches dégénérés étaient plus dérangeantes encore. Le genre de choses qui arrivaient presque à la pousser à la boisson, et dont elle ne souhaitait à personne d’être témoin. Enfin, plus qu’une capsule...

« La grande ampoule n’est pas destinée aux gourmands mais aux pigeons : ils pensent que l’effet dopant sera plus important avec une plus grande quantité de sérum, sauf que lorsque les producteurs veulent créer une dose adaptée à un client de grande taille, ils accroissent plutôt la concentration. La quantité de principes actifs dans une grande ampoule est la même, elle a juste été diluée davantage. Là aussi, ce genre d’arnaque est la marque d’un vendeur indélicat. »

Voilà, maintenant que le détour était terminé, la chinoise allait pouvoir reprendre le fil de sa leçon. S’avançant vers l’une des voisines de l’araignée, elle tourna le cylindre qu’elle avait dans les mains puis tapota du doigt une section de l’étiquette.

« J’attire votre attention sur cette ligne. Pouvez-vous me dire ce qu’il y a écrit ? »

L’élève s’exécuta vaillamment, mais l’anglais n’était clairement pas son fort ; la militaire entendit Eraser Head grommeler quelque chose à propos de Present Mic et de cours de rattrapages. Néanmoins, la jeune fille parvint à déchiffrer l’inscription : BML, grade-1 general formula, female.

« Comme je vous l’ai dit, il existe différents niveaux de qualité, appelés « grades ». Le grade zéro n’est pas une classification « officielle » dirons-nous, il désigne toutes ces mixtures artisanales dont je vous parlais plus tôt, que des chimistes du dimanche concoctent dans leur cave et qui sont souvent coupées avec d’autres stimulants – méthamphétamine, scopolamine, voire pire –, conférant une fausse impression d’invincibilité : l’image de berserkers des utilisateurs de la substance vient surtout de ceux qui consomment du grade zéro. Elles sont également pleines d’impuretés dues à des réactions mal maîtrisées, et la combinaison de ces deux facteurs fait que c’est ce grade qui a les effets secondaires les plus graves. Les laboratoires qui tiennent à leur réputation refusent d’en vendre, le Trigger produit à échelle industrielle est donc au minimum de grade 1 ; plus le chiffre est élevé, moins la formule contient d’impuretés, et plus le producteur rajoute des adjuvants qui aident le corps à mieux la supporter. L’autre axe d’amélioration, c’est l’ajustement de la formule pour adapter le produit au consommateur ; sa composition précise peut ainsi être altérée en tenant compte du sexe du client, de son poids, de son âge, de son pouvoir et de nombreux autres facteurs. Il est même possible de créer une drogue qui dope spécifiquement certains aspects de l’Alter et pas d’autres, c’est notamment le cas du Trigger utilisé en thérapie régénérative. »

Une pause pour reprendre son souffle après ce monologue, et laisser l’occasion aux élèves d’assimiler ces nouvelles informations. Elle tourna derechef la tête vers Aizawa, s’attendant à ce qu’il l’ignore une fois de plus… mais à sa grande surprise, il décida de venir mettre son grain de sel, ce coup-ci !

« Le Trigger employé à Naruhata était une exception à ce que Lodestone vient de vous expliquer : il était plus utilisé comme une arme chimique que comme un produit dopant. La drogue elle-même était de bonne qualité, et pourtant le fabricant y avait délibérément incorporé de puissants excitants et hallucinogènes afin de déclencher un violent épisode psychotique, transformant de parfaits innocents en « vilains instantanés ». Cette variante était reconnaissable par le fait qu’elle noircissait la langue de ceux qui y étaient exposés. »

Ayant dit ce qu’il avait à dire, l’homme à l’écharpe se tut à nouveau, laissant sa collègue poursuivre. Il s'agissait cependant d'une intervention très pertinente, il fallait le reconnaître.

« La plus-value du Trigger de grade élevé ne se situe pas tant au niveau de la puissance qu’à celui de la durée d’action et de la minimisation des répercussions négatives sur l’utilisateur. Pour cette raison, tout le monde ne pense pas qu’il s’agit d’un bon investissement, car évidemment il coûte plus cher. Les formules spécialisées – ou designer formulas, par opposition à la formule dite générale ou universelle – ont également leurs désavantages. Pour commencer, plus elles sont spécialisées, moins il y a de gens capables de s’en servir : par exemple, si une jeune femme menue tente de se servir d’une dose prévue pour un homme âgé et massif avec un Alter très différent, dans le meilleur des cas la substance sera moins efficace que si elle avait pris la formule générale, mais le plus souvent le contrecoup sera beaucoup plus important. Cela veut dire que s’il arrive quelque chose à la personne pour laquelle ces doses sont prévues, ses camarades auront peu de chance de pouvoir s’en servir et leur argent aura été gaspillé. De la même façon, au-delà d’un certain degré de spécialisation, les dealers n’en ont pas toujours en stock et doivent passer commande à leur fournisseur, ce qui prend du temps. Enfin, la préparation des grades les plus élevés requiert des analyses très approfondies du corps et de l’Alter du commanditaire, pouvant aller jusqu’à un séquençage génétique complet. Peu de criminels acceptent de livrer autant d’informations sur leur pouvoir, comme vous pouvez vous en douter. »

Avec raison, puisqu’avec une telle quantité de données et de prélèvements, des scientifiques comme ceux des laboratoires les plus réputés pouvaient tout aussi facilement trouver et exploiter le point faible de l’Alter en question, le modifier ou même le dupliquer. Personne n’aimant se retrouver avec ce genre d’épée de Damoclès au-dessus de la tête, les malfrats assez braves ou désespérés pour vouloir s’en procurer n’étaient pas légion.

« Enfin, vous n’en verrez pas souvent, du Trigger de ce niveau. Pour tout un tas de raisons, l’Asie produit essentiellement une marchandise de moins bonne qualité que ce que l’on peut trouver de l’autre côté du Pacifique ; celui de grade 1 n'agit que quelques minutes, là où le grade 4 fait effet pendant une ou deux heures. Rares sont les fournisseurs asiatiques à proposer du grade 3 ou plus. Tout est clair, jusqu'ici ? »

Hanna regardait l'ampoule qu'elle avait dans la main, la regardant comme si cette petite fiole contenait tous les secrets de l'univers, elle était plongée dans les explications et les descriptions que l'intervenante du jour faisait.

Les recherches de l'araignée n'avaient porté que sur le Japon et la Chine, pensant naïvement que la consommation de trigger ne s'était pas encore répandu à d'autres pays, mais en y pensant, c'était logique, les drogues de toutes sortes restaient rarement dans leurs pays d'origine, alors une substance qui permet de doper les alters…

Madame Meng expliqua également le principe de « grades » dans le commerce du trigger, ce qui devait faciliter la vente, moins chère et « abordable » pour les vilains, plus chère et moins dangereux pour les personnes aisées prenant la drogue de façon « récréative » ou comme une marque de pouvoir et d'importance. Cela pouvait aussi servir à des chef de gang pour en faire prendre à leurs membres, en montrant qu'ils en prenaient également.

En tout cas, ce « business » était mieux organisé que la jeune fille l'aurait cru, c'était toujours compliqué de se rendre compte que c'était loin d'être aussi hasardeux et dérisoire qu'on essayait de le faire croire au grand public.

C'était un peu étranges et dur de savoir si d'autres étudiants y pensaient également, mais Hanna ne pouvait s'empêcher d'imaginer ce à quoi elle ressemblerait sous l'effet de ce truc. Ça donnerait sûrement un monstre semble aux araignées géantes de certains films d'horreur ou de jeux vidéo, elle imaginait sa partie araignée prendre le dessus et laisser la partie humaine éteinte en veille ou pire consciente mais n'ayant aucun contrôle, l'étudiante sentie un grand frisson la parcourir du bout de son abdomen d'araignée jusqu'à sa nuque humaine.

Espérant une réponse négative, tout en étant persuadé du contraire, elle se risqua à poser une question qui l'effrayait.

- C'est déjà arriver que le trigger soit utilisé comme arme ?… Je veux dire...Pas en prendre sot mème pour devenir plus agressif...Mais forcer quelqu'un à en prendre ou lui en injecter de force...

Pas d’incompréhension donc, tant mieux. Zhihao n’avait même pas eu besoin de ressortir la vieille analogie de la différence entre le prêt-à-porter et les atours faits sur mesure pour les aider à saisir le concept des grades de la substance. Une analogie un peu simpliste à son goût, mais généralement suffisante tant qu’on ne cherchait pas à former des experts.

En tout cas, Hanna avait une nouvelle question. L’héroïne ne put s’empêcher de noter que l’araignée participait davantage que la plupart de ses camarades, ce qui allait à l’encontre de sa timidité autoproclamée. Avait-elle l’habitude de mettre cet aspect de sa personnalité de côté pour satisfaire sa soif de connaissances, s’agissait-il d’un développement plus récent, ou était-elle seulement plus à l’aise du fait de leurs interactions précédentes ? La deuxième possibilité serait la meilleure ; s’il n’y avait pas de problème à être discrète, il ne fallait pas que cette discrétion soit au détriment de la capacité à s’exprimer lorsque c’était nécessaire, y compris quand cela signifiait sortir de sa zone de confort. Il faudrait peut-être qu’elle en parle à Eraser Head, si elle pouvait trouver la bonne manière d’aborder le sujet…

Mais avant toute chose, ses élèves attendaient sa réponse.

« Tout dépend de ce que vous entendez par là. Comme l’a dit votre professeur, l’utilisation qui en a été faite à Naruhata était une anomalie. Si le but est d’empoisonner l’ennemi, il y a des façons plus simples et plus efficientes de s’y prendre, sans gaspiller un produit aussi coûteux ; ce ne sont pas les gaz de combat spécialement conçus à cet effet qui manquent. Ceci dit il y a bien des groupes qui se livrent à des actes de bioterrorisme en pulvérisant du Trigger de basse qualité sous forme aérosolisée, ou en l’introduisant dans les stocks de nourriture ou le réseau de distribution d’eau. Généralement, cela fait partie d’une campagne concertée de guerre psychologique, le nombre de victimes étant secondaire par-rapport à l’impact médiatique de telles attaques. C’est une tactique qui était notamment employée par certains groupes anti-Alters au siècle dernier, mais qui l’est beaucoup moins aujourd’hui ; l’objectif était alors de « dévoiler au grand jour l’inhumanité de ces aberrations et de faire en sorte qu’ils soient détruits par leurs propres capacités contre-nature », si je me rappelle bien de la citation. Des recherches avaient également été menées pour modifier le Trigger afin d’en faire une toxine sélective qui affecterait uniquement les détenteurs de pouvoirs, à des fins de génocide. »

Consternation dans les rangs. Effectivement, lorsque les livres d’Histoire évoquaient les troubles de cette période, ils avaient tendance à passer un peu vite sur certains événements et leurs implications, ou du moins à les euphémiser. Il ne faudrait cependant pas non plus que leurs réflexions partent trop loin dans l’autre direction.

« Bien entendu, ce plan a échoué et n’avait de toute façon quasiment aucune chance de réussir. Détruire le monde n’est pas si facile, pas avec ce genre de méthodes en tout cas. Bref, pour en revenir au sujet, au-delà de son utilisation en tant qu’arme chimique, il y a d’autres situations où la substance peut être administrée contre le gré d’une personne. Certains chefs de guerre ou gangsters peu scrupuleux en donnent parfois à leurs troupes sans leur consentement, souvent en en mettant dans l’eau, la nourriture ou en la faisant passer pour un médicament. Il n’est pas rare que les gens que l’on oblige à prendre part à des combats clandestins soient drogués. D’autres s’en servent comme d’un outil de torture, généralement pour les mêmes raisons que les terroristes dont j’ai déjà parlé. Et... »

La chinoise s’interrompit, incertaine. Elle avait déjà vaguement évoqué la chose plus tôt en parlant des loisirs plus que discutables de certains membres de la soi-disant élite, mais elle s’était volontairement abstenue de rentrer dans les détails, car elle ne savait pas jusqu’où s’étendait la tolérance de Yuei en matière d’histoires sordides. Aizawa réagit en levant un sourcil interrogateur, réfléchit quelques instants à ce qui pouvait la faire hésiter ainsi et, étant parvenu à la conclusion logique de son raisonnement, prit la décision à sa place :

« Allez-y, vous pouvez leur dire, j’en prend la responsabilité. Ils y seront confrontés tôt ou tard de toute façon, et ils ne sont pas là pour être dorlotés. »

Très bien, mais ce n’était pas de sa faute : la manière de faire nippone était si étrange parfois qu’elle en avait du mal à savoir où se trouvait la ligne à ne pas dépasser. Enfin, la réponse, donc.

« La pratique existe aussi dans le milieu de la prostitution forcée. Le plus souvent, les personnes qui en sont victimes sont des hétéromorphes, car ils sont très demandés. Les clients aiment pouvoir jouer avec le degré d'inhumanité de leurs « partenaires », vous comprenez. »

Voilà, le diable était sorti de sa boîte et maintenant elle ne pouvait plus l’y remettre. Restait à voir comment ils allaient le prendre.

Lodestone avait raison, pour les trois possibilités, Hanna avait toujours plus de faciliter à s'exprimer avec ses professeurs ou des « supérieurs », enfin, surtout quand c'était dans le but de sa formation, sa timidité se mettait en pause le temps de l'exercice, elle arrivait à très bien communiqué avec un binôme le temps de l'entraînement, mais redeviens timide et hasardeuse une fois ce dernier terminé. Son travail sur soi la faisait avançait lentement pour vaincre sa timidité et ses interactions avec l'héroïne chinoise l'aidait encore plus dans son aisance du moment.

En tout cas, l'étudiante était une fois de plus plongée dans les paroles de l'intervenante, l'araignée savait déjà à peu près, ce qui avait été utilisé à Naruhata, mais les autres utilisations qui étaient décrites... Ça elle ne l'avait pas imaginée, pourtant, en y réfléchissant c'était logique, mais le principe des armes chimiques n'étaient jamais trop évoqué dans les cours, vu l'interdiction de ce type d'arme, ils devaient vouloir faire oublier leur utilisation pour renforcer le côté monstrueux de la chose.

L'idée d'une toxine visant à éliminer avait de quoi servir de scénario pour un film catastrophe...ou d'horreur selon les effets du poison, c'était horrible d'imaginer que certaines personnes avaient voulut l'utiliser dans la vraie vie...

-Au siècle dernier ? Merde, je croyais que le trigger était un problème depuis une décennie, max…

Madame Meng, après une certaine hésitation jusqu'à avoir l'autorisation de Eraser Head, expliqua comment la drogue pouvait être impliqué dans des histoires de prostitution forcée, visiblement visant en particulier les hétéromorphes.
C'était logique, quand on y pense, changement physiques plus important et peut-être un instinct plus...Sauvage disons…

Hanna beugua un peu et évidemment quelques regards s'était tournés vers elle, étant la seule hétéromorphe femme visible. Exprimant un mélange de questionnement
L'araignée bougea un peu ses pattes d'araignée et baissa la tête en disant d'un air un peu dégoûtée tout en regardant ces dernières…

-Y a vraiment des gens qui aiment ce genre de truc… ?

Une autre élève toussota doucement et essaya de changer de sujet.

- Du point de vue médicale, le trigger n’ai utile que pour les personnes ayant un alter de régénération ou un truc du genre, ou il a d’autre utilité ?